Les éléments posés sont déséquilibrés »
À l'issue de la troisième séance de négociation sur la sécurisation de l'emploi, le secrétaire national Patrick Pierron, chef de file de la délégation CFDT*, a regretté que les propositions patronales fassent si peu de place à de nouveaux droits pour les salariés.
La séance du 19 octobre portait sur deux thèmes : « l’anticipation des évolutions de l’activité, de l’emploi et des compétences » et « l’amélioration des dispositifs de maintien dans l’emploi face aux aléas conjoncturels ». Quel en est l'enjeu ?
C’est, de notre point de vue, le cœur de la négociation : il s'agit d'instaurer un dialogue social constant dans les entreprises qui permette de comprendre la trajectoire de l'entreprise et de s'adapter plus rapidement en cas dégradation de sa situation économique. S’il s’agit d’un problème très ponctuel, on peut faire du chômage partiel, en favorisant au maximum la formation des salariés. En cas de difficulté conjoncturelle, on peut négocier un accord de sauvegarde de l’emploi avec des garanties pour les salariés, notamment qu’ils percevront les fruits de leurs efforts si l’entreprise franchit le cap difficile. Enfin, s’il s’agit d’un problème structurel, les représentants du personnel doivent pouvoir infléchir la stratégie de l’entreprise. Cela suppose que les représentants du personnel aient accès aux informations avant les décisions qui ont un impact sur l'emploi. Nous voulons passer d’une logique de traitement de crise à une logique d’anticipation.
La séance a-t-elle permis de progresser sur ces points ?
Nous avons cette fois-ci eu des éléments qui sont de vrais documents de travail, plus étayés que jusqu'alors. Sur les deux thèmes, il y a également des propositions qui tiennent compte des précédentes négociations sur la modernisation du dialogue social et sur les accords de sauvegarde de la compétitivité et de l'emploi. Mais au terme d'une lecture rapide, force est de constater qu'entre le peu qui est donné aux salariés et les contraintes posées aux représentants du personnel, l'ensemble est déséquilibré.
Notre objectif dans cette négociation reste d'anticiper l'avenir dans les entreprises pour éviter les pertes d'emploi. Cela suppose un recours permanent à l'expertise. Par ailleurs, nous voulons encadrer le recours aux accords de sauvegarde de l'emploi pour éviter le chantage à l'emploi qui est fait aux salariés dans certaines entreprises. Il est nécessaire de mettre des garde-fous. Les éléments présentés par la partie patronale y répondent en partie, mais il y a une forme de provocation autour de la nature du licenciement d'un salarié refusant un tel accord. Pour nous, le motif du licenciement ne peut être qu'économique, avec les droits qui y sont liés, puisque ce sont les difficultés économiques de l'entreprise qui déclenchent l'accord. Je pensais que l'on avait avancé sur ce point et je constate une régression. Enfin, les propositions patronales ne comprennent que peu de nouveaux droits pour les salariés.
À quoi penses-tu précisément ?
Nous voulons favoriser l’évolution professionnelle des salariés et les aider à être acteurs de leur parcours. Ce sont les droits rechargeables à l'assurance-chômage, la négociation d'une partie du plan de formation, un conseil en évolution professionnelle, une gestion prévisionnelle des emplois et compétences plus dynamique, etc. Nous voulons également renforcer l'équité des droits entre les salariés, qu'ils soient dans de grandes entreprises ou dans des petites, qu'ils soient en contrat à durée indéterminée ou pas, qu'ils soient en zone rurale ou en zone urbaine. Cela reste notre fil conducteur dans cette négociation.
Propos recueillis par Aurélie Seigne
* La délégation confédérale est composée des secrétaires nationaux Patrick Pierron et Véronique Descacq, de Dominique Gillier, membre du Bureau national, et des secrétaires confédéraux Cécile Cottereau et Didier Cauchois.
Vous pouvez poser vos questions, faire part de vos réactions ou faire des suggestions en écrivant aux négociateurs à l’adresse suivante : negoemploi@cfdt.fr |
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