Banier, le compte secret qui plombe Woerth
L’affaire / lundi 6 septembre par Nicolas Beau
Imbroglio Bettencourt-Banier-Woerth, suite. Quoiqu’il en dise, Éric Woerth alors ministre du Budget ne pouvait rien ignorer du contrôle fiscal visant François-Marie Banier.
Le procureur Philippe Courroye a-t-il reçu des consignes de l’Élysée, comme le bruit court, pour exécuter en douceur Éric Woerth ? Une certitude, les flics de la brigade financière ont aujourd’hui les coudées franches pour traquer les petits arrangements de l’ancien trésorier de l’UMP avec le droit. Et ils sont une dizaine sur le coup !
Pour l’instant, la campagne médiatique déclenchée contre Éric Woerth n’est fondée sur aucun délit précis qui puisse être retenu contre lui. Même l’embauche de son épouse par la première contribuable de France, Liliane Bettencourt, alors qu’il était ministre du Budget ne relève que de la condamnation morale.
Dans les semaines qui viennent, la situation de Woerth pourrait devenir autrement plus intenable.
Le leurre du contrôle fiscal
Dès le début 2008, Bakchich révélait qu’un compte au nom de François-Marie Banier figurait sur le fameux listing bancaire provenant du Liechtenstein, parmi 500 autres. Trois cents comptes appartenant à des non-résidents étaient écartés d’emblée et 80 dossiers, dont celui de Banier, contribuable dans le VIe arrondissement de Paris, étaient sélectionnés par Bercy pour être examinés de près par la Direction nationale des vérifications des situations fiscales (DNVSF). Sous ce sigle se cachent les plus fins limiers du fisc, connus pour passer au scalpel les fortunes des particuliers.
Malgré ses dénégations et ses contradictions (lire encadré en fin d’article), Éric Woerth ne pouvait en rien ignorer l’existence de cette enquête sur Banier, l’intime de Liliane Bettencourt.
Mais pas question de laisser tomber cette dernière, généreuse donatrice de l’UMP. Il y a le feu au lac. Or c’est dans ce contexte, fin 2007, que l’épouse du ministre, Florence, entre au service de la propriétaire de L’Oréal. La chronologie, si elle était confirmée, donnerait à l’embauche de Mme Woerth un éclairage peu reluisant.
Que veut-on nous faire croire ? Eh bien, Éric Woerth explique benoîtement qu’un contrôle fiscal a bien eu lieu sur la situation de François-Marie Banier, mais seulement en mars 2009 et après que le procureur Philippe Courroye avait signalé son cas aux services de Bercy. Pas de chance, le directeur général des finances publiques, peu suspect d’hostilité au pouvoir, Philippe Parini, évoque dans le Figaro (29 juin) un contrôle « fin 2008 ». Apparemment, le ministre et le haut fonctionnaire n’ont pas la même mémoire des dates.
En fait, l’un et l’autre mentent : un premier contrôle a débuté, fin 2007, sur les petites économies du photographe au Liechtenstein, avant d’être promptement enterré. Le dossier se trouve toujours, trente mois plus tard, dans une armoire de la DNVSF et n’a même pas réintégré le centre d’impôts du VIe arrondissement, où réside l’ami de Liliane Bettencourt. Le second contrôle, qui intervient en 2009, pourrait bien être juste un leurre.
Rendu public en juillet 2010, le fameux rapport de l’inspection générale des finances sur la gestion de Woerth au Budget est intéressant à relire. Attentivement. En effet, les quatre auteurs évoquent les révélations parues « dans la presse » – en fait dans Bakchich – sur un possible compte Banier au Liechtenstein, avant de laisser entendre que ces informations seraient inexactes. Sans l’affirmer explicitement. Et les hauts fonctionnaires chevronnés de se référer à un écrit officiel d’un des plus proches conseillers d’Éric Woerth, « chef de la cellule fiscale », qui réfute tout simplement l’hypothèse d’un tel compte. Une façon, toute jésuitique, de botter en touche… tout en renvoyant à « l’annexe 3 » de leur rapport, tenue confidentielle au nom du secret fiscal, où figurerait le fameux listing du Liechtenstein.
L’examen de ce listing pourrait se révéler particulièrement instructif pour les limiers du procureur Courroye, s’il leur venait l’idée de le demander. À condition toutefois que le document fourni par Bercy comprenne l’ensemble des comptes saisis au Liechtenstein à la fin 2007 et pas seulement les quelque 80 qui ont fait, in fine, l’objet d’un contrôle après le tri sélectif du « chef de la cellule fiscale » de Woerth. À suivre.
L’affaire / lundi 6 septembre par Nicolas Beau
Imbroglio Bettencourt-Banier-Woerth, suite. Quoiqu’il en dise, Éric Woerth alors ministre du Budget ne pouvait rien ignorer du contrôle fiscal visant François-Marie Banier.
Le procureur Philippe Courroye a-t-il reçu des consignes de l’Élysée, comme le bruit court, pour exécuter en douceur Éric Woerth ? Une certitude, les flics de la brigade financière ont aujourd’hui les coudées franches pour traquer les petits arrangements de l’ancien trésorier de l’UMP avec le droit. Et ils sont une dizaine sur le coup !
Pour l’instant, la campagne médiatique déclenchée contre Éric Woerth n’est fondée sur aucun délit précis qui puisse être retenu contre lui. Même l’embauche de son épouse par la première contribuable de France, Liliane Bettencourt, alors qu’il était ministre du Budget ne relève que de la condamnation morale.
Dans les semaines qui viennent, la situation de Woerth pourrait devenir autrement plus intenable.
Le leurre du contrôle fiscal
Dès le début 2008, Bakchich révélait qu’un compte au nom de François-Marie Banier figurait sur le fameux listing bancaire provenant du Liechtenstein, parmi 500 autres. Trois cents comptes appartenant à des non-résidents étaient écartés d’emblée et 80 dossiers, dont celui de Banier, contribuable dans le VIe arrondissement de Paris, étaient sélectionnés par Bercy pour être examinés de près par la Direction nationale des vérifications des situations fiscales (DNVSF). Sous ce sigle se cachent les plus fins limiers du fisc, connus pour passer au scalpel les fortunes des particuliers.
Malgré ses dénégations et ses contradictions (lire encadré en fin d’article), Éric Woerth ne pouvait en rien ignorer l’existence de cette enquête sur Banier, l’intime de Liliane Bettencourt.
Mais pas question de laisser tomber cette dernière, généreuse donatrice de l’UMP. Il y a le feu au lac. Or c’est dans ce contexte, fin 2007, que l’épouse du ministre, Florence, entre au service de la propriétaire de L’Oréal. La chronologie, si elle était confirmée, donnerait à l’embauche de Mme Woerth un éclairage peu reluisant.
Que veut-on nous faire croire ? Eh bien, Éric Woerth explique benoîtement qu’un contrôle fiscal a bien eu lieu sur la situation de François-Marie Banier, mais seulement en mars 2009 et après que le procureur Philippe Courroye avait signalé son cas aux services de Bercy. Pas de chance, le directeur général des finances publiques, peu suspect d’hostilité au pouvoir, Philippe Parini, évoque dans le Figaro (29 juin) un contrôle « fin 2008 ». Apparemment, le ministre et le haut fonctionnaire n’ont pas la même mémoire des dates.
En fait, l’un et l’autre mentent : un premier contrôle a débuté, fin 2007, sur les petites économies du photographe au Liechtenstein, avant d’être promptement enterré. Le dossier se trouve toujours, trente mois plus tard, dans une armoire de la DNVSF et n’a même pas réintégré le centre d’impôts du VIe arrondissement, où réside l’ami de Liliane Bettencourt. Le second contrôle, qui intervient en 2009, pourrait bien être juste un leurre.
Rendu public en juillet 2010, le fameux rapport de l’inspection générale des finances sur la gestion de Woerth au Budget est intéressant à relire. Attentivement. En effet, les quatre auteurs évoquent les révélations parues « dans la presse » – en fait dans Bakchich – sur un possible compte Banier au Liechtenstein, avant de laisser entendre que ces informations seraient inexactes. Sans l’affirmer explicitement. Et les hauts fonctionnaires chevronnés de se référer à un écrit officiel d’un des plus proches conseillers d’Éric Woerth, « chef de la cellule fiscale », qui réfute tout simplement l’hypothèse d’un tel compte. Une façon, toute jésuitique, de botter en touche… tout en renvoyant à « l’annexe 3 » de leur rapport, tenue confidentielle au nom du secret fiscal, où figurerait le fameux listing du Liechtenstein.
L’examen de ce listing pourrait se révéler particulièrement instructif pour les limiers du procureur Courroye, s’il leur venait l’idée de le demander. À condition toutefois que le document fourni par Bercy comprenne l’ensemble des comptes saisis au Liechtenstein à la fin 2007 et pas seulement les quelque 80 qui ont fait, in fine, l’objet d’un contrôle après le tri sélectif du « chef de la cellule fiscale » de Woerth. À suivre.
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