mardi 24 janvier 2012

FPT: Vrai contractuel , faux vacataire !



Bien que rémunéré à la vacation, l’agent occupait un emploi permanent et relevait donc du décret du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires territoriaux.
Recrutée par contrat verbal pour faire face à des besoins occasionnels de remplacement, l’intéressée a assuré pendant plus de trois ans, des activités d’animation et de garderie dans les centres de loisirs et les cantines des écoles maternelles d’une commune.
Or, cet emploi constituait un emploi civil permanent de la commune et répondait à ce titre aux caractéristiques définies à l’article 3 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires.
En l’occurrence, la rémunération de l’agent à la vacation multipliée par un taux horaire et la variabilité du nombre d’heures travaillées d’un mois sur l’autre en fonction des remplacements effectués, ne l’excluaient pas par eux-mêmes des dispositions du décret du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale.
N’ayant donc pas été engagée pour un acte déterminé, l’intéressée relevait de ce décret dont les dispositions s’appliquaient à elle. En outre, en maintenant notamment cet agent pendant près de trois ans sous un statut de vacataire, sans la faire bénéficier des droits et garanties normalement ouverts aux agents non titulaires des collectivités locales, la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

Références
ur Administrative d'Appel de Versailles 

N° 09VE01447    
Inédit au recueil Lebon 
6ème chambre
M. HAÏM, président
M. Jean-Pierre DEMOUVEAUX, rapporteur
M. SOYEZ, rapporteur public
LEBRUN ; CHAMPENOIS ; LEBRUN, avocat


lecture du lundi 14 novembre 2011
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, sous le n° 09VE01447, présentée pour Mme Milouda A, demeurant ..., par Me Lebrun, avocat ; Mme A demande à la Cour : 

1°) d'annuler le jugement n° 0606211 du 3 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a limité à 2 626 euros la somme que la commune de Colombes a été condamnée à lui verser au titre des indemnités auxquelles elle a droit du fait de la cessation de ses fonctions ;

2°) de condamner la commune de Colombes à lui payer les sommes de 3 330,78 euros au titre du traitement auquel elle avait droit pendant la durée de son congé de maladie, de 458,52 euros au titre de son indemnité de résidence, de 405,30 euros au titre de l'indemnité pour l'exercice d'une mission territoriale, de 489,16 euros au titre du complément indemnitaire, et de 40 000 euros au titre du préjudice subi du fait des fautes commises par la commune ; 

3°) de mettre à la charge de la commune de Colombes la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'ayant repris ses fonctions durant les mois de septembre à décembre 2001, elle aurait dû bénéficier après le 6 décembre 2001 des dispositions de l'article 9 du décret du 15 février 1988 ; qu'elle était fondée, en vertu de ces dispositions, à percevoir la moyenne des trois dernières rémunérations brutes perçues de janvier à mars 2001 ainsi que, du fait des fonctions qu'elle occupait, l'indemnité de résidence, l'indemnité pour l'exercice d'une mission territoriale et le complément indemnitaire ; que les premiers juges ont fait une insuffisante évaluation du préjudice qu'elle a subi du fait du comportement fautif de la commune ;

..........................................................................................................

II. Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, sous le n° 09VE01484, présentée pour la COMMUNE DE COLOMBES, par Me Champenois, avocat ; la COMMUNE DE COLOMBES demande à la Cour : 

1°) d'annuler le jugement n° 0606211 du 3 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser à Mme B la somme de 2 629 euros au titre des indemnités auxquelles elle a droit du fait de la cessation de ses fonctions ; elle soutient que le jugement contesté a estimé à tort que Mme B relevait du statut des agents non titulaires alors qu'elle avait en réalité la qualité de vacataire ; qu'elle n'apporte pas la preuve de la faute et des préjudices invoqués ; 

2°) de rejeter la demande présentée pour Mme B devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3°) de mettre à la charge de Mme B la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2011 :
- le rapport de M. Demouveaux, président assesseur,
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,
- et les observations de Me Lebrun pour Mme A et Me Carlini pour la COMMUNE DE COLOMBES ;


Considérant que les requêtes n° 09VE01447 et 09VE01484 tendent à l'annulation ou à la réformation d'un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;



Sur l'application du décret susvisé du 15 février 1988 :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : Les collectivités (...) ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité ou d'un congé parental, ou de l'accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. Ces collectivités (...) peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel. (...). ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 15 février 1988 : Les dispositions du présent décret s'appliquent aux agents non titulaires de droit public des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale qui sont recrutés ou employés dans les conditions définies à l'article 3, à l'article 47 ou à l'article 110 de la loi du 26 janvier 1984 précitée ou qui sont maintenus en fonctions en application du deuxième ou du troisième alinéa de l'article 136, de l'article 139 ou de l'article 139 bis de la même loi. (...) Les dispositions du présent décret ne sont toutefois pas applicables aux agents engagés pour un acte déterminé. ;

Considérant que Mme A a été recrutée par la COMMUNE DE COLOMBES, par contrat verbal, pour faire face à des besoins occasionnels de remplacement ; qu'elle a assuré à ce titre, à partir de novembre 1998 jusqu'en janvier 2002, des activités d'animation et de garderie dans les centres de loisirs et les cantines des écoles maternelles de la commune ; que cet emploi constituait un emploi civil permanent de la commune et répondait à ce titre aux caractéristiques définies à l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 ; que dès lors les circonstances que l'intéressée ait été rémunérée à la vacation multipliée par un taux horaire et que son nombre d'heures travaillées était variable d'un mois sur l'autre en fonction des remplacements effectués n'étaient pas par elles-mêmes de nature à l'exclure du champ d'application des dispositions du décret susvisé du 15 février 1988 ; qu'il suit de là que l'intéressée n'ayant pas été engagée pour un acte déterminé, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que les dispositions de ce décret s'appliquaient à elle ;

Sur l'indemnité due en cas d'accident professionnel :

Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret susvisé en date du 15 février 1988, dans sa rédaction applicable à l'espèce : L'agent non titulaire en activité bénéficie en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle d'un congé pendant toute la période d'incapacité de travail jusqu'à la guérison complète, la consolidation de la blessure ou le décès. L'intéressé a droit au versement par l'autorité territoriale de son plein traitement dans les limites suivantes : 1. Pendant un mois dès son entrée en fonctions ; / 2. Pendant deux mois après un an de services ; / 3. Pendant trois mois après quatre ans de services. ;

Considérant que Mme A demande le versement de l'indemnité prévue par les dispositions précitées ; qu'il est constant qu'elle a perçu cette indemnité entre avril et juin 2001, alors même qu'elle ne remplissait pas les conditions de durée de service pour y avoir droit ; que, dès lors, et sans qu'importe la circonstance qu'elle a repris son service en septembre 2001 pour l'interrompre définitivement le 6 décembre 2001, ses conclusions sur ce point doivent être rejetées ;
Sur les indemnités dues au titre de l'année 2001 : 

Considérant qu'en application de l'article 136 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, les agents non titulaires recrutés pour exercer les fonctions mentionnées aux articles 3 et 25 de la même loi sont soumis notamment à l'article 20 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 ; que ce dernier article dispose que les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. S'y ajoutent les prestations familiales obligatoires. Le montant du traitement est fixé en fonction du grade de l'agent et de l'échelon auquel il est parvenu, ou de l'emploi auquel il a été nommé ; qu'aux termes de l'article 9 du décret susvisé du 24 octobre 1985 : L'indemnité de résidence est allouée aux agents mentionnés à l'article premier du présent décret titulaire d'un grade ou occupant un emploi auquel est directement attaché un indice de la fonction publique ; que l'article premier de ce décret dispose que : Les dispositions du présent décret sont applicables aux magistrats, militaires, fonctionnaires et agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, à l'exclusion du personnel rétribué sur la base des salaires pratiqués dans le commerce et l'industrie. ;

Considérant qu'en l'espèce, Mme A entend soutenir que la rémunération annuelle perçue par elle en 2001 a été insuffisante en ce qu'elle aurait été calculée sur la base d'un montant de rémunération ne comprenant pas l'indemnité de résidence, l'indemnité pour exercice d'une mission territoriale prévue par la délibération n° 5 du conseil municipal de la COMMUNE DE COLOMBES en date du 20 décembre 2000 et le complément indemnitaire qui lui est lié ; 

Considérant, en premier lieu, que Mme A évalue à 458,52 euros la somme qui lui était due au titre de l'indemnité de résidence ; que s'il résulte des dispositions précitées que cette indemnité ne peut être versée au personnel rétribué sur la base des salaires pratiqués dans le commerce et l'industrie, il ressort des pièces du dossier que la rémunération de Mme A était indexée sur la valeur du point d'indice applicable aux agents de la fonction publique territoriale ; qu'elle entrait, par conséquent, dans le champ d'application de l'article 1er du décret précité du 24 octobre 1985 ; que si, par ailleurs, elle ne précise pas le mode de calcul de la somme qu'elle réclame au titre de ces dispositions, la COMMUNE DE COLOMBES n'établit ni même ne soutient que celle-ci excéderait le montant annuel de l'indemnité de résidence normalement perçu par les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles titulaires de 2e classe que l'intéressée était conduite à remplacer dans le cadre de ses fonctions ; qu'ainsi Mme A est fondée à demander que ladite somme lui soit versée ; 

Considérant, en second lieu, que Mme A demande le versement de l'indemnité pour exercice d'une mission territoriale et le complément indemnitaire qui lui serait lié ; qu'en vertu de l'article I de la délibération n° 5 du conseil municipal de la COMMUNE DE COLOMBES en date du 20 décembre 2000, ont droit au versement de cette indemnité les agents non titulaires qui, telle Mme A, ont été recrutés au titre de l'article 3 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 pour faire face temporairement à la vacance d'un emploi ne pouvant être pourvu dans les conditions de la loi ; qu'ainsi Mme A, qui entre dans le champ d'application des dispositions qu'elle invoque, est fondée à demander à la commune, au titre de ses fonctions d'agent d'animation dans les centres de loisirs, le paiement d'une somme correspondant au versement de ladite indemnité pendant un an, soit 405,30 euros, ainsi que d'une somme de 489,16 euros au titre du complément indemnitaire ; 


Sur l'indemnité pour faute :

Considérant qu'en maintenant Mme A pendant près de trois ans sous un statut de vacataire, sans la faire bénéficier des droits et garanties normalement ouverts aux agents non titulaires des collectivités locales, et en la laissant ensuite dans l'incertitude sur les suites qui seraient données à son recours administratif, celui-ci présenté le 6 octobre 2003 n'ayant reçu une réponse ferme que le 7 février 2006, la COMMUNE DE COLOMBES a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'en accordant à Mme A la somme de 2 000 euros, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte évaluation du préjudice moral que ces agissements fautifs ont causé à Mme A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme que le Tribunal administratif de Versailles a condamné la COMMUNE DE COLOMBES à payer à Mme A doit être portée à 3 981,98 euros ; qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de la COMMUNE DE COLOMBES la somme de 2 000 euros ;



DECIDE :
Article 1er : La somme que, par le jugement susvisé en date du 3 mars 2009, le Tribunal administratif de Versailles a condamné la COMMUNE DE COLOMBES à payer à Mme A est portée à 3 981,98 euros. 

Article 2 : Le surplus des conclusions d'appel de Mme A et l'appel incident de la COMMUNE DE COLOMBES sont rejetés.

Article 3 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Versailles en date du 3 mars 2009 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. 

Article 4 : La COMMUNE DE COLOMBES versera à Mme A la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 

Article 5 : Les conclusions de la COMMUNE DE COLOMBES tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 09VE01447-09VE01484 2



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