PUBLIÉ LE 21/10/2013 À 16H10par service juridique - CFDT
Issue de l’accord modernisation du marché du travail et juridiquement née avec la loi du 25 juin 2008, la rupture conventionnelle permet de se rompre le contrat d'un commun accord, en sécurisant le salarié à la sortie. Pour ses détracteurs, elle permettrait aux employeurs de pouvoir se débarrasser des salariés, sans risque (et à moindre coût). Deux postures idéologiques qui s’affrontent, depuis 2008, sans qu’il soit possible de verser au débat des éléments probants chiffrés. Jusqu’à cette importante étude de la DARES, réalisée au printemps 2012, auprès d'un échantillon de 4 500 salariés ayant signé une rupture conventionnelle (RC) entre avril et juillet 2011. Cette étude a été rendue publique début octobre, nous allons nous arrêter sur ces principaux apports.
- Après la montée en charge, la stabilisation
Après une montée en charge rapide du dispositif en 2009, la progression a été en constante baisse pour tendre désormais à la stabilisation. La progression du nombre de RC était de 29 % en 2010, puis 17 % en 2011 et de 11 % en 2012. Cette baisse s’accroît même fortement en 2013, puisque les 4 premiers mois font apparaître une tendance à + 3 %.
Que représente la RC en masse ? Est-elle devenue le moyen privilégié des employeurs pour se séparer de leurs salariés devenus indésirables comme le prétendent les détracteurs de ce dispositif ?
Il y a eu 320 000 RC homologuées en 2012 (soit 26 700 par mois), sachant que le taux d’irrecevabilité est de 2,5 % en 2011 (il était de 4 % en 2009).
Ces 320 000 RC ne représentent en 2012 que 16 % des fins de CDI (encore faut-il signaler qu’il s'agit des fins de CDI hors départs en retraite et fins de période d'essai, si ces dernières étaient incluses les RC seraient bien en dessous des 16 %).
Un chiffre assez peu important au regard des licenciements (autres qu’économiques) qui représentent 21 % des fins de CDI, et surtout comparé aux démissions qui concernent 57 % des ruptures de contrats à durée indéterminée. C'est ce dernier chiffre qui devrait nous alerter tous, surtout en période de crise comme aujourd'hui. Plutôt que de polémiquer sur la RC, ne devrait-on pas se pencher sur la question des conditions de travail et du niveau de rémunération de certains secteurs d'activité, qui sont tels que nombre de salariés préfèrent jeter l’éponge, au risque de se retrouver en grande précarité ? On notera pour conclure sur ce point que les licenciements économiques représentent 6 % des fins de CDI, ils n'en représentaient que 3 % avant la création de la RC.
- Un nombre de RC inversement proportionnel à la taille de l'établissement
Le taux de recours et la part des RC dans les fins de CDI diminuent quand la taille des entreprises augmente, tandis que la part des licenciements monte. Entre début 2009 et fin 2012 :
- les RC ont représenté 20 % des fins de CDI dans les établissements de moins de 10 salariés,
- contre 10 % dans ceux de 50 à 99 salariés,
- et 7 % à partir de 250 salariés.
Il s'agit la de la démonstration objective que la RC est bien loin de se substituer (et donc de tuer) le licenciement. En effet, c’est dans les plus grandes entreprises, là où le droit du licenciement et notamment économiques est le plus protecteur pour les salariés, que l’on observe le plus faible taux de RC !
De même, c’est dans les plus petites entreprises, là où les droits afférents aux licenciements sont les plus faibles, que les salariés privilégient le plus la RC, pour obtenir une indemnité supérieure (même légèrement).
Arrêtons-nous précisément sur l’indemnité de RC :
- Pour 2009, elle est en moyenne, en euros courants, de 7 780 alors que les indemnités de licenciement sont de 3 580.
- Pour 2011 elle est de 6 660 pour 3 260 pour l’indemnité de licenciement.
Des chiffres qui se passent de commentaires.
- Initiative de la rupture et motivation des parties
Dans presque la moitié des cas (48 %) les salariés déclarent que le choix de rompre le contrat provient plutôt d’une acceptation commune entre le salarié et son employeur. Les salariés affirment que la rupture du contrat est plutôt leur choix dans 38 % des cas, et plutôt celui de l employeur dans 14 % des cas. On est donc loin du dispositif incarnant en lui-même le déséquilibre des parties au contrat de travail !
Et si malgré cela 29 % des salariés estiment avoir été contraints par leur employeur à quitter leur établissement, il faut y voir l'idée que derrière chaque départ d'une entreprise, il y a toujours une insatisfaction, s'il n’y avait que des choses positives on ne romprait pas le contrat.
*Quelles sont les raisons qui ont conduit le salarié à choisir la RC ?
- Bénéficier des allocations-chômage dans 69 % des cas,
- éviter à terme un conflit pour 58 % des personnes interrogées,
- Le fait de bénéficier d une indemnité de départ n’est cité que dans 37 % des cas.
*Quelles auraient été les perspectives du salarié si le dispositif n'avait pas existé ?
- 28 % des salariés ayant signé une rupture conventionnelle déclarent qu'en l'absence de ce dispositif, ils seraient restés dans l'établissement,
- 40 % qu'ils auraient démissionné,
- 22 % qu'ils auraient été licenciés.
Au final, 16 % des salariés indiquent avoir envisagé d'autres formes de départ comme une démission (60 %), un licenciement économique (21 %) ou un licenciement pour un autre motif.
- Situation des salariés après la rupture
Immédiatement après la rupture, 25 % (ce qui est très important) des salariés disent avoir retrouvé un emploi, tandis que 60 % disent avoir été en recherche d'emploi. Entre 9 et 15 mois après la rupture, 59 % déclarent avoir occupé un emploi et 23 % avoir repris des études.
- RC et impact sur l'emploi des seniors
La problématique du maintien des seniors dans l'emploi, trouve encore une occasion de s'inviter au débat avec ce nouveau mode de rupture. En effet, on observe que, tout comme le licenciement, les chiffres augmentent dans les mêmes proportions, pour les RC concernant les salariés de plus de 57 ans. Soyons clair, la RC ne créé pas cette difficulté mais elle ne contribue pas non plus (loin s’en faut) à la réduire, et cela mobilise notre organisation.
Pour conclure sur cette étude, nous saluerons ses apports qui, selon nous, sont de nature à pacifier le débat. Si le régime de la RC n’est pas parfait il est fort utile pour les salariés et de ce fait très apprécié.
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