vendredi 8 octobre 2010

Arrêt du CE du 10 03 06:M. A est fondé à demander l’annulation de la décision par laquelle la CDC lui a refusé son allocation d'invalidité


Abstrats : 36-08-03-01 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS. RÉMUNÉRATION. INDEMNITÉS ET AVANTAGES DIVERS. ALLOCATION TEMPORAIRE D’INVALIDITÉ. - MALADIE PROFESSIONNELLE DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - RÉGIME DE PRÉSOMPTION LÉGALE POUR LES MALADIES INSCRITES À UN TABLEAU (ART. L. 461-1 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE) - HERNIE DISCALE (TABLEAU N°98) - CONDITIONS DE MISE EN JEU DU RÉGIME DE PRÉSOMPTION - A) PREMIÈRE CONSTATATION DE L’EXISTENCE DE LA MALADIE, MÊME NON EXPRESSÉMENT DÉSIGNÉE, DANS UN DÉLAI DE SIX MOIS APRÈS LA CESSATION DES TRAVAUX DE MANUTENTION - B) PREMIÈRE CONSTATATION DE LA MALADIE PRÉCÉDÉE DE CINQ ANNÉES D’EXERCICE DE L’ACTIVITÉ DE MANUTENTION.
Résumé : 36-08-03-01 En vertu des dispositions combinées du III de l’article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et des articles L. 417-8 et L. 417-9 et R. 417-5 à R. 417-21-1 du code des communes, maintenus en vigueur et étendus à l’ensemble des collectivités territoriales, les agents atteints de maladies professionnelles ont droit à une allocation temporaire d’invalidité cumulable avec le traitement. Aux termes de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, applicable aux agents des collectivités territoriales : (...) Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau (…). Le tableau n° 98, qui est relatif aux affections chroniques du rachis lombaire, mentionne notamment la sciatique par hernie discale L. 4-L.5 et L.5-S.1 avec atteinte radiculaire de topographie correspondante. Au nombre des conditions auxquelles ce tableau subordonne l’application du régime de présomption légale figurent d’une part celle que l’intéressé ait exercé pendant cinq années des travaux de manutention habituelle de charges lourdes, et d’autre part celle que soit respecté un délai de prise en charge de six mois au plus après la cessation de ces travaux.,,a) La circonstance que la hernie discale n’a été formellement constatée par un certificat médical qu’après l’expiration du délai de prise en charge ne suffit pas à écarter le bénéfice du régime de présomption légale si, avant l’expiration de ce délai, ont été établis des certificats médicaux qui, sans désigner expressément la maladie, n’en constituent pas moins une première constatation de son existence dès lors qu’ils sont suffisamment précis quant à la nature de l’affection observée.,,b) Il résulte des dispositions susrappelées qu’une hernie discale ne peut être présumée d’origine professionnelle si l’intéressé n’a pas exercé l’activité désignée pendant une durée de cinq ans avant la première constatation de la maladie.





Conseil d’État
N° 267860
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
3ème et 8ème sous-sections réunies
M. Martin, président
M. François Delion, rapporteur
M. Séners, commissaire du gouvernement
SPINOSI ; ODENT, avocat(s)
lecture du vendredi 10 mars 2006
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 mai 2004 et 16 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, dont le siège à cette fin est le centre de gestion des pensions, rue du Vergne à Bordeaux Cedex (33059) ; la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS demande au Conseil d’Etat d’annuler le jugement du 1er avril 2004 par lequel le tribunal administratif de Bastia a, à la demande de M. Dominique A, annulé la décision du 8 juillet 2002 de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS (branche retraites-Bordeaux) lui refusant le bénéfice d’une allocation temporaire d’invalidité au titre des séquelles d’une maladie professionnelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Delion, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS et de Me Spinosi, avocat de M. A,
- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Dominique A a exercé entre septembre 1992 et novembre 1997 les fonctions de chauffeur-livreur et de manutentionnaire au service des garderies de la commune d’Ajaccio ; qu’il a éprouvé des douleurs sur lesquelles un diagnostic de hernie discale a été porté le 17 novembre 1998 ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision du 8 juillet 2002 par laquelle le directeur général de la Caisse des dépôts et consignation a refusé d’attribuer à M. A une allocation temporaire d’invalidité au titre des séquelles de cette affection ;
Considérant qu’en vertu des dispositions combinées du III de l’article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et des articles L. 417-8 et L. 417-9 et R. 417-5 à R. 417-21-1 du code des communes, maintenus en vigueur et étendus à l’ensemble des collectivités territoriales, les agents atteints de maladies professionnelles ont droit à une allocation temporaire d’invalidité cumulable avec le traitement ; que l’article R. 417-7 du code des communes dispose que les maladies professionnelles prises en compte sont celles énumérées par les tableaux approuvés par décret pris en application de l’article L. 461-2 du code de la sécurité sociale et que les agents ne peuvent bénéficier de l’allocation que dans la mesure où l’affection serait susceptible, s’ils relevaient du régime de la sécurité sociale, de leur ouvrir droit à une rente en application du livre IV du même code et de ses textes d’application ; qu’aux termes de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, applicable aux agents des collectivités territoriales : ... En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l’accident. / Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau... ; que le tableau n° 98, qui est relatif aux affections chroniques du rachis lombaire, mentionne notamment la sciatique par hernie discale L. 4-L.5 et L.5-S.1 avec atteinte radiculaire de topographie correspondante ; qu’au nombre des conditions auxquelles ce tableau subordonne l’application du régime de présomption légale figurent d’une part celle que l’intéressé ait exercé pendant cinq années des travaux de manutention habituelle de charges lourdes, et d’autre part celle que soit respecté un délai de prise en charge de six mois au plus après la cessation de ces travaux ;
Considérant en premier lieu que la circonstance que la hernie discale n’a été formellement constatée par un certificat médical qu’après l’expiration du délai de prise en charge ne suffit pas à écarter le bénéfice du régime de présomption légale si, avant l’expiration de ce délai, ont été établis des certificats médicaux qui, sans désigner expressément la maladie, n’en constituent pas moins une première constatation de son existence dès lors qu’ils sont suffisamment précis quant à la nature de l’affection observée ;
Considérant en second lieu qu’il résulte des dispositions susrappelées qu’une hernie discale ne peut être présumée d’origine professionnelle si l’intéressé n’a pas exercé l’activité désignée pendant une durée de cinq ans avant la première constatation de la maladie ;
Considérant que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a jugé que la hernie discale de M. A devait être légalement présumée d’origine professionnelle au motif que, d’une part, l’intéressé avait exercé pendant plus de cinq ans, entre septembre 1992 et novembre 1997, les fonctions de chauffeur-livreur et de manutentionnaire et que, d’autre part, la circonstance que cette hernie n’a été formellement constatée que le 17 novembre 1998, après l’expiration du délai de prise en charge, ne suffisait pas à écarter la présomption dès lors que les symptômes relevés par des certificats médicaux des 14 septembre 1995, 27 novembre 1996 et 5 décembre 1996 constituaient une première constatation de la maladie ; qu’en admettant ainsi la présomption de l’imputation au service de l’affection dont s’agit, alors que l’intéressé n’avait pas exercé l’activité de chauffeur-livreur et de manutentionnaire pendant une durée de cinq ans avant la première constatation de la maladie, le tribunal administratif de Bastia a commis une erreur de droit ; que la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS est, pour ce motif, fondée à demander l’annulation de ce jugement ;
Considérant qu’en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative il y a lieu de régler l’affaire au fond ;


Considérant que la circonstance qu’une affection ne peut bénéficier du régime de présomption légale ne fait pas obstacle à ce que l’intéressé apporte la preuve de son origine professionnelle ; que M. A établit, notamment en produisant les certificats médicaux susmentionnés, que sa hernie discale, constatée après quatre ans et demi de manutention d’objets lourds, est en lien direct avec le service, alors qu’aucune pièce ne laisse à penser que ce mal aurait préexisté ou qu’il aurait une autre origine ; que dans ces conditions M. A est fondé à demander l’annulation de la décision en date du 8 juillet 2002 par laquelle le directeur de la Caisse des dépôts et consignations a refusé de lui attribuer le bénéfice d’une allocation temporaire d’invalidité au titre des séquelles de cette hernie ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 1er avril 2004 est annulé.

Article 2 : La décision en date du 8 juillet 2002 par laquelle le directeur de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS a refusé d’attribuer à M. A le bénéfice d’une allocation temporaire d’invalidité au titre des séquelles de sa hernie est annulée.

Article 3 : La CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS versera à M. A la somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, à M. Dominique A, au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire et au ministre de l’économie, des finances

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