jeudi 19 janvier 2012

La protection sociale est un contrat de solidarité passé entre tous les citoyens d’un pays.Depuis longtemps, la CFDT revendique d’en repenser le financement. En 2010, elle a proposé un transfert des cotisations sociales finançant la couverture maladie et les politiques familiales (des risques universels) vers une contribution plus large que les seuls revenus du travail.

Dans une tribune à Libération, la secrétaire nationale Véronique Descacq réaffirme la nécessité de repenser le financement de la protection sociale en dehors de toute considération électoraliste.
La protection sociale est un contrat de solidarité passé entre tous les citoyens d’un pays. Périodiquement, ceux-ci doivent réexaminer les termes de ce pacte pour l’adapter à l’évolution de leurs modes de vie. Depuis longtemps, la CFDT revendique d’en repenser le financement. En 2010, elle a proposé un transfert des cotisations sociales finançant la couverture maladie et les politiques familiales (des risques universels) vers une contribution plus large que les seuls revenus du travail.
Réentendre la vieille antienne du coût du travail comme élément central du manque de compétitivité des entreprises françaises n’est pas sérieux. Nombre de rapports et d’analyses, y compris issus des travaux des syndicats et du patronat, en conviennent. Le défaut de compétitivité de la France est ailleurs : innovation, formation et qualification des salariés, organisation du tissu industriel, accès au financement… Autant de pistes plus sûres d’amélioration de la situation de nos entreprises au regard de leurs concurrents étrangers. On peut même affirmer que si le coût de travail avait constitué un avantage compétitif significatif, la France n’aurait pas manqué de tailler des croupières à l’industrie allemande ces dernières années, puisque, de l’avis des experts les plus libéraux, le coût du travail français vient tout juste de rattraper celui de l’Allemagne !
Pire, la foi du charbonnier dans la compétitivité-coût a déjà fait des dégâts en France : les politiques d’exonération de charges sur les bas salaires, loin de produire de la compétitivité, ont amené des trappes à bas salaires et à basse qualification qui ont plombé la capacité des entreprises à innover, former, et reconvertir leurs salariés vers des activités de haut de gamme ! Et donc, comme ça ne marche pas, on continue…
Faut-il pour autant se priver de réfléchir à des moyens plus performants et équitables de financer la protection sociale ? Ce n’est pas l’avis de la CFDT. Sans en partager tous les constats ni toutes les propositions, nous saluons la publication du rapport du député UMP Yves Bur qui a le mérite de poser quelques bonnes questions, en particulier sur l’équité d’un certain nombre de mesures en matière de politique familiale.
Mais repenser le financement de la protection sociale ne peut consister en un tour de passe-passe électoralo-budgétaire. C’est un projet qui touche au pacte social, à son financement comme à son contenu. Il ne peut se construire que dans le temps et dans un consensus assez large. De ce point vu, l’idée de créer un Haut Conseil au financement de la protection sociale peut s’entendre, à condition de lui laisser le temps de travailler et de ne pas tenter de l’instrumentaliser dans une campagne électorale.
Quant à la vieille lune de la TVA dite «sociale», est-il besoin de rappeler les innombrables défauts qui ont fait que, maintes fois évoquée, la piste a été autant de fois repoussée ? Injuste, néfaste pour la consommation donc pour la croissance, elle ne pénalise pas tant les importations que les consommateurs français, et nul ne peut certifier que les effets bénéfiques attendus se produiraient. Croire que les entreprises baisseraient les prix dans les mêmes proportions que la baisse des cotisations, ou augmenteraient les salaires voire l’embauche, revient à croire à la magie de l’autorégulation dont on sait où elle nous a menés.
Ce coup de bluff lancé à la veille d’une échéance présidentielle a un autre défaut majeur : il foule au pied l’objectif d’harmonisation fiscale européenne pourtant si nécessaire, les mois passés nous le rappellent. Le taux normal de la TVA allemande est déjà légèrement inférieur au nôtre. Le dernier plan Fillon vient d’amorcer un rapprochement du taux réduit à 7%. Tout cela risque d’être mis à mal pour une opération de tactique électorale.
Si l’agenda politique laisse du temps pour une réforme ambitieuse, la CFDT s’inscrira dans le débat du financement de la protection sociale et de son amélioration avec des propositions. Pour nous, la politique familiale, la couverture maladie et la dépendance concernent tous les citoyens et pas seulement les salariés. L’impôt peut donc être sollicité au travers d’une ressource affectée : la CSG. Le transfert des cotisations patronales vers la CSG doit se faire dans le cadre d’une négociation globale qui garantisse le pouvoir d’achat des salariés et prévoie des contreparties en termes de conciliation vie privée - vie professionnelle, de santé au travail et de prise en compte de la pénibilité.
 

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