jeudi 25 avril 2013

La CADA demande à la BNF de communiquer les accords de numérisation passés avec ses deux partenaires privés

La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), saisie par le site d’informations sur l’univers du livre ActuaLitté, a rendu, le 11 avril 2013, un avis favorable à la communication des accords que la Bibliothèque nationale de France (BnF) a conclus avec deux sociétés privées. Cependant la commission liste les éléments « à forte valeur ajoutée », qui devront être masqués.

Dans un courrier adressé aux responsables du site ActuaLitté, le 18 avril 2013, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), estime que les contrats signés par la filiale de la BnF – BnF-Partenariats – « revêtent le caractère de documents administratifs, au sens de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978, dont la communication peut être demandée sur le fondement de cette loi, sans qu’y fasse obstacle, en particulier, le droit de l’Union européenne. »
Ces deux contrats, annoncés par la BnF le 15 janvier, lient BnF-Partenariat, d’une part, à Proquest, et, d’autre part, à Believe Digital associée à Memnon Archiving Services, deux sociétés privées spécialisées dans la numérisation et la valorisation de ressources.
Le premier contrat concerne 70 000 documents patrimoniaux datant de la période 1470-1700 ; le second 180 000 disques vinyles édités entre 1900 et 1962. Ces deux accords font l’objet d’une polémique, car ils prévoient des clauses temporaires d’exclusivité sur la diffusion d’une partie des fonds concernés pour une période de dix ans.
La CADA se fonde, notamment, sur les points suivants :
·         l’objet de ces contrats (la numérisation et la diffusion en ligne des fonds concernés), la CADA constitue une « mission d’intérêt général. »
·         BnF-Partenariat est une personne privée chargée d’une mission de service public. La commission observe, notamment, que la BnF en est actionnaire à 100% et en assure la présidence, et que son comité stratégique est composé de quatre représentants de l’établissement public, deux représentants du ministère de la culture, deux du ministère du budget et deux personnalités qualifiées.
Limites à la communicabilité - Cependant, dans un second temps, la commission rappelle que le droit à la communication doit « s’exercer dans le respect du secret en matière industrielle et commerciale. » Et de lister les éléments qui devront ainsi être occultés : moyens techniques et humains mis en œuvre, certifications diverses concernant la prestation demandée, chiffre d’affaires, coordonnées bancaires, mentions définissant le montage juridique et financier….
La CADA souligne que ce type de contrats est « beaucoup plus étoffé que celui des marchés classiques, dans la mesure où il comporte de nombreuses clauses dans lesquelles sont décrites avec précision les éléments financiers, juridiques, techniques et fonctionnels de l’opération ». Elle note que ces informations « comportent une très forte valeur ajoutée. »
En conséquence, elle estime que, si le droit d’accès doit être respecté, il ne peut l’être sans « occulter, dans le contrat lui-même, les mentions qui définissent le montage juridico-financier et comptable mis au point par le partenaire retenu. »
Résistances de la BNF - Jusqu’à présent, la BnF refusait de publier ces accords, malgré les pressions de leurs détracteurs et de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale.
L’établissement public s’était limité à mettre en ligne, sur son site, le 20 mars, une explication de ces contrats. Auditionné par les députés, le 10 avril, Bruno Racine, le président de la BnF avait indiqué aux députés avoir lui-même saisi la CADA, et envisager, selon l’avis qui serait rendu, « d’organiser la communication sur ces contrats » avec la commission des affaires culturelles.
De leur côté, les responsables du site ActuaLitté annoncent qu’ils ont demandé, à nouveau, à Bruno Racine les deux contrats.
Le secret industriel et commercial des accords suscite des inquiétudes
Dans un communiqué publié le 22 avril 2013, le collectif SavoirCom1 se félicite de l’avis rendu par la CADA le 11 avril. Mais ses animateurs font état de leurs « inquiétudes » quant à la portée, à leur avis trop large, que donne la commission à la notion de secret industriel et commercial. 
En conséquence, le collectif redoute une publication amputée de « parties essentielles ». Un reproche déjà fait à la BnF par les détracteurs des accords controversés, lorsque cette dernière a mis en ligne une présentation des accords sur son site, le 20 mars.
Lors de son audition par les députés, le 10 avril, son président, Bruno Racine, avait admis que les clauses couvertes par le secret industriel et commercial n’y figuraient pas. « Avec une telle décision, la CADA ouvre une brèche qui pourra être utilisée à l’avenir par la BnF, mais aussi par toutes les autres institutions culturelles, pour numériser leurs collections dans des conditions opaques », avance le collectif SavoirCom1.

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