vendredi 26 août 2011

Oiseaux marins, tortues, poissons (pour nous, attention de ne pas boire "la tasse") ingèrent les débris de plastique qui flottent à la surface des eaux (...que nous retrouvons ensuite dans nos assiettes) .

500 tonnes de plastique dans la Méditerrannée



Il n'y avait aucune raison que la Méditerranée soit épargnée. Les premiers résultats de l'expédition MED (Méditerranée en danger), qui a débuté l'an dernier et doit se poursuivre jusqu'en 2013, révèlent en effet que des milliards de microfragments de plastique dérivent à la surface de cette mer. Des constats identiques ont été révélés ces dernières années dans le Pacifique aussi bien que dans l'océan Atlantique.
Initiée par des passionnés bénévoles, l'expédition est adossée à une dizaine de partenaires scientifiques dont l'Ifremer, l'Observatoire océanologique de Villefranche-sur-Mer, les universités de Liège, de Gênes, de Nice ou encore de Toulon… À partir des prélèvements effectués lors de la première campagne l'été dernier sur les côtes françaises, celles du nord de l'Italie et du nord de l'Espagne, «on évalue environ à 500 tonnes la quantité de plastique qui flotte en Méditerranée», souligne François Galgani, de l'Ifremer. «Soit une concentration supérieure à celles des gyres océaniques», ajoute le scientifique, autrement dit les grands tourbillons formés de plusieurs courants marins qui, dans les océans, concentrent ce même type de déchets.
Pour l'heure, le problème est avant tout environnemental. «Chaque année, on estime que plus de 100.000 animaux marins et notamment des tortues meurent après s'être retrouvés emprisonnés dans un sac plastique ou avoir ingéré un déchet flottant… Et en mer, 60 à 80% des débris sont du plastique», précise une étude sur le gyre du Pacifique Sud publiée en 2009 dans Marine Pollution Bulletin.
Les premières études menées sur les oiseaux ont révélé des contaminations assez incroyables. Les fulmars qui vivent et se nourrissent dans la zone la plus polluée de la mer du Nord ont fréquemment «0,6 g de déchets dans leur estomac», peut-on lire dans un rapport du centre de recherche de la Commission européenne d'avril dernier. Si les scientifiques ne sont pas en mesure d'établir un lien avec la santé de ces oiseaux, ils expliquent néanmoins que, toutes proportions gardées, «c'est comme si un homme avait environ 60 g de déchets plastiques dans l'estomac. Il y a fort à parier que l'on considérerait cela comme dangereux et que l'on agirait immédiatement!»
En Méditerranée, Jean-Henri Hecq, biologiste et maître de recherches à l'université de Liège, s'est penché pour sa part sur la place de ces microfragments de plastique dans le zooplancton. «On s'est rendu compte que là où il y a du zooplancton, il y a des microdéchets de plastiques de taille identique et dans les mêmes proportions », précise le scientifique.

Poissons décortiqués 


Quel effet cela a-t-il sur les larves et juvéniles de poissons qui, en se nourrissant, absorbent vraisemblablement autant de plastique que de plancton? «On soupçonne deux conséquences, souligne le biologiste, des risques mécaniques tels que des occlusions et des risques écotoxicologiques», ajoute-t-il, avec les polluants qui sont susceptibles de passer dans les tissus. Au point de présenter des risques pour la consommation humaine ? Si les scientifiques estiment cette question extrêmement prématurée, «il est légitime de se la poser», insiste Bruno Dumontet, le chef de l'expédition, et c'est en Italie que des poissons sont actuellement décortiqués pour être analysés.
Le fait que ces microdéchets servent très facilement de support pour des petites algues notamment est une autre source d'inquiétude. Au gré des courants, ces débris parcourent en effet des milliers de kilomètres et peuvent favoriser dès lors le développement d'espèces invasives. Sans oublier que certains de ces plastiques persistent des centaines voire des milliers d'années. «L'analyse récente d'un albatros montre qu'il avait avalé du plastique provenant d'un avion abattu 60 ans auparavant à quelque 10.000 kilomètres de là où était l'oiseau», peut-on lire dans une étude publiée par la Royal Society.
Pour Bruno Dumontet, tous ces indices sont autant de raisons de poursuivre la campagne qui, cet été, doit explorer durant trois mois les côtes de l'Afrique du Nord avant de remonter par le sud de l'Italie. Les plastiques représentent 10% des déchets. Petit encouragement: les quantités retrouvées en mer semblent se stabiliser. Grosse inquiétude: il reste tout le stock à gérer!

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