lundi 25 juillet 2011

Venez vous installer à Marseille pour connaître le (la) Marseillais(e) " tranquille, qui s’en bat les couilles "



Article paru dans Marsactu
Vous venez de débarquer à Marseille ou prévoyez de le faire, et vous avez envie d’autre chose que le classique discours du maire aux nouveaux arrivants sur la « plus ancienne cité de France », avec son « brassage des cultures » et qui entend « s’inscrire dans le Top 20 des métropoles européennes » ? Sorti cet été, le guide « S’installer à Marseille », se veut un « vade mecum des informations essentielles sur le point où vous allez atterrir », explique Eloi Rouyer, auteur de l’ouvrage.
Qui précise d’emblée que « ce n’est pas un guide touristique », vu les rubriques abordées : « écoles, immobilier, emploi, santéC’est un panorama établi avec comme base « comment on se débrouille quand on arrive dans la ville? »" Ainsi que Médias où, preuve du sérieux de l’ouvrage, Marsactu est cité… Mais, pour des personnes « qui s’installent aussi en grande partie pour la proximité de la mer, le soleil, la qualité de vie », impossible non plus de ne pas livrer « une sélection de calanques et de plages ». Et d’aborder un sujet commun au Routard et autres Lonely Planet et guide Michelin : balades, sorties, restos et compagnie.
Pour se démarquer, et s’adresser plus à des néo-Marseillais partis pour rester qu’à des touristes de passage quelques jours, le journaliste donne la parole à « quatre experts qui donnent leur lecture, leurs adresses, leurs conseils ». Au chapitre loisirs, la directrice artistique du Festival de Marseille Apolline Quintrand évoque ainsi « une verrerie d’art à la Joliette », le Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques, à la production méconnue. Et côté cuisine, Gérard Vives, importateur d’épices et créateur du Comptoir des poivres – au passage « assez critique sur la gastronomie marseillaise, mais l’idée est aussi, sans dégoûter les gens, de porter un regard lucide » – indique « un resto kurde à côté de la gare où l’on ne mettrait jamais les pieds en passant à proximité ».
« Ni angélisme, ni paranoïa »
Mais, plutôt que le contenu des assiettes, n’est-ce pas plutôt le menu copieux de faits-divers qui risque de rebuter ? « On le voit sur les forums du site NeoZarrivants, l’une des premières préoccupations est la sécurité, et on peut effectivement s’interroger sur la manière de présenter les choses », reconnaît-il. Pour épouser la thèse de l’ancien préfet de police de Marseille, Philippe Klayman : « Marseille est une grand métropole, qui comme toutes les zones urbaines génère des problèmes ». Ce qui donne, traduit en conseil aux novices : « ni angélisme, ni paranoïa ».
La maxime s’applique aussi aux quartiers Nord : « je ne voulais pas les stigmatiser, c’est tellement en évolution et il y a tellement d’autres choses qui s’y passent pour ne pas reprendre le cliché « la zone au Nord et le plaisir au Sud ». En même temps, quand on présente l’offre éducative, on ne peut pas cacher que c’est très compliqué de mettre ses enfants dans certains collèges ».
La parole aux anciens nouveaux
Le concept, développé par la maison d’édition Héliopoles dans quatre autres villes en France, comprend aussi de confier la rédaction « à un journaliste qui a eu ce parcours à faire » afin qu’il « se mette dans la peau » du lecteur, précise le rédacteur de l’Agence France Presse, « arrivé ici il y a quatre ans ». Le tout enrichi de témoignages d’ex-néo-Marseillais, « une quinzaine de personne d’un peu tous les profils (étudiants, retraités, couple avec enfants, sans enfants…), pour savoir comment ça s’est passé pour eux, quel est leur ressenti sur la ville. » Pas idiot dans une ville où la frontière entre Marseillais et étranger est plus que ténue, où l’on ne sait jamais combien de temps il faut pour pouvoir se revendiquer « d’ici »...
Verdict ? « Ce qui revient beaucoup, c’est le fait que l’humain prime toujours sur l’administratif. Un couple me racontait notamment comment, lorsqu’ils ont cherché une maison, c’était la croix et la bannière car personne ne rappelait jamais lorsqu’ils laissaient des messages sur répondeur. Par contre, dès qu’on franchit la porte d’une agence et qu’il y a un contact direct, c’est plus simple. Idem pour trouver une école pour les enfants », rapporte-t-il.
Le temps au temps
Outre le côté « noyaux villageois », les retours décrivent également une « ville de réseaux, où il faut du temps pour rentrer dedans, par exemple via des associations ». En attendant, « il n’est pas forcément simple de nouer le contact et on reste du coup pas mal entre néo-Marseillais« , poursuit le journaliste. Qui ajoute cependant qu’on « peut très bien malgré tout se sentir chez soi dans cette ville ». Mais, pour la vie nocturne comme pour d’autres domaines, il faut avoir le mode d’emploi, connaître les bons lieux ou les bonnes personnes, « écouter radio Grenouille entre 17h et 20h »
Quant aux « clichés et (…) idées reçues » dont, promet la maison d’édition de ces « anti-guides touristiques », doit « débarrasser » le lecteur, il se fait plus nuancé. « On passe son temps à se confronter à des clichés qui ont la vie dure. Il naissent quand même d’une certaine réalité. Un cliché, c’est la caricature de cette réalité. Les amis marseillais que j’ai interrogé m’ont parlé de l’importance du temps, de la durée. C’est quelque chose de riche – c’est une qualité de vie que les gens prennent le temps de faire les choses, se voir, se parler – mais qui peut aussi être pénible. » Et aboutir ainsi au Marseillais « tranquille, qui s’en bat les couilles (avé l’accent, ndlr) ». Et de conclure : « la différence quand on ne passe ici que trois jours, c’est qu’on reste à la lisière ». Un plaidoyer pour poser ses valises un peu plus longtemps, en somme.
S’installer à Marseille Méditerranée, Eloi Rouyer, Héliopoles. 168 pages, 21 euros

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