Analyse obligatoire de l’air intérieur des établissements recevant du public, introduction de la mesure de COV dans le HQE : spécialiste de l’ingénierie des stratégies de santé dans les bâtiments, Suzanne Deoux décrypte le nouveau cadre réglementaire sur la qualité de l’air, et pointe le manque de précaution pris vis-à-vis du radon.
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Plusieurs textes réglementaires ont établi la surveillance obligatoire de la qualité de l'air des établissements recevant des enfants. Comment cela va-t-il se passer ?
Concrètement, avant 2015, toutes les crèches et les écoles maternelles devront avoir fait réaliser une analyse de la qualité de l'air. Les concentrations en formaldéhyde (*) , en benzène et en CO2 au sein de chacun de ces lieux recevant des enfants, devront être connues. En pratique, il est possible que tous ne jouent pas le jeu. En effet, l'amende prévue au cas où la mesure ne serait pas réalisée dans le temps imparti ne s'élève qu'à 1500 euros, soit moins que le coût d'une analyse de la qualité de l'air. Certains pourraient donc être tentés de payer la pénalité et éviter ainsi d'assumer le résultat de la mesure.
On parle beaucoup du formaldéhyde. Est-il si dangereux ?
Le Centre international de recherche sur le cancer classe le formaldéhyde, dans le cas d'expositions professionnelles, comme un cancérogène certain pour l'homme. Ce classement vise à protéger les salariés manipulant le composé. Au sein des bâtiments, le formaldéhyde renforce surtout les problèmes d'allergies dont 20% de la population française souffre.
Cependant, il présente des caractéristiques d'émissions qui font de lui un polluant particulièrement difficile à déloger. Contrairement aux autres COV, le formaldéhyde va être émis longtemps par les matériaux. Et on constate qu'une augmentation de la ventilation, qui permet de réduire la concentration de beaucoup de polluants, n'a pas d'effet sur le formaldéhyde car son dégazage des matériaux augmente par la même occasion. Plus que pour tout autre polluant, il est donc nécessaire de réduire le formaldéhyde à la source.
Quels sont les concentrations que l'on rencontre ?
Les mesures déjà réalisées au sein d 'écoles et de crèches montrent que près de 75% des établissements présentent une concentration en formaldéhyde comprise entre10 microgrammes /m3 et 30 microgrammes/ m3. Seulement 10% des établissements se situent en dessous de 10 microgrammes/m3.
En choisissant de fixer une concentration maximale de référence à 30 microg / m3 d'air, la France se situe parmi les pays les plus précautionneux. A titre de comparaison, le Canada a fixé une valeur-guide à 50 microgrammes / m3. Néanmoins, la valeur-guide hexagonale n'entrant en vigueur qu'à compter de 2015, les concentrations mesurées au sein des crèches et des écoles maternelles ne devront pas obligatoirement se situer en dessous. A compter de 2023, cette valeur-guide sera rabaissée à 10 microgrammes/ m3.
Concrètement, avant 2015, toutes les crèches et les écoles maternelles devront avoir fait réaliser une analyse de la qualité de l'air. Les concentrations en formaldéhyde (*) , en benzène et en CO2 au sein de chacun de ces lieux recevant des enfants, devront être connues. En pratique, il est possible que tous ne jouent pas le jeu. En effet, l'amende prévue au cas où la mesure ne serait pas réalisée dans le temps imparti ne s'élève qu'à 1500 euros, soit moins que le coût d'une analyse de la qualité de l'air. Certains pourraient donc être tentés de payer la pénalité et éviter ainsi d'assumer le résultat de la mesure.
On parle beaucoup du formaldéhyde. Est-il si dangereux ?
Le Centre international de recherche sur le cancer classe le formaldéhyde, dans le cas d'expositions professionnelles, comme un cancérogène certain pour l'homme. Ce classement vise à protéger les salariés manipulant le composé. Au sein des bâtiments, le formaldéhyde renforce surtout les problèmes d'allergies dont 20% de la population française souffre.
Cependant, il présente des caractéristiques d'émissions qui font de lui un polluant particulièrement difficile à déloger. Contrairement aux autres COV, le formaldéhyde va être émis longtemps par les matériaux. Et on constate qu'une augmentation de la ventilation, qui permet de réduire la concentration de beaucoup de polluants, n'a pas d'effet sur le formaldéhyde car son dégazage des matériaux augmente par la même occasion. Plus que pour tout autre polluant, il est donc nécessaire de réduire le formaldéhyde à la source.
Quels sont les concentrations que l'on rencontre ?
Les mesures déjà réalisées au sein d 'écoles et de crèches montrent que près de 75% des établissements présentent une concentration en formaldéhyde comprise entre10 microgrammes /m3 et 30 microgrammes/ m3. Seulement 10% des établissements se situent en dessous de 10 microgrammes/m3.
En choisissant de fixer une concentration maximale de référence à 30 microg / m3 d'air, la France se situe parmi les pays les plus précautionneux. A titre de comparaison, le Canada a fixé une valeur-guide à 50 microgrammes / m3. Néanmoins, la valeur-guide hexagonale n'entrant en vigueur qu'à compter de 2015, les concentrations mesurées au sein des crèches et des écoles maternelles ne devront pas obligatoirement se situer en dessous. A compter de 2023, cette valeur-guide sera rabaissée à 10 microgrammes/ m3.
Le nouveau référentiel « HQE performance » inclut des mesures de qualité de l'air. Qu'en pensez-vous ?
Si l'on prend, parmi les 14 cibles que présente le référentiel HQE, la qualité de l'air comme prioritaire, la mesure des concentrations en formaldéhyde, benzène, CO2 et en particules est obligatoire. C'est évidemment une bonne chose. Mais on peut regretter que le référentiel, même s'il décrit un protocole de mesure précisant entre autres où et comment placer les capteurs, il ne précise pas quand il faut réaliser la mesure. Or, les conditions préalables de mesure doivent nécessairement être considérées. J'ai déjà observé des relevés de concentration réalisés juste après la peinture des murs ou la livraison de cartons, sans mise en fonctionnement de la ventilation. Les résultats ne peuvent, dans ces cas-là, être satisfaisants. D'autre part, la mesure des COV doit être accompagnée d'un relevé de la température et de l'humidité qui influent directement sur la concentration en formaldéhyde.
Dans « HQE performance », on trouve également, si le bâtiment se situe dans une zone à risque, l'obligation de mesurer la concentration en radon. Quel est votre avis sur la prise en compte de ce polluant que vous considérez comme le plus nocif ?
Le référentiel "HQE performance" exige une concentration pour le radon inférieure à 400 becquerels par m3. Or, l'OMS recommande aujourd'hui de se situer en dessous de 100 Bq/m3 et de ne surtout pas dépasser les 300 Bq/m3. Aux Etats-Unis, où un « constat radon » accompagne toute transaction immobilière, le seuil maximal est fixé depuis des années à 150 Bq/m3. Sachant que le radon provoque en moyenne 2000 cancers du poumon chaque année, soit autant que le tabagisme passif, il est difficile de trouver l'exigence du dernier référentiel HQE suffisamment protectrice pour la santé. Ceci est regrettable d'autant plus que la diminution des expositions au radon n'est généralement pas très difficile à obtenir et que la qualité globale de l'air en ressort à coup sûr améliorée.
Si l'on prend, parmi les 14 cibles que présente le référentiel HQE, la qualité de l'air comme prioritaire, la mesure des concentrations en formaldéhyde, benzène, CO2 et en particules est obligatoire. C'est évidemment une bonne chose. Mais on peut regretter que le référentiel, même s'il décrit un protocole de mesure précisant entre autres où et comment placer les capteurs, il ne précise pas quand il faut réaliser la mesure. Or, les conditions préalables de mesure doivent nécessairement être considérées. J'ai déjà observé des relevés de concentration réalisés juste après la peinture des murs ou la livraison de cartons, sans mise en fonctionnement de la ventilation. Les résultats ne peuvent, dans ces cas-là, être satisfaisants. D'autre part, la mesure des COV doit être accompagnée d'un relevé de la température et de l'humidité qui influent directement sur la concentration en formaldéhyde.
Dans « HQE performance », on trouve également, si le bâtiment se situe dans une zone à risque, l'obligation de mesurer la concentration en radon. Quel est votre avis sur la prise en compte de ce polluant que vous considérez comme le plus nocif ?
Le référentiel "HQE performance" exige une concentration pour le radon inférieure à 400 becquerels par m3. Or, l'OMS recommande aujourd'hui de se situer en dessous de 100 Bq/m3 et de ne surtout pas dépasser les 300 Bq/m3. Aux Etats-Unis, où un « constat radon » accompagne toute transaction immobilière, le seuil maximal est fixé depuis des années à 150 Bq/m3. Sachant que le radon provoque en moyenne 2000 cancers du poumon chaque année, soit autant que le tabagisme passif, il est difficile de trouver l'exigence du dernier référentiel HQE suffisamment protectrice pour la santé. Ceci est regrettable d'autant plus que la diminution des expositions au radon n'est généralement pas très difficile à obtenir et que la qualité globale de l'air en ressort à coup sûr améliorée.
(*)Le formaldéhyde est un gaz incolore qui est émis principalement par les produits ménagers et les matériaux de construction. Il est très courant aujourd'hui de détecter de faibles doses de formaldéhyde dans l'air intérieur. Lorsqu'il est présent à des niveaux élevés dans l'air, il se révèle par une odeur piquante. Des concentrations élevées de formaldéhyde peuvent causer des irritations des yeux, du nez et de la gorge et peuvent aggraver les symptômes de l'asthme chez les enfants et les nourrissons.
Le formaldéhyde peut s'infiltrer dans l'air intérieur de deux façons :
par les émissions des matériaux de construction et des produits ménagers : dégagement gazeux;
par des matériaux qui brûlent : combustion.
De faibles niveaux de formaldéhyde dans l'air intérieur sont actuellement très courants et émanent de certaines sources, notamment :
les produits de bois aggloméré qui nécessitent des colles contenant du formaldéhyde, comme les panneaux de particules, le panneautage de contreplaqués de feuillus et les panneaux de fibres à densité moyenne. Ces produits sont utilisés dans la construction et la rénovation des maisons et servent également souvent à fabriquer des meubles et des armoires;
les peintures, les adhésifs, les vernis et les finis de plancher;
les produits ménagers comme le papier peint, le carton blanchi et les articles en papier;
les émanations de véhicules des garages adjacents ou de l'extérieur;
la fumée des foyers et des poêles à bois;
la fumée du tabac.
En général, les sources à dégagement gazeux de formaldéhyde émettent de moins en moins de formaldéhyde au fil du temps. Toutefois, ils peuvent mettre des semaines - et parfois même des mois ou des années - à disparaître complètement.