Prime Macron : Twitter fait perdre Total en justice
Sur la base d'un tweet du PDG de Total Patrick
Pouyanné, des salariés du groupe pétrolier ont obtenu en justice le versement
de l'intégralité de la prime, promise à «tous nos salariés en France».
Le PDG de Total, Patrick Pouyanné.
(SIPA)
Publié le 14 mai 2021 à 16:07Mis à jour
le 14 mai 2021 à 22:04
Il faut tourner sept fois sa langue dans
la bouche avant de parler. Le proverbe connaît une nouvelle actualité à l'ère
des réseaux sociaux, y compris pour les entreprises et leurs dirigeants. Le PDG
de Total vient d'en faire l'expérience en justice.
L'affaire traitée par le tribunal judiciaire de
Créteil a démarré sur un simple tweet au lendemain de l'annonce par Emmanuel
Macron de la possibilité pour les entreprises d'accorder à leurs salariés une
prime exonérée de cotisations sociales et d'impôt sur le revenu, en réponse au mouvement des «gilets jaunes» .
Le 11 décembre 2018, Patrick Pouyanné annonçait sur Twitter le versement d'une
prime exceptionnelle de 1.500 euros au début de l'année suivante. Dans son
tweet, il prenait soin de préciser qu'elle bénéficierait à «tous» les
salariés du groupe pétrolier en France.
Le message n'a, à l'époque, pas échappé à la CGT de la
SASCA. L'entreprise est une filiale à 60% de Total, via Total marketing
service, mais ses salariés n'ont touché que 400 euros en application d'une
décision de leur direction. Le syndicat a alors décidé de porter l'affaire en
justice. Et il a obtenu gain de cause.
Avertissement
Le jugement rendu par le tribunal judiciaire de
Créteil le 6 novembre 2020, que «Les Echos» se sont procurés et sur lequel
Total n'a pas fait appel, condamne non pas l'employeur direct mais la maison
mère, la SA Total, à verser aux quelque 200 salariés de la SASCA un complément
de 1.100 euros aux 400 euros déjà versés, pour atteindre les 1.500 euros
promis.
Elle sonne comme un avertissement aux directions
d'entreprise sur la valeur des messages diffusés sur les réseaux sociaux.
Jusqu'à présent, l'attention s'était plutôt focalisée sur les conséquences pour un salarié d'un dénigrement de son
employeur .
Le tweet de Patrick Pouyanné a été considéré par les
juges de première instance, «à défaut de précisions supplémentaires», comme un
«élément insuffisant» pour caractériser l'engagement unilatéral du groupe au
profit des salariés de la SASCA. Mais les plaignants y ont ajouté - et cela a
été déterminant - un document portant le logo du pétrolier tricolore adressé à
certains de ses salariés, mais pas ceux de SASCA. Il précisait que «compte tenu
du contexte national, tous les salariés de Total et de ses filiales en France
bénéficieraient d'une prime exceptionnelle de 1.500 euros».
Ce jugement revêt une actualité particulière alors
que, cette année encore , le dispositif de
prime dite Macron a été réactivé avec un focus particulier sur les salariés
dits de «deuxième ligne».
Leïla de Comarmond