dimanche 26 juin 2011

Le retrait du permis de conduire peut-il justifier un licenciement…: la cour de cassation vient de préciser le 4 mai 2011




















Le retrait ou la suspension du permis de conduire, pour des raisons
 privées, peut-il constituer une cause de licenciement ? Par plusieurs
 décisions récentes, la Cour de cassation vient de traiter cette question
 pour le moins épineuse.


Conseils aux employeurs
Il convient, non seulement que l’emploi du salarié nécessite le permis 
de conduire, mais encore que le contrat de travail prévoit spécifiquement
 la détention du permis de conduire. Les deux éléments sont ici cumulatifs.
 De plus, et dès lors que l’employeur entend licencier le salarié,
 il convient pour lui d’éviter le terrain disciplinaire, mais d’invoquer
 l’impossibilité pour le salarié d’exercer ses fonctions du fait de la 
perte de son permis.



Un fait de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un
 licenciement disciplinaire : dans un arrêt du 23 juin 2009
 (pourvoi n° 07-45256), la chambre sociale de la Cour de
 cassation a clairement affirmé ce principe.


Le respect de la vie privée, un principe






On serait donc en droit de déduire que le retrait du 
permis de conduire, lié à la vie privée, ne peut motiver
 un licenciement disciplinaire. Dans une autre décision, 
rendue trois mois plus tard, la Haute juridiction a toutefois
 affiné son raisonnement en affirmant que « chacun a droit 
au respect de sa vie privée ; il en résulte qu’il ne peut être 
procédé à un licenciement pour cause tirée de la vie privée
 du salarié que si le comportement de celui-ci a créé un trouble
 objectif caractérisé au sein de l’entreprise » (Cass soc. 
16 septembre 2009, pourvoi n° 08-41837 – voir aussi
 14 septembre 2010, pourvoi n° 09-65675). Cette position
 a été réitérée récemment : un motif tiré de la vie personnelle
 du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire,
 sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation
 découlant de son contrat de travail. Le fait, pour un salarié
 qui utilise un véhicule dans l’exercice de ses fonctions, de commettre,
 dans le cadre de sa vie personnelle, une infraction routière 
entraînant la suspension ou le retrait de son permis de conduire
 ne saurait être regardé comme « une méconnaissance de ses 
obligations découlant de son contrat de travail » (Cass soc
. 3 mai 2011, pourvoi n° 09-67464) . En l’espèce, un agent
 de propreté avait été licencié pour faute grave, après le retrait 
de son permis de conduire en raison de la perte de la totalité 
de ses points, dans le cadre de sa vie personnelle, à la suite 
d’infractions au Code de la route commises en dehors de
 l’exécution de son contrat de travail. Pour la Cour de cassation,
 son licenciement, prononcé pour motif disciplinaire, était dépourvu 
de cause réelle et sérieuse et l’employeur était tenu de lui verser
 les salaires de la période de mise à pied et l’indemnité compensatrice 
de préavis.




Tempéraments
Logiquement, les tribunaux ont décidé que, lorsque le salarié dont 
le permis de conduire a été suspendu ne peut plus remplir, par ses
 propres moyens, les missions inhérentes à sa fonction et, en l’espèce,
 alors que l’employeur n’était pas tenu d’accepter la substitution
 de l’intéressé par des tiers pour la conduite du véhicule que
 l’entreprise mettait à disposition pour ses déplacements professionnels, 
le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse (Cass soc.
 22 septembre 2009, pourvoi n° 08-42304). Cependant, dans 
cette décision, la conduite, et donc le permis de conduire, constituait
 l’élément essentiel du contrat de travail du salarié. 
En sens inverse
 donc, dès lors que la conduite
 d’un véhiculene constituait pas 
l’un des éléments des fonctions de
 coordinateur de préparation,
 confiées au salarié d’une entreprise
 automobile, le licenciement
, au motif d’une suspension provisoire
 de son permis de conduire,
 ne reposait pas sur une cause 
réelle et sérieuse.
 (Cass soc. 4 mai 2011, pourvoi n° 09-43192).





François TAQUET

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