Les managers ont tout intérêt à relever au plus vite le défi de l’embolie électronique et de l’asphyxie professionnelle. Des experts du management et du travail, réunis à la Gazette des Communes le 8 octobre, proposent quelques pistes.
Y a-t-il jamais eu une frontière entre vie professionnelle et vie privée ? Les experts n’en sont pas tous convaincus. De fait aujourd’hui, le travail investit largement le temps personnel tant il est facile de consulter ses mails de partout et difficile de lâcher son smart phone. Le manager public n’échappe pas à la tendance. Il doit s’adapter et adapter son management, sous peine de burn-out, d’arrêts de travail pour lui ou pour les agents. « Se le cacher serait mettre ses collaborateurs en danger », prévient Florence Baco-Ambrass DGS de Crosnes, membre du bureau du SNDCGT.
En Ile-de-France, la question du temps est accentuée. Selon un constat dressé par Claude Soret-Virolle, vice-présidente de l’ADT-Inet et DGA du CIG Versailles, les territoriaux franciliens passent en moyenne 34 minutes dans les transports entre leur domicile et leur travail alors que la moyenne nationale n’est que de 19 minutes. 32% y passent même plus de 45 minutes. Cela a des répercussions. Les réunions et le travail sont souvent fixés en fonction de ces contraintes. Les agents titulaires cumulent 2,6 jours d’absence de plus que la moyenne nationale avec 26,1 jours d’absence en moyenne contre 24,3 jours. La tendance est la même pour les non titulaires.
Cadre du savoir-vivre - La gestion du temps est devenue cruciale. « Le temps du manager s’est considérablement modifié pour s’intensifier. Il est multitâche. Tout devient important, urgent, explique Florence Baco-Ambrass. Il y a besoin de formaliser le cadre du savoir-vivre » au travail. Mais pas n’importe comment pour Catherine Mieg, consultante RH : « Le rôle du manager est de libérer le temps des collaborateurs sans trop le codifier ni le contraindre pour laisser des marges de manœuvre » qui rendront le travail efficace.
Chartes et chantiers de réflexion - Certaines collectivités comme Saint-Michel-sur-Orge ont ainsi instauré une charte de la messagerie pour réguler l’instantanéité, éviter les réactions à chaud, mais aussi dégager du temps pour la réflexion, l’échange. D’autres, comme le conseil général de l’Essonne, ouvrent des chantiers sur la relations des agents au temps pour que le temps professionnel soit moins subi et l’articulation temps professionnel/ temps personnel meilleure. Un moyen d’améliorer aussi les conditions de travail pour son DGS Fabien Tastet, membre de l’AATF. Ce sont en effet les agents qui vont réfléchir dans ces ateliers et qui feront des propositions. « Il est difficile de codifier les usages avec le développement des outils nomades car nous répondons d’abord à une commande politique. Mais on peut redonner aux collègues une maîtrise de leur temps en décrétant par exemple que tel après-midi de la semaine est sans réunion. On peut aussi travailler sur la répartition du temps : temps pour soi, temps pour les autres. »
Remèdes - Quelques moyens pour y arriver, selon Florence Baco-Ambrass : redéfinir ses priorités, éliminer le superflu et éloigner les dévoreurs de temps en fermant par exemple sa porte, en s’abstenant de lire ses mails pendant un laps de temps, ne pas lire certains dossiers, découper son travail en séquences, connaître ses rythmes, repousser le perfectionnisme, etc. « La journée ne fera jamais que 24 heures », rappelle-t-elle.
A cela s’ajoutent d’autres remèdes encore trop peu développés dans les collectivités mais qui commencent à apparaître : télétravail, management plus collaboratif et moins vertical, management de la confiance. Pour avoir des collaborateurs heureux au travail, ne faudrait-il pas aussi revendiquer le droit à avoir « du temps personnel sur le temps de travail », pose Boris Petroff, toujours membre de l’ADT-Inet et retraité territorial heureux.
Source : http://www.lagazettedescommunes.com/