mercredi 19 juin 2013

Cancers du sang, de la prostate, maladie de Parkinson : l’usage professionnel des pesticides augmente significativement le risque et des dizaines de milliers de territoriaux sont concernés.


Par I. Verbaere
Publié le 14/06/2013


Une expertise collective de l’Institut national de la santé et 
de la recherche médicale (Inserm) rendue publique jeudi 13 juin 2013
 établit que l’usage professionnel des pesticides augmente 
significativement le risque.
 Des dizaines de milliers de territoriaux sont concernés.
Entretien des espaces verts, de la voirie, des cimetières, lutte contre les animaux nuisibles (rats, cafard) et autres vecteurs de maladies (moustiques) : de très nombreux agents territoriaux ont employé et emploient encore des pesticides. Dans quelle mesure cet usage professionnel répété a-t-il des effets sur leur santé à moyen ou long terme ? Pour le savoir, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a compilé les données de la littérature scientifique internationale, publiées au cours des 30 dernières années sur ce sujet. 
Elles portent sur des produits qui ont été retirés du marché pour certains depuis longtemps comme le DTT ou qui sont encore commercialisés.
Cette expertise collective conduite par un groupe pluridisciplinaire de chercheurs a été rendue publique jeudi 13 juin. Elle révèle des augmentations de risque significatives chez les agriculteurs bien sûr, mais aussi les autres professionnels manipulant ces produits, pour plusieurs pathologies :
  • le cancer de la prostate (71 220 nouveaux cas par an en France),
  • des cancers hématopoïétiques qui affectent les organes qui produisent les cellules du sang comme les lymphomes non hodgkinien (11 700 nouveaux cas en 2011 en France)
  • et les myélomes multiples (5 930 nouveaux cas en 2011).
« Bien que les résultats soient moins convergents, un excès de risque de leucémies ne peut être écarté », estiment ces experts.
Risque doublé avec certains insecticides - Ces derniers se sont aussi intéressés aux affections neurodégénératives comme la maladie de Parkinson (environ 100 000 cas en France). Là encore une association positive entre exposition professionnelle à des pesticides et développement de la pathologie est retrouvée. Avec certains insecticides, le risque serait même doublé.
Enfin, les auteurs de l’étude se sont penchés sur le cas des femmes enceintes exposées sur leur lieu de travail. Le fœtus semble particulièrement vulnérable. Les risques de fausses-couches, de malformations congénitales, de leucémie et de tumeurs cérébrales paraissent significativement augmentés.
En milieu professionnel, la peau représente la principale voie d’exposition (environ 80 %). Le contact avec les pesticides peut se produire à différents moments : lors de la manutention, de l’application, du nettoyage du matériel… Mais c’est le plus souvent lors de la préparation des mélanges et à l’occasion de tâches effectuées dans des zones traitées qu’il a lieu.

« Les employeurs devraient collecter les données d’exposition »

Xavier Coumoul, toxicologue, chercheur à l’Inserm et coauteur de l’expertise collective : « Pesticides, effets sur la santé »
« Les études de terrain qui évaluent le niveau d’exposition des travailleurs non agricoles qui utilisent des pesticides sont très rares en France. Nous recommandons de les développer. Il paraît essentiel également que les données qui caractérisent les expositions tout au long de la carrière, produits utilisés, compositions, tâches effectuées, lieux d’application, soient collectées par les employeurs. Avec deux objectifs : améliorer le suivi et la prise en charge médicale de ces professionnels et réaliser des études épidémiologiques. Ces études sont nécessaires pour identifier les molécules qui posent problèmes et en réglementer l’usage. Mais pas seulement. Lorsque le coupable est connu, il est possible de savoir comment il rend malade, pour fabriquer de nouveaux principes actifs qui ne présentent pas cette toxicité. Nous recommandons également de mettre en place un dispositif de recueil des intoxications aigües, troubles qui apparaissent dans les heures ou les jours qui suivent un usage inadéquat. Il présenterait un intérêt pour le suivi des professionnels. Car ces intoxications aigües sont susceptibles d’avoir des effets nocifs - troubles du comportement, anxiété, dépression - des années après. »
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