mercredi 29 mars 2017

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Assurance chômage : syndicats et patrons proches d’un accord

Par Alexia Eychenne

Au terme d’une longue journée de négociation, mardi, la CFDT, FO, la CGC et la CFTC se disent prêts à signer un texte de compromis. Les employeurs concèdent une légère hausse de cotisations, mais la majoration des CDD très courts disparaît. Perdants de l’accord, les chômeurs de plus de 50 ans.

Est-ce la proximité de la présidentielle qui a joué? La peur de donner du grain à moudre aux détracteurs du paritarisme en cas d’échec du dialogue social? Au terme d’une négociation incertaine, le patronat et quatre syndicats se sont mis d’accord, mardi en fin de soirée, sur un projet de nouvelle convention d’assurance-chômage. La CFDT, FO, la CGC et la CFTC jugent le texte final «équilibré» et devraient le parapher. En échange d’une durée d’indemnisation réduite pour les seniors et de la fin des majorations sur les contrats courts, ils obtiennent une très légère hausse des cotisations employeurs, le maintien du statu quo sur les CDD d’usage et un accès facilité aux allocations pour certains précaires. Seule la CGT juge «peu probable» de signer. L’accord fixe notamment les règles d’indemnisation des quelque trois millions de demandeurs d’emploi qui bénéficient d’une allocation. Après sa signature par les centrales syndicales, ce texte, valable trois ans, devra être agréé par le prochain gouvernement. La dernière convention, signée en 2014 par la CFDT, la CFTC et FO, avait été prolongée par l’exécutif en juillet dernier, faute de consensus, à l'époque, entre les partenaires sociaux.
Les syndicats abordaient les débats avec une même idée fixe: dissuader les entreprises d’embaucher en CDD de trois mois, un mois, voire moins, en tapant au porte-monnaie. Ils n’y sont pas vraiment parvenus. Côté patrons, le Medef, la CPME et l’U2P (artisans et professions libérales), qui s’exprimaient d’une même voix, excluaient toute hausse «sèche» des cotisations. Alexandre Saubot, leur négociateur, a mis sur la table une revalorisation généralisée de 0,05% des cotisations chômage des employeurs. Mais ce geste «exceptionnel», chiffré à 270 millions d’euros par an, n’allait pas sans contreparties. Les patrons réclamaient la fin des sur-cotisations de 0,5 à 3% qui pesaient déjà, depuis 2013, sur les CDD très courts. Ils mettaient aussi dans la balance une baisse de 0,05% de la cotisation à l’AGS, le régime qui garantit les salaires en cas de liquidation d’une entreprise.

Statu quo sur les CDD d’usage

Un jeu à somme quasi nulle qui n’avait «même pas l’apparence de l’équilibre», tonnait Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT Spectacles, à l’ouverture de la séance. «Hors de question de supprimer les majorations actuelles», prévenait aussi Michel Beaugas, secrétaire confédéral chez FO. La CFDT, de son côté, était prête à lâcher du lest sur les sur-taxations de 2013. Selon elle, ce dispositif n’avait pas prouvé son efficacité et le léger gain de recettes avait été compensé par les exonérations de cotisations sur les CDI des moins de 26 ans. En revanche, le syndicat mettait son veto à la disparition de la majoration de 0,5% sur les CDD d’usage (CDDU). Dans certains secteurs, ces contrats ultra-souples échappent aux garde-fous des CDD classiques: reconduction limitée, délai de carence et prime de précarité. «Ils ont explosé ces dernières années et il y a beaucoup d’abus», pointait Véronique Descacq, secrétaire générale adjointe de la CFDT.
La centrale réformiste et le Medef ont fini par trouver un terrain d’entente. Vers 21 heures, le patronat a accepté de maintenir la surtaxation des CDDU pendant dix-huit mois, en échange de la validation de ses autres propositions: légère hausse des cotisations patronales, disparition des majorations sur les CDD courts et baisse des contributions à l’AGS. Un désaveu pour les syndicats, que ces derniers ont tenté de nuancer. Un comité de pilotage se réunira une fois par an pour vérifier que les branches négocient bien des accords sur les contrats courts, promettent-ils, et la hausse des cotisations pourra être abrogée en fonction de leurs progrès.

Les quinquas pénalisés

Autre point de tension: l’indemnisation des chômeurs de plus de 50 ans. Les «quinquas» sont moins touchés par le chômage que les autres catégories d’âge, mais ils y restent plus longtemps. L’actuelle convention leur permettait de toucher des allocations pendant trois ans maximum, contre deux pour les autres demandeurs d’emploi. Or, le patronat voulait reculer à 59 ans l’âge minimum pour bénéficier de cette «filière seniors». Avant de proposer une solution par paliers. C’est sur cette option que les deux camps ont négocié sec, hormis la CGT, hostile jusqu’au bout à une refonte des seuils.
Selon le compromis final, les chômeurs auront droit à 30 mois de chômage complétés par des droits supplémentaires à la formation entre 53 et 55 ans, puis à 36 mois à partir de 55 ans. Soit cinq ans plus tard qu’aujourd’hui. FO estime avoir concédé une «ouverture assez conséquente» en validant cette dernière mouture. La CFDT s’est dit satisfaite que les chômeurs ne deviennent plus «seniors» à 50 ans. «Jusqu’à maintenant, on disait aux DRH qui négociaient des plans de départs volontaires qu’ils pouvaient se débarrasser des salariés à partir de cet âge. On supprime l’incitation à les virer», estime Véronique Descacq. Mais la mesure a surtout vocation à rapporter près de 400 millions d’euros d’économies, sur les 891 millions attendus dans la nouvelle convention...

Un accès élargi pour les précaires?

Les représentants des patrons ont en revanche reculé sur une proposition qui a crispé le camp adverse durant une bonne partie de la journée. Le Medef et ses alliés ont cherché à modifier la durée minimale d’affiliation, c’est-à-dire le temps pendant lequel il faut avoir travaillé pour prétendre à une allocation. Les règles actuelles imposent un minimum de 122 jours «calendaires» ou de 610 heures, au cours des 28 derniers mois. Le patronat voulait que le seul critère retenu soit celui des 610 heures. Un coup dur pour les salariés à temps partiel: selon la CGT, 100 000 personnes, dont une majorité de femmes, risquaient de perdre leurs droits à l’indemnisation.
Mais le patronat a vite accepté un retour aux règles actuelles. Les syndicats ont même réussi à négocier une disposition plus favorable aux demandeurs d’emploi: 88 jours «travaillés» suffiront pour ouvrir des droits au chômage. Un mode de calcul mieux adapté aux travailleurs les plus précaires, qui enchaînent les CDD de quelques jours seulement. Concrètement, 34 000 nouvelles personnes pourraient avoir droit à une indemnisation, pendant que 102 000 autres devraient plus facilement pouvoir faire valoir leurs droits. Les patrons ont aussi accepté de réduire le différé maximal. Les chômeurs qui quittent leur dernier poste avec des indemnités supérieures à ce que prévoit la loi peuvent aujourd'hui patienter jusqu’à 180 jours avant de toucher leur allocation. Ce délai sera réduit à 150 jours. Une réforme surtout favorable aux cadres. Elle était d’ailleurs réclamée par la CFE-CGC, qui a obtenu là de quoi justifier sa signature du texte.
Alexia Eychenne



protocole_accord_assurance_chomage_du_28_mars_2017.pdf

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