Loi numérique : une ouverture des données sous la pression des lobbies
Publié le
• Par
Sabine Blanc
• dans : France
Le texte porté par la
secrétaire d’Etat en charge du Numérique est examiné en séance en
première lecture à l’Assemblée nationale à partir de mardi 19 janvier.
La Gazette vous rend compte jour après jour de l'évolution des
discussions sur les articles qui concernent, de près ou de loin, les
collectivités. Et ça commence avec le Titre I, sur “la circulation des
données et du savoir”.
Après une longue gestation qui remonte à sa prédécesseuse Fleur
Pellerin, Axelle Lemaire défend enfin son projet de loi “Pour un
République numérique” dans l’hémicycle à partir de mardi 19 janvier,
jusqu’au 26 janvier, dans le cadre d’une procédure accélérée.
La durée des débats en commission des lois, saisie sur le fond – 670 amendements toutes commissions confondues, 17 heures d’échanges – laisse augurer d’un examen tout sauf tranquille, sur des enjeux allant de l’open data à la neutralité du Net en passant par le numérique dans les territoires, etc.
Administrations – dont les collectivités territoriales -, entreprises privées et publiques, associations citoyennes…, les lobbies ont fort à faire sur le texte de la secrétaire d’Etat en charge du Numérique. De nombreux amendements déjà examinés en commission des lois ont fait leur retour en séance.
La Gazette mettra à jour ce compte-rendu des débats jour après jour, sur les articles qui touchent les collectivités, de près ou de loin. La discussion a débuté avec le Titre I, sur “la circulation des données et du savoir”, et se poursuit mercredi 20 janvier.
A lire aussi Loi numérique : ce qu’il faut retenir du passage en commission des lois
Les principaux sujets de controverse concernent les acteurs concernés – avec une offensive pour exempter des obligations d’ouverture les services publics à caractère industriel et commercial (SPIC), les données qui entrent dans le champ de la loi, la gratuité et le format des données.
C’est aussi dans cette partie que se joue la bataille pour les biens communs informationnels et la liberté de panorama, après un revers en commission des lois.
Le gouvernement a fait adopter un amendement limitant cette gratuité à l’échange de données “entre les administrations de l’État et entre l’État et ses établissements publics administratifs”, ce qui comprend l’IGN par exemple, mais pas la CNAV, de droit privé, deux vendeurs importants de données (3 millions d’euros pour l’IGN, et 9,8 millions d’euros pour la CNAV).
L’amendement du rapporteur étendait le principe de gratuité aux collectivités territoriales et aux organismes de sécurité sociale”, justifiant que “l’impact de la gratuité a été mesuré” par le rapport Fouilleron pour ces entités.
Luc Belot a souligné en conclusion être “attaché à ce que l’on trouve des solutions pour les collectivités”. Le rapport Fouilleron notait que “les administrations publiques locales représentent 55 % des acheteurs publics de données à d’autres administrations, mais pour des montants faibles (elles ne pèsent que 8,6% du montant total des flux recensés).
Un amendement PS facilitant cet échange par l’introduction d’une disposition sur le format de communication, “si possible, sous forme électronique, dans un standard ouvert et aisément réutilisable, c’est-à-dire lisible par une machine”, n’a pas été adopté.
Enfin, un amendement PS, adopté, donne à la Cada la compétence pour arbitrer les litiges entre administrations.
Il a été adopté après un débat houleux sur la masse de rapports : soixante amendements à la loi numérique en demande un, a rappelé Luc Belot. Le credo de Jean-Jacques Urvoas « le Parlement peut tout faire, il n’a pas besoin de demander au gouvernement des rapports » a cédé cette fois-ci.
Le groupe PS a déposé un amendement dans un article additionnel instaurant un droit à l’Internet, le justifiant entre autres par le développement de l’e-administration. Il a été retiré malgré une défense vibrionnante de Marie-Anne Chapdelaine sur la nécessité de ne “laisser personne au bord de la route”.
La SNCF et la RATP étaient particulièrement concernées puisqu’elles affrontent la libéralisation du transport ferroviaire. Leur cas sera finalement réglé plus loin dans le texte, à l’article 4.
Dans un autre registre, un amendement “Anssi”, du sigle de l’agence nationale en charge de la sécurité des systèmes d’information a été adopté, défendu par Luc Belot : il exclut les données sur la sécurité des systèmes d’information des administrations des documents relevant de la loi Cada.
L’exemple le plus souvent donné est celui d’Admission Post-Bac (APB) le système controversé d’affection des collégiens en lycée.
Plusieurs amendements visaient à accroître la portée de ce droit, en informant les gens si une décision a été prise selon un algorithme (amendement 55), voire demandant une communication par défaut (amendement 631) ou invitant à préciser davantage l’information sur le fonctionnement de l’algorithme (amendement 733, 606…).
“Trop lourd”, selon Axelle Lemaire qui a argué que les principales décisions passant par un algorithme seraient connues des citoyens. L’article 2 a été adopté sans modification.
La durée des débats en commission des lois, saisie sur le fond – 670 amendements toutes commissions confondues, 17 heures d’échanges – laisse augurer d’un examen tout sauf tranquille, sur des enjeux allant de l’open data à la neutralité du Net en passant par le numérique dans les territoires, etc.
Administrations – dont les collectivités territoriales -, entreprises privées et publiques, associations citoyennes…, les lobbies ont fort à faire sur le texte de la secrétaire d’Etat en charge du Numérique. De nombreux amendements déjà examinés en commission des lois ont fait leur retour en séance.
La Gazette mettra à jour ce compte-rendu des débats jour après jour, sur les articles qui touchent les collectivités, de près ou de loin. La discussion a débuté avec le Titre I, sur “la circulation des données et du savoir”, et se poursuit mercredi 20 janvier.
A lire aussi Loi numérique : ce qu’il faut retenir du passage en commission des lois
TITRE I : La circulation des données et du savoir
Le titre Ier constitue un morceau important pour les collectivités territoriales puisqu’il traite, entre autres, de l’ouverture des données. Il s’inscrit dans un contexte de circulation croissante des données, entre Etat, collectivités, public et privé, avec de forts enjeux de rapport de pouvoir, d’efficacité de l’action publique et de transparence.Les principaux sujets de controverse concernent les acteurs concernés – avec une offensive pour exempter des obligations d’ouverture les services publics à caractère industriel et commercial (SPIC), les données qui entrent dans le champ de la loi, la gratuité et le format des données.
C’est aussi dans cette partie que se joue la bataille pour les biens communs informationnels et la liberté de panorama, après un revers en commission des lois.
La gratuité entre administrations recule
L’article premier confère aux administrations le droit de saisir la Cada, et, suite au passage en commission des lois, instaure la gratuité de l’échange de données entre administrations, disposition votée avec le soutien du gouvernement, en application des recommandations du rapport Fouilleron.Le gouvernement a fait adopter un amendement limitant cette gratuité à l’échange de données “entre les administrations de l’État et entre l’État et ses établissements publics administratifs”, ce qui comprend l’IGN par exemple, mais pas la CNAV, de droit privé, deux vendeurs importants de données (3 millions d’euros pour l’IGN, et 9,8 millions d’euros pour la CNAV).
L’amendement du rapporteur étendait le principe de gratuité aux collectivités territoriales et aux organismes de sécurité sociale”, justifiant que “l’impact de la gratuité a été mesuré” par le rapport Fouilleron pour ces entités.
Luc Belot a souligné en conclusion être “attaché à ce que l’on trouve des solutions pour les collectivités”. Le rapport Fouilleron notait que “les administrations publiques locales représentent 55 % des acheteurs publics de données à d’autres administrations, mais pour des montants faibles (elles ne pèsent que 8,6% du montant total des flux recensés).
Un amendement PS facilitant cet échange par l’introduction d’une disposition sur le format de communication, “si possible, sous forme électronique, dans un standard ouvert et aisément réutilisable, c’est-à-dire lisible par une machine”, n’a pas été adopté.
Enfin, un amendement PS, adopté, donne à la Cada la compétence pour arbitrer les litiges entre administrations.
Pas de droit à l’Internet
La consultation publique en ligne préalable au texte d’Axelle Lemaire a fait des émules. Faute d’imposer une telle procédure pour tous les textes de loi en préparation, pour cause d’irrecevabilité financière, un amendement (LR) demande au gouvernement de remettre un rapport à ce sujet au Parlement au plus tard le 30 juin 2016.Il a été adopté après un débat houleux sur la masse de rapports : soixante amendements à la loi numérique en demande un, a rappelé Luc Belot. Le credo de Jean-Jacques Urvoas « le Parlement peut tout faire, il n’a pas besoin de demander au gouvernement des rapports » a cédé cette fois-ci.
Le groupe PS a déposé un amendement dans un article additionnel instaurant un droit à l’Internet, le justifiant entre autres par le développement de l’e-administration. Il a été retiré malgré une défense vibrionnante de Marie-Anne Chapdelaine sur la nécessité de ne “laisser personne au bord de la route”.
Le code source est bien un document relevant de la Cada
L’article additionnel 1er bis a sécurisé une jurisprudence fragile : le code source d’un logiciel est bien un document communicable au sens de la loi Cada. Pas du goût de Philippe Duron (PS) qui arguait que cela pouvait nuire aux services publics à caractère industriel et commercial (SPIC), intégrés par la loi Lemaire dans le régime général de la loi Cada.La SNCF et la RATP étaient particulièrement concernées puisqu’elles affrontent la libéralisation du transport ferroviaire. Leur cas sera finalement réglé plus loin dans le texte, à l’article 4.
Dans un autre registre, un amendement “Anssi”, du sigle de l’agence nationale en charge de la sécurité des systèmes d’information a été adopté, défendu par Luc Belot : il exclut les données sur la sécurité des systèmes d’information des administrations des documents relevant de la loi Cada.
Nouvelle modalité de communication d’un document
L’article 1er ter a rajouté une nouvelle modalité de communication d’un document : sa publication en ligne “dans un format ouvert et aisément réutilisable”. Le format n’a pas été assez poussé plus loin, laissant la porte ouverte au pdf, incompatible avec l’open data. Il ne sera pas “lisible par une machine et pouvant être exploité par un système de traitement automatisé”, comme souhaitait cet amendement PS mais juste “aisément réutilisable”, sur proposition des Verts. L’exclusion de la notion de traitement automatisée est la ligne générale adoptée par le rapporteur sur toute cette partie open data.Ouverture des algorithmes… encore faut-il être au courant
Dans un contexte de rôle croissant des algorithmes, l’article 2 ouvre le droit pour un individu de prendre connaissance du fonctionnement d’un algorithme qui a été utilisé pour prendre une décision l’affectant.L’exemple le plus souvent donné est celui d’Admission Post-Bac (APB) le système controversé d’affection des collégiens en lycée.
Lire aussi : Big data et action publique algorithmique sont-ils solubles dans les valeurs de services publics
Plusieurs amendements visaient à accroître la portée de ce droit, en informant les gens si une décision a été prise selon un algorithme (amendement 55), voire demandant une communication par défaut (amendement 631) ou invitant à préciser davantage l’information sur le fonctionnement de l’algorithme (amendement 733, 606…).
“Trop lourd”, selon Axelle Lemaire qui a argué que les principales décisions passant par un algorithme seraient connues des citoyens. L’article 2 a été adopté sans modification.
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