mardi 30 juillet 2013

Rejet illégal (CAA de Marseille du 14 mai 2013) d’une candidature sur liste d'aptitude par le Conseil général des Bouches du Rhône



Par S. Soykurt
Publié le 29/07/2013
La personne dont la candidature à un emploi a été illégalement rejetée peut obtenir réparation du préjudice subi si elle démontre la perte d’une chance sérieuse d’obtenir le poste.
Un candidat à un poste d’architecte au sein d’un département a vu sa candidature rejetée au motif qu’il ne satisfaisait pas aux conditions statutaires de ce recrutement. Cette décision a été annulée car le candidat était bien lauréat du concours des ingénieurs territoriaux.
L’illégalité du refus opposé au candidat constitue une faute de nature à engager la responsabilité du département, mais l’intéressé ne peut obtenir la réparation des préjudices qui ont pu résulter de cette décision, que s’il peut établir avoir subi une perte de chance sérieuse d’obtenir le poste. L’intéressé disposait d’une formation initiale et d’une expérience professionnelle, dont la qualité le plaçait comme un candidat sérieux au poste proposé.
Le département n’a pu produire le curriculum vitae du candidat retenu, et n’apporte aucun élément relatif à ses qualifications et son parcours professionnel, se contentant d’indiquer que l’ancienneté du dossier ne lui aurait pas permis de fournir ces éléments. Dans ces conditions, l’intéressé doit donc être regardé comme établissant avoir subi une perte de chance sérieuse de voir sa candidature retenue pour occuper le poste d’architecte conseil du département.
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RÉFÉRENCES


Extraits

"En ce qui concerne la responsabilité du département :

2. Considérant qu'ainsi que l'a rappelé le jugement attaqué, la Cour de céans, dans son arrêt rendu le 27 novembre 2007 a annulé la décision du 3 septembre 1999 par laquelle le président du conseil général des Bouches-du-Rhône a rejeté la candidature de M. A... D... au poste d'architecte-conseil en qualité d'ingénieur en chef de 1ère catégorie, au motif que M. A...D...était bien, lorsque sa candidature a été examinée, et contrairement à ce que soutenait le département, lauréat du concours national de recrutement des ingénieurs territoriaux en chef de première catégorie organisé par le centre national de la fonction publique territoriale, et figurait, en outre, sur la liste d'aptitude, en cours de validité, au grade d'ingénieur territorial en chef ; qu'il remplissait ainsi les conditions pour être recruté selon les modalités prévues par le département ; que l'illégalité du refus opposé à M. A... D...constitue une faute de nature à engager la responsabilité du département des Bouches-du-Rhône ; que l'intéressé n'est toutefois en droit d'obtenir la réparation des préjudices qui ont pu résulter de cette décision, que s'il peut établir avoir subi une perte de chance sérieuse d'obtenir le poste ; 


S'agissant de la perte de chance sérieuse :

3. Considérant qu'il ressort de l'instruction que M. A...D..., inscrit sur la liste d'aptitude d'ingénieur territorial en chef, architecte diplômé, ancien enseignant titulaire de l'école d'architecture de Marseille Luminy, Grand Prix d'architecture et d'urbanisme, ancien architecte urbaniste conseil du CAUE de la Corse du Sud et de la région de Corse, disposait d'une formation initiale et d'une expérience professionnelle, dont la qualité le plaçait comme un candidat sérieux au poste proposé par le département des Bouches-du-Rhône ; que cette collectivité territoriale, bien qu'ayant été invitée par la Cour à produire le curriculum vitae du candidat qu'elle a retenu, n'apporte aucun élément relatif aux qualifications et aux parcours professionnel de cette personne, se contentant d'indiquer que l'ancienneté du dossier ne lui aurait pas permis de fournir de tels éléments ; que dans ces conditions, M. A...D...doit être regardé comme établissant avoir subi une perte de chance sérieuse de voir sa candidature retenue pour occuper le poste d'architecte conseil du département ; 

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant du préjudice financier et des troubles dans les conditions d'existence :

4. Considérant qu'alors que sa demande indemnitaire était contestée sur ce point, M. A... D... n'apporte aucun élément permettant d'apprécier la réalité de son préjudice financier et des troubles dans ses conditions d'existence ; que, dans ces conditions, sa demande indemnitaire ne peut qu'être rejetée ;

S'agissant du préjudice moral :

5. Considérant, qu'il résulte de l'instruction, que M. A...D...est fondé à soutenir que le rejet de sa candidature prononcé sans réel examen de sa candidature, présentait un caractère vexatoire à l'origine d'un préjudice moral ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice, en condamnant le département des Bouches-du-Rhône au versement à M. A... D... de la somme de 2 000 euros ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. (...)" ; 

7. Considérant que le département des Bouches-du-Rhône, qui succombe dans 
la présente instance, ne peut prétendre au remboursement de ses frais de procédure ; qu'il 
y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer 2 000 euros à M. A... D..., à la charge du département des Bouches-du-Rhône, au titre de ses frais de procédure ;

D E C I D E :

Article 1er : Le département des Bouches-du-Rhône est condamné à payer à M. A... D... la somme de 2 000 (deux mille) euros. 
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...D...est rejeté.
Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Marseille en date du 7 avril 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le département des Bouches-du-Rhône versera 2 000 (deux mille) euros à 
M. A...D...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions du département des Bouches-du-Rhône présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...A...D...et au département des Bouches-du-Rhône."
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N° 11MA017332

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