jeudi 25 avril 2013

Laurent Berger Secrétaire Général de la confédération CFDT :“Notre pays traverse une crise de responsabilité”

publié le 23/04/2013 à 16H11 par L'Union-L'Ardennais
 
Interviewé dans l'Union-L'Ardennais du 23 avril 2013 à l'occasion d'un déplacement dans les Ardennes, Laurent Berger plaide pour un dialogue social constructif dans une période difficile.
Pourquoi ce déplacement ardennais ?
Je viens rencontrer les salariés de KME à Givet et d'Electrolux à Revin, deux entreprises où les équipes CFDT ont fait un travail remarquable pour maintenir l'emploi. Chez Electrolux, l'anticipation, l'établissement d'un rapport de force et l'existence d'un projet alternatif ont démontré que l'action syndicale peut être utile. En matière d'emploi, il n'y a jamais de fatalité.
Le 1er mai, vous manifestez à Cormontreuil, près de Reims, aux côtés des leaders de l'Unsa, Luc Bérille, et de la CFTC, Philippe Louis. Faut-il y voir la constitution d'un pôle syndical réformiste ?
Dans un climat social dégradé, il s'agit surtout d'exprimer l'unité de ceux qui veulent faire progresser la situation des salariés les plus vulnérables. La CFDT et la CFTC ont signé l'accord sur la sécurisation de l'emploi et l'Unsa l'a soutenu. Il était naturel que ces organisations manifestent ensemble leur volonté de promouvoir la démocratie sociale, à l'heure où le fait majoritaire est actuellement mis à mal. On le voit bien à travers le débat houleux autour du mariage pour tous.
Mais un rapprochement de la CFDT avec l'Unsa est-il envisageable ?
Un rapprochement organisationnel, non. En matière syndicale, un plus un ne font jamais deux. En revanche, je revendique le renforcement d'un travail en commun pour construire et proposer des vraies solutions pour l'emploi. Il s'agit de mettre l'accent sur nos points d'accord. Et ils sont nombreux. L'accord sur la sécurisation de l'emploi l'a démontré. Redonner du poids au dialogue dans l'entreprise et des droits nouveaux aux salariés, ce n'est pas rien.
Selon les chiffres de la représentativité syndicale, la CFDT talonne la CGT. Comment interprétez-vous ce résultat ?
La mesure de l'audience syndicale est historique. Pour la première fois, les syndicats puisent leur légitimité dans l'entreprise. La représentativité démontre ensuite que nous sommes au coude à coude avec la CGT. La CFDT fait même mieux dans les seules élections professionnelles. Cela prouve que le syndicalisme en France ne se résume pas à la CGT.
Comment sont vos relations avec Thierry Lepaon, le n° 1 de la CGT ?
Entre nous, il n'y a pas de fracture mais une différence. Le syndicalisme de commentaire n'est pas celui que nous avons choisi. L'exemple d'Electrolux à Revin est frappant. Si l'entreprise s'en sort, c'est parce que les salariés ont fait des propositions utiles.
Il y a eu quand même ce drapeau de la CFDT brûlé lors d'une récente manifestation à Lille !
Ça et les insultes, les agressions verbales, je ne l'accepte pas. En soi, c'était une raison suffisante pour ne pas manifester ensemble avec la CGT le 1er mai. Dans une période où la société est très clivée, les syndicats n'ont pas intérêt aux actes et propos agressifs.
Vous évoquez une crise de responsabilité. C'est-à-dire ?
Trop d'acteurs politiques, patronaux, syndicaux, en panne d'idées, se contentent du « y a qu'à, faut qu'on » et demandent aux autres de faire le boulot. Le sens de l'action syndicale, selon moi, c'est la proposition et l'engagement. Et ma responsabilité, c'est le dialogue social. En toutes circonstances, cela suppose de se démarquer des propos excluants pour se concentrer sur les vrais sujets. Et le vrai sujet, c'est l'emploi.
Comment jugez-vous l'action du gouvernement de Jean-Marc Ayrault ?
Les Français ont compris que la période est difficile, qu'il y a nécessité de nous désendetter. Mais le gouvernement devrait davantage nous parler du cap, du modèle de société que nous voulons, qui intègre le développement durable, la transition énergétique, la qualité de vie au travail. Depuis un an, on ne peut pas dire que rien ne s'est passé. Mais Jean-Marc Ayrault peine à le faire savoir. Regardez l'accord sur l'emploi ! La majorité s'est presque excusée de faire passer cette loi, alors qu'elle contient des avancées importantes. Grâce à lui, 400 000 personnes vont pouvoir disposer d'une complémentaire santé. C'est énorme !

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