dimanche 22 janvier 2012

CONTRACTUELS DE LA FONCTION PUBLIQUE :après le protocole d’accord signé par 6 organisations syndicales (CFDT, CFTC, CGC, CGT, FO, Unsa) le 31 mars 2011, un projet de loi en procédure accélérée au Sénat, les 25 et 26 janvier.



Le projet de loi d’accès à l’emploi titulaire et d’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique sera examiné en séance publique au Sénat mercredi 25 et jeudi 26 janvier 2012 et devrait comprendre certaines dispositions de la proposition de loi relative aux centres de gestion. La rapporteure du texte au Sénat, Catherine Tasca (PS), détaille pour La Gazette les modifications apportées en commission ainsi que celles envisagées par le gouvernement.
Deux ans, jour pour jour, après que le chef de l’Etat a déclaré à l’émission « Paroles de français » sur TF1, qu’il était  » prêt à envisager la titularisation progressive des contractuels pour ne pas les laisser en situation de précarité « , le projet de loi « relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique » sera examiné, en procédure accélérée au Sénat, les 25 et 26 janvier.
Le texte reprend le protocole d’accord signé par 6 organisations syndicales (CFDT, CFTC, CGC, CGT, FO, Unsa) le 31 mars 2011.
Amendé en commission des lois [lire l’interview de Catherine Tasca ci-dessous], il devrait par ailleurs inclure une partie de la proposition de loi Portelli sur les centres de gestion, retirée de l’ordre du jour avant son examen le 19 janvier, pour cause d’incompréhension entre ses auteurs – 7 sénateurs UMP et MoDem – et les membres socialistes de la commission des lois de la Haute-Assemblée.
« Le texte initial sur les centres de gestion prend la forme d’amendements au projet de loi contractuels examiné le 25 janvier. Le PS a fait amende honorable. Après négociation avec les centres de gestion et les élus de tous bords, nous maintenons le seuil maximal de 350 agents pour l’affiliation obligatoire. Mais l’important, c’était de définir un bloc de compétences, pour les collectivités non affiliées, avec un financement. Il se fera par voie conventionnelle, à hauteur de 0,2 % », précise l’auteur de la proposition, le sénateur (UMP) Hugues Portelli, qui a dû convaincre ses collègues de la commission des lois, élus locaux pour la plupart mais peu au fait du travail des centres de gestion et qui craignaient d’empiéter sur les compétences des intercommunalités ou du centre national de la FPT.
Egalité femmes-hommes, handicap et encadrement supérieur - Des dispositions sur l’égalité professionnelle femmes-hommes dans la fonction publique, le handicap et l’encadrement supérieur pourraient être rajoutées par le gouvernement lors de l’examen du projet à l’Assemblée nationale.
L’opposition parlementaire et les organisations syndicales préféreraient une loi à part entière sur les discriminations entre hommes et femmes dans la fonction publique.

Catherine Tasca : « Nous soutenons ce projet de loi »

Catherine Tasca, sénatrice (PS) et vice-présidente de la commission des lois, est la rapporteure du projet de loi relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

Vous avez fait adopter ce projet du gouvernement par la commission des lois. Vous le défendrez devant vos collègues sénateurs les 25 et 26 janvier. Quel est votre regard sur ce texte ?

Ce projet de loi transcrit un accord signé avec les organisations syndicales. Nous estimons qu’il faut le soutenir, car il est nécessaire, compte tenu de la situation des contractuels dans les trois fonctions publiques. Les représentants des organisations syndicales, que j’ai rencontrés, étaient inquiets de voir ce projet retardé.

Vous avez, en commission des lois, examiné 75 amendements. D’autres sont en cours de dépôt. Qu’apportent-ils au texte initial ?

Les amendements adoptés par la commission des lois ne bouleversent par l’architecture du texte. Nous avons surtout travaillé sur sa lisibilité et sa clarification et harmonisé les conditions de durée des contrats. Parmi les amendements qui intéressent la FPT, nous avons porté de 3 à 4 mois le délai entre deux contrats pris en compte dans les 6 ans donnant accès à un CDI, afin que les contractuels qui ont un parcours chaotique, notamment des enseignants de l’enseignement supérieur, ne perdent pas leur année.
Nous avons également confirmé la portabilité des contrats à durée indéterminée par fonction publique et par employeur.
Sur les fonctions hiérarchiques, il y a eu débat. Certains voulaient ouvrir davantage cette possibilité. D’autres y étaient opposés.
Pour les candidats à la titularisation, nous proposons en outre d’étendre la validité, actuellement de 3 ans, des listes d’aptitude. Au départ je n’étais pas convaincue que ce soit l’intérêt des candidats. Des collègues suggéraient 5 ans. Nous avons tranché à 4 ans.
D’autres mesures intéressant les agents territoriaux ont été ajoutées : l’article 63 prévoit le remboursement des frais de maladie des agents victimes d’un accident de service ou d’une maladie professionnelle au-delà de la mise à la retraite. Cela revient à aligner la territoriale sur les autres fonctions publiques.

Le gouvernement souhaite introduire des dispositions sur l’égalité professionnelle femmes-hommes et les discriminations. Qu’en pensez-vous ?

Le traitement des discriminations, c’est la réserve essentielle que l’on peut faire sur ce projet de loi. Le texte du gouvernement n’a rien retenu du rapport de Madame Guégot. Il est indigent sur la partie égalité professionnelle et sur les situations de handicap dans la fonction publique. La commission des lois a estimé que ces sujets sérieux ne pouvaient pas être traités par des dispositions pointillistes et qu’ils devaient faire l’objet d’une initiative ultérieure.
Nous nous en sommes donc tenus au texte signé avec les organisations syndicales. Avec 66 articles, il est assez lourd. Nous avons déjà examiné 78 amendements. Si l’on veut tenir le calendrier, on ne peut pas se permettre de trop en déposer.
Tout le monde est conscient qu’il faut engager un certain nombre de solutions très concrètes pour répondre à des injustices et à des situations de précarité qui ne sont pas acceptables.

Une fois ce texte voté, son application, dans la territoriale, dépendra des élus employeurs. N’est-ce pas une limite ?

L’application de ce texte, son efficience, dépendra de sa mise en œuvre concrète dans chaque fonction publique et du nombre d’emplois qui pourraient être ouverts à la titularisation. Les collectivités vont devoir réaliser un plan pluriannuel et seront liées par lui. Mais dans le contexte de la RGPP, nous n’avons pas toutes les assurances… Ce texte reste une bonne orientation, mais son application dépendra des moyens disponibles et de ce qui se passera dans les prochains mois.

On ne vous connaissait pas sur le terrain de la fonction publique…

C’est effectivement neuf pour moi. Je suis contente d’être en charge de ce texte car j’ai une grande attention au service public qui subit beaucoup d’attaques. Je vois un très grand intérêt à la limitation des excès du recours aux contractuels et aux réponses concrètes à ces agents. Cela traduit mon attachement au service public en général. Mais ce texte ne me fait pas oublier que depuis 5 ans, il y a une politique systématique de dénigrement des fonctionnaires et de diminution drastique des effectifs dans la fonction publique. Cette politique pèse très lourd aujourd’hui.

Discussion générale au Sénat le 25 janvier 2012. Un projet de loi qui a pour but d'accorder un CDI aux agents en CDD, dès lors qu'ils auront exercé pendant une durée minimale de 6 ans sur les 8 dernières années (lire à ce sujet notre article "Contractuels : une nouvelle loi anti-précarité ?"). Cette mesure pourrait concerner 100 000 personnes.
M. François SAUVADET, ministre de la fonction publique, a présenté le projet de loi en le présentant comme la « prolongation d'un accord syndical.. . » Evoquant une précarité« souvent méconnue, inacceptable, car elle prend racine dans nos collectivités, avec plusieurs milliers d'agents en CDD sur des emplois permanents...une situation qui n'est pas nouvelle puisque depuis 1946, il y a eu 16 plans de titularisations, le dernier remontant à 2001 ». L'objectif est donc de mettre un terme durable à cette situation.... ajoutant ce qui en fera bondir plus d'un : « tous les agents contractuels de la Fonction publique ne sont pas confrontés à des situations de précarité et nous devrons, demain comme hier, avoir la possibilité de recourir à des agents contractuels pour répondre à des besoins temporaires, des surcharges de travail ponctuelles, des vacances d'emplois, des remplacements d'agents absents ou encore à des besoins spécifiques. »
Un engagement a été pris en janvier 2010 par le gouvernement continue François Sauvadet : « Nous avons demandé des efforts aux fonctionnaires, des efforts réels, ils ont eu à faire face à des mutations profondes. Parce que la société change, évolue. Et nous nous devons de leur adresser un signal fort de justice et d'équité.»
Et François Sauvadet de citer l'égal accès des citoyens aux emplois publics qui date de 1789... par le 6ème article de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen, celui de l'égal accès de tous les citoyens aux différents emplois publics, et ce sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents, le principe étant que les emplois permanents soient occupés par des fonctionnaires afin de garantir la neutralité du service public.
« Ce principe n'a pas été d'application globale : le législateur a ainsi, dès 1946, ouvert aux employeurs publics la possibilité d'y déroger pour recourir à des agents contractuels n'ayant donc pas le statut de fonctionnaires, mais les cas sont alors limités, des exceptions. On constate que la place des contractuels s'est accrue malgré 16 plans de titularisation. Aujourd'hui on compte 900 000 non titulaires, 17% de la fonction publique dont 100 000 personnes sur des CDD renouvelés ». Des négociations ont eu lieu bien sur avec le gouvernement « ce n'est pas un exercice facile », dixit le ministre « cet accord est le 4ème depuis 2007 entre le gouvernement et les syndicats ».
Voies d'accès spécifiques
Conclusion : l'administration sera tenue d'accorder un CDI aux agents en CDD, dès lors qu'ils auront exercé pendant une durée minimale de 6 ans sur les 8 dernières années. Cette mesure pourrait concerner 100 000 personnes.... « Par ailleurs, nous allons ouvrir aux agents contractuels des voies d'accès spécifiques à l'emploi titulaire pendant une durée de quatre ans à compter de la publication de la loi, ce qui permettra de valoriser les acquis de l'expérience professionnelle. Ces voies spécifiques pourront être ouvertes aux contractuels en CDI et aux agents en CDD ayant eu une durée de service totale de quatre ans sur une période de six années consécutives sur un emploi répondant à un besoin permanent. Pour les collectivités territoriales, il faut avoir des situations de remplacement, lors de vacances de poste, et le formaliser avec des durées de contrat harmonisées. »
Le gouvernement souhaite aussi améliorer le droit des contractuels avec l'accès au dispositif à la formation professionnelle, un entretien professionnel annuel, et des contractuels qui bénéficient d'un droit de représentation au sein des instances de représentation.
D'autres points au sein du projet de loi
Tout d'abord la question de la lutte contre les discriminations : que ce soit l'origine ethnique, le handicap ou l'égalité homme femmes, le texte compléterait ainsi la loi du 13 juillet 1983.
La question de la mobilité et la loi du 3 août 2009 : « Chaque agent doit construire son parcours professionnel et sa carrière conformément à ses attentes. Cette modification a pour but de faciliter la mobilité entre les fonctions publiques également, éviter le tunnel ».
Des amendements gouvernementaux
- la nouvelle procédure d'affectation des élèves de l'ENA
- les droits et moyens syndicaux « Nous avons travaillé sur la sécurisation des droits et moyens pour avoir une transparence sur l'utilisation des moyens publics, à moyens et périmètres constants »
- la réforme de l'encadrement supérieur dans la FPT .Cela fait deux ans que le conseil sup avait formulé une proposition de revalorisation dans un rapport. Sur ce dossier, un objectif double selon le ministre : « la cohérence de carrières et emplois dans la FPT, la réforme de l'encadrement comme dans l'Etat, encours pour la FPH »
L'attachement au statut
Intervention de l'écologiste Corinne Bouchoux pour évoquer, tout en saluant les avancées du projet de loi, le risque qui pèse toujours de remise en cause du statut « si malmené avec la nouvelle gestion des ressources humaines (...) nous aimerions dire notre attachement au statut pour l'avenir pas favorable à la casse de la fonction publique avec la politique aveugle de la RGPP pour recruter des précaires qui bouchent les trous. Le texte ne doit pas masquer cette question. La posture dogmatique sur la RGPP doit être revue. Cette loi ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt, il ne pas oublier ce qui se passe actuellement. Nous aimerions notamment une réflexion plus poussée sur deux questions : l'égalité hommes-femmes, et l'emploi des handicapés, des situations ubuesques avec des normes inaplicables comme chez les pompiers ... Ce texte ne va pas assez loin. »
« La précarité gagne chaque jour du terrain »
M. Christian FAVIER(CRC) a été plus loin « la fonction publique va mal, victimes d'une politique qui tend à les stigmatiser, on leur impose performance, rentabilité financière, et les mêmes méthodes de management que le privé avec les effets désastreux sur la santé...la précarité gagne chaque jour du terrain...La CDIsation est une avancée dans le démantèlement du statut, et quid de ceux à temps partiel, emplois souvent féminins ? Le temps partiel n'est pas une fatalité. » Un projet de loi qui ne rompt pas avec une certaine conception de la fonction publique selon le groupe CRC.
« Les fonctionnaires ne sont pas qu'un coût ! »
« Monsieur le ministre, on ne peut pas dire que vous avez bien traité les agents publics durant le mandat présidentiel » ajoute Christian Bourquin, RDSE. Cet ancien ingénieur territorial met le doigt sur l'un des amendements du gouvernement concernant l'encadrement supérieur de la FPT, évoquant aussi le 1% formation et « la réduction de la formation des agents »...« Il y a eu beaucoup de défiance envers les fonctionnaires, ils ne sont pas qu'un coût ! »...Le CNFPT vent debout devant la baisse de 10% de ses recettes, « qui réduit donc son offre de formation, alors qu'on lui demande de l'augmenter ».
M. Hugues PORTELLI(UMP) a demandé des spécificités pour les communes de moins de 5000 habitants. Michel Delebarre (PS) a quant à lui relevé que la partie du texte concernant l'égalité homme-femme était légère « se résumant à des rapports à faire »...même si le texte représentait une avancée certaine. Virginie Klès (App.SOC.) a conclu les échanges en saluant l'esprit de concertation avec les syndicats.

Ont participé au débat au sénat le 25 janvier 2012 : M. François SAUVADET ministre de la fonction publique Mme Catherine TASCA rapporteur de la commission des lois 1.Mme Corinne BOUCHOUX(ECOLO)12' 2.M. Jean-Paul AMOUDRY(UCR)15' 3.M. Christian FAVIER(CRC)10' 4.M. Christian BOURQUIN(RDSE)6' 5.M. Hugues PORTELLI(UMP)10' 6.M. Michel DELEBARRE(SOC)12' 7.Mme Virginie KLÈS(App. SOC)10'

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