ASSURANCE-CHÔMAGE : LE PATRONAT PORTE LA RESPONSABILITÉ DE L'ÉCHEC DE LA NÉGOCIATION
La négociation assurance-chômage a pris fin le 20 février en début d'après-midi sur un constat d'échec suite au refus du patronat de proposer des mesures contraignantes et généralisées de lutte contre les recours abusifs aux contrats courts.
La CFDT appelle désormais à la tenue d’une réunion tripartite au ministère du Travail. De facto, le gouvernement reprend la main sur le dossier.
La CFDT appelle désormais à la tenue d’une réunion tripartite au ministère du Travail. De facto, le gouvernement reprend la main sur le dossier.
« On arrive au bout de la négociation. Nous avons posé une question simple au patronat. Selon les propositions, nous rentrerons dans le vif du sujet ou la séance s’arrêtera très vite », expliquait Marylise Léon, cheffe de file CFDT, à son arrivée au Medef. Une heure plus tard, les partenaires sociaux actaient l’échec de la négociation, ouverte en novembre dernier. Et pour la CFDT, le patronat porte une part de responsabilité dans cet échec, en refusant de proposer des mesures contraignantes et généralisées de lutte contre les recours abusifs aux contrats courts. « le Medef a d’ailleurs directement ouvert la séance en actant l’échec de la négociation », regrette Marylise Léon.
Les contrats courts, point de blocage
Dans une ultime proposition, le patronat (Medef, U2P, CPME) a tenté d’échapper à un dispositif de modulation des cotisations sur les contrats courts, dont le nombre a plus que doublé en 15 ans. Le document, remis sur table, prévoyait la « mise en place d’un fonds de sécurisation des parcours des salariés en contrats courts récurrents au sein de l’assurance chômage, destiné à financer des aides spécifiques (abondement CPF, aide à la mobilité…) et financé par une contribution forfaitaire égale à 5 euros pour chaque fin de CDD d’usage », alors que ces contrats sont dérogatoires sans limitation de durée ni délai de carence.
Loin, très loin, des attentes des syndicats qui demandent depuis des années une mesure pénalisant financièrement les entreprises qui abusent des contrats courts. Soit par le biais d’une cotisation dégressive en fonction de la durée des contrats (schéma défendu par la CFDT depuis 2016) soit par un système de modulation des cotisations en fonction du taux de contrats à durée limité dans l’entreprise (scenario défendu par FO). Ce 20 février, « les propositions des employeurs ne changeront en aucun cas les comportements des employeurs qui veulent d’abord l’hyper-flexibilité », résume Marylise Léon.
Reprise en main par l’Etat
Dès le début, le cadre « contraint » de la négociation a perturbé les discussions des partenaires sociaux, plutôt habitués à négocier sans interférence de l’Etat. Le document de cadrage du gouvernement fixant aux organisations syndicales et patronales un calendrier et une trajectoire financière n’a cessé de parasiter les échanges – le patronat se rangeant régulièrement derrière pour tenter d’échapper au bonus-malus, dont le terme n’était pas clairement mentionné. « Ces éléments ont inévitablement tendu les positionnements des uns et des autres », résume un négociateur. « Depuis le début il y avait un acteur fantôme dans cette négociation », abonde Marylise Léon.
Comme l’y autorise la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018, l’Etat va donc reprendre la main. Le gouvernement pourrait ainsi mettre en place son dispositif de bonus-malus (promesse de campagne d’Emmanuel Macron) mais également appliquer les mesures d’économies, de l’ordre de 3 à 3,9 milliards d’euros sur trois ans, sur l’indemnisation des demandeurs d’emploi. « Les demandeurs d’emploi ne doivent pas être les grands perdants d’une réforme qui serait guidée par la seule recherche d’économies budgétaires », réitère aujourd’hui la CFDT qui redemande aujourd’hui la tenue d’une réunion tripartite au ministère du Travail.
Une nouvelle ère
« Désormais, on change la nature de l’exercice. D’un dialogue social paritaire, on passe à un dialogue social tripartite », expriment ce jour plusieurs organisations syndicales. De ce point de vue, la CFDT se dit inquiète, notamment pour les demandeurs d’emploi. « Nous ne partageons pas la vision du gouvernement qui consiste à faire des économies parce que le régime serait trop généreux. Il faudra ensuite se poser la question de notre place d’un régime qui n’est plus vraiment paritaire ». Quelles sont les intentions du gouvernement ? La réponse ne devrait pas tarder.