dimanche 17 février 2013

les directeurs généraux de l’administration et de la fonction publique, des collectivités locales soulignent le peu d’impact, à ce jour, de la mise en place du jour de carence sur l’absentéisme dans la fonction publique.


Auditionnés à l’Assemblée nationale par la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) sur les arrêts de travail, les directeurs généraux de l’administration et de la fonction publique, des collectivités locales et de l’offre de soins ont adopté un profil bas sur les contrôles effectués depuis un an. Ils ont souligné le peu d’impact, à ce jour, de la mise en place du jour de carence sur l’absentéisme dans la fonction publique.
Chaque jeudi depuis fin 2012, la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) poursuit ses auditions sur les arrêts de travail dans la perspective d’un rapport qui pourrait être rendu public en avril. Jeudi 14 février, c’était au tour de Jean-François Verdier, directeur général de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), Christophe Peyrel, sous-directeur des élus locaux et de la fonction publique territoriale, représentant la direction générale des collectivités locale (DGCL) et Jean Debeaupuis, directeur général de l’offre de soins (DGOS) d’être auditionnés. Questionnés par Pascal Morange, député (UMP) des Yvelines, co-président de la MECSS, et Bérangère Poletti, rapporteure et députée (UMP) des Ardennes sur le nombre d’arrêts de travail, l’expérimentation de contrôles et l’impact du jour de carence instauré début 2012, les trois représentants de la fonction publique ont fait état de données restreintes sur le sujet.
Effet mécanique - A l’hôpital, d’après l’Agence technique d’information sur l’hospitalisation (ATIH), le taux d’absentéisme des personnels non médecins est de 6,2 % pour la maladie et la maternité, alors que pour le seul personnel médical (médecins et interne), le taux serait de 3 % ( 2 % sans les internes). 
L’expérimentation de contrôles sur seulement 15 000 arrêts du fait de difficultés de transmission de données entre les établissements et l‘assurance maladie ne permet pas d’en tirer des conclusions pour l’instant. « L’expérimentation va se poursuivre car elle a des vertus pédagogiques. Les établissements recourent également, pour le contrôle des arrêts longs, aux médecins agréés » a expliqué Jean Debeaupuis, DGOS. Mais, alors que la Fédération hospitalière de France met en avant une baisse de 20 % de l’absentéisme de courte durée, le DGOS s’est montré plus réservé sur l’effet de la mise en place du jour de carence.
Données provisoires - « Les données dont nous disposons sont encore très provisoires. Elles ne concernent que le premier semestre 2012. 
Pour la fonction publique hospitalière, comme pour l’ensemble de la fonction publique, la mise en place du jour de carence a eu un effet mécanique lié au non paiement de cette journée » a encore souligné le DGOS. L’économie représenterait, pour les hôpitaux 0,2 % de masse salariale, soit environ 75 millions d’euros. 
Si l’effet mécanique de la mesure est avéré, son impact qualitatif paraît plus difficile à démontrer. « Les premiers éléments montre une baisse modeste du taux d’absentéisme, de 0,2 à 0,3 %, difficile à corréler avec le jour de carence, car d’autres facteurs de gestion des ressources humaines entrent en jeu en 2012 » a rajouté le DGOS. Il a précisé que le taux d’absentéisme (qui inclut la formation) est actuellement de 7,3 % dans les établissements hospitaliers publics et de 8,2 % dans les établissements privés à but non lucratif, avec de faibles variations entre petits et grands établissements. Le nombre de jours d’arrêts pour motifs médicaux est à l’hôpital de 18 jours en moyenne dont 10 pour maladie ordinaire pour un équivalent temps plein, soit 7,3 pour les catégories A, 16,3 pour les catégories B et 22 pour les catégories C.
5,7 % d’arrêts non justifiés - Pour la fonction publique de l’Etat, Jean-François Verdier, DGAFP, a mis en garde sur les biais des collectes de données sur l’absentéisme avant d’indiquer que les derniers chiffres « sérieux » dataient, pour l’Etat, de 2003, soit 13 jours d’arrêt en moyenne pour raison médicale, dont 7 jours pour congé long. « Toute autre extrapolation publiée dans la presse est dénuée de valeur scientifique » a-t-il précisé. La mise à jour de ces données par la DGAFP et l’Insee devrait être disponible en décembre 2013. Reprenant la récente note de la Dares sur « Les absences au travail des salariés pour raison de santé » (http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2013-009.pdf), le DGAFP a mentionné un taux d’absentéisme de 3,7 % pour les agents titulaires ou en CDI de plus de un an et de 2,6 % pour les autres agents en CDD ou en contrat depuis moins d’un an. Pour corréler ces données, 132 000 arrêts de travail, dans 5 départements (Ille-et-Vilaine, Rhône, Alpes-Maritimes, Bas-Rhin, Puy-de-Dôme) et à Bercy, soit 7 à 8 % des fonctionnaires de l’Etat, ont fait l’objet de contrôles dès lors qu’ils dépassaient 45 jours, ou s’il y avait eu 3 arrêts sur les douze derniers mois. Sur 7 % d’arrêts contrôlés, 5,7 % n’étaient pas médicalement justifiés et ont, dans de rares cas, été sanctionnés par l’arrêt de la rémunération ou le demi-traitement. Un autre rapport devrait être publié en 2014 sur cette expérimentation – obligatoire à l’Etat – et qui se poursuit.
Arrêts en baisse de 0,2 % - A propos du jour de carence, ” imposé par le précédent ministre du budget et non par celui de la fonction publique” a tenu à préciser le DGAFP, sa mise en place a abouti à la suppression de 200 millions d’euros de budget en 2012. Le temps de le mettre en place entre mars et juillet, seuls 50 % de ces sommes ont été récupérées auprès des fonctionnaires concernés. « Certains ministères ont étalé les remboursements pour éviter un effet trop brutal sur les traitements des agents » a souligné Jean-François Verdier. Les arrêts courts n’ont pas diminué pour autant. Les agents ont souvent transformé le jour de carence en jour de RTT. Pour vérifier ces données, la DGAFP a comparé une semaine de référence en 2011 et 2012. Les arrêts de travail courts ont diminué de 1,2 % à 1 %. « Très honnêtement je ne peux pas dire qu’il y a eu un effet. Compte tenu du lobbying intensif de la Fédération hospitalière de France, il semble qu’il y ait eu un effet sur l’absentéisme dans la FPH. Pour la FPT je n’en sais rien. Pour la FPE, on ne peut affirmer qu’il a un net impact. Reste cette différence de traitement entre salariés du privé et du public pour lesquels je jour de carence n’est pas pris en charge par les mutuelles » a déclaré le DGAFP.
Peu de volontaires - Pour le volet territorial, Christophe Peyrel a extrait des Bilans sociaux des collectivités les données 2011. Le nombre moyen darrêts pour raisons de santé était de 23,6 jours en 2011, 22,4 jours en 2009 et 21,1 jours en 2005. « L’augmentation depuis 2005 s’explique peut-être par l’accueil de 130 000 agents venus de l’Etat du fait de la décentralisation. Il y avait parmi eux les agents techniques des collèges et lycées et ceux du ministère de l’Equipement, plus sujets que d’autres aux arrêts maladie et aux difficultés de santé » a avancé le sous-directeur. Les chiffres très différents par niveaux de collectivités ont retenu l’attention de la mission. Avec 29,9 jours d’arrêt dans les régions, 21,1 dans les départements et 24 dans les communes et EPCI, la mission s’est interrogée sur les raisons de telles disparités, sans que la DGCL puisse fournir d’explications. Alors que l’expérimentation des contrôles a, dans la territoriale, commencé début 2012, seules 9 collectivités dont 3 départements se sont portés volontaires. Parmi elles, seules quatre ont finalement enregistré des données (Menton, Saint Malo et les conseils généraux des Alpes-Maritimes et du Rhône). « Il y a un manque d’adhésion. Cela dérange tout le monde. Et l’on est toujours mal à l’aise pour aller au delà du tabou médical » a décrit Christophe Peyrel. « Le différentiel entre les différents types de collectivités laisse perplexe » a commenté le co-président de la Mecss, suggérant à la DGCL de comparer les chiffres disponibles avec les données agrégées des assureurs et de faire prévaloir l’obligation d’expérimentation sur le principe de libre administration des collectivités. 


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RÉFÉRENCES
Visionner les auditions, dont celle du 14 février 2013, durant trois mois (rubrique « vidéo des auditions »)

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