Marie-Douce Albert, avec le service Architecture et Urbanisme | 06/12/2012 | 9:47 | Culture
On avait fini par le croire immortel : le patriarche brésilien de l’architecture est décédé le 5 décembre à Rio de Janeiro (Brésil), sa ville natale, à l’âge de 104 ans. Entré dans la légende grâce à son rôle majeur dans le modernisme brésilien et à la construction des monuments de la mythique Brasilia. Il était aussi connu pour son inébranlable engagement communiste, son amour des femmes et sa célébration permanente de la courbe.
Il s’en sera fallu de dix jours : Oscar Niemeyer aurait eu 105 ans le 15 décembre. Il est mort ce mercredi à l'hôpital Samaritano de Rio de Janeiro où il avait été admis voici un mois. Né en 1907 dans cette même ville, Oscar Ribeiro Almeida de Niemeyer Soares - un nom qui témoigne de ses origines autant portugaises, allemandes qu'arabes - passe une enfance heureuse dans la vaste maison qui abrite sa grande famille: parents, grands-parents, frères et sœurs, oncles et tantes. Mais, très jeune, il est choqué par les privilèges dont jouit son milieu bourgeois.
Dès l'école primaire, il excelle en dessin, ce qui le mène jusqu'à l'Ecole des beaux-arts en 1929. Puis il rejoint l'équipe de l'architecte et urbaniste Lucio Costa. Oscar Niemeyer dira avoir choisi d'y travailler pour rien, quand ses camarades de classe optent pour de grosses compagnies de BTP. Mais c'est justement dans ce cabinet que, jeune diplômé, il pourra participer en 1936 au projet qui marque l'avènement du modernisme dans son pays: la construction du ministère de l'Education et de la Santé, dont Le Corbusier est architecte-conseil.
Monuments pour une capitale
Il décroche sa première commande d'envergure à la décennie suivante. Pour le maire de Belo Horizonte, Juscelino Kubitschek, il imagine le complexe de Pampulha, au bord d'un lac. Une mise en jambe avant son grand chantier: Brasilia. Devenu président, Kubitschek ravive le vieux rêve d'une nouvelle capitale pour le Brésil. Au centre du pays, au milieu de nulle part, Lucio Costa trace un plan urbain en forme d'oiseau sur lequel Oscar Niemeyer élève des monuments emblématiques. L'architecte dessine notamment des coupoles inversées pour le Congrès national et une gerbe d'arcs pour la cathédrale. Oscar Niemeyer use alors de béton dans un "jeu inattendu de lignes droites et de courbes". Il se démarque des raides angles droits du mouvement moderne et se fait plutôt le chantre de la sensualité des "courbes que je trouve dans les montagnes de mon pays, dans le cours sinueux de ses rivières, dans les vagues de l'océan et sur le corps de la femme aimée". Inaugurée le 21 avril 1960, Brasilia devient un mythe, qui sera classé par l'Unesco au Patrimoine mondial de l'humanité dès 1987. "Tu peux aimer ou pas, mais tu ne peux pas dire que tu as vu des choses semblables", constate Niemeyer.
Prix pour une carrière
En 1965, après l'instauration de la dictature, l'architecte qui milite au Parti communiste depuis vingt ans s'exile en France. Malraux lui permet d'obtenir un permis de travail, qui l'autorise à bâtir, notamment, la maison de la Culture du Havre, aujourd'hui appelée le Volcan, et surtout le siège du Parti communiste français à Paris. Même Georges Pompidou fait - presque - l'éloge du célèbre dôme blanc de la place du Colonel-Fabien, "la seule bonne chose que les Communistes aient faite". Niemeyer aime la France et les terrasses des Champs-Elysées où il regarde passer les Parisiennes perchées sur leurs talons. De retour dans son pays dans les années 1970, Oscar Niemeyer reçoit le prix Pritzker en 1988 et, devenu un très vieux monsieur, il peut afficher un palmarès de plus de 600 réalisations. En 1996, l'étrange soucoupe volante de son musée à Niteroi fait à nouveau sensation et une décennie plus tard, il inaugure un théâtre populaire dans cette même ville située face à Rio. Régulièrement, l'annonce d'un nouveau projet culturel ou l'inauguration d'un bâtiment administratif venait rappeler que la carrière déjà exceptionnelle du patriarche de l'architecture brésilienne se poursuivait toujours. Une vingtaine de projets serait encore en cours de réalisation dans divers pays. Niemeyer, depuis son bureau de Rio de Janeiro, au-dessus de la plage de Copacabana, ne cessait de tracer des courbes au feutre noir...
Cent ans et plus
En 2007, l'architecte avait fêté son centenaire entouré de sa famille, de ses amis et de son ancienne secrétaire, âgée de 60 ans, qu'il avait épousé en secondes noces en 2006 (sa première épouse est décédée en 2004). Ce jour-là encore, Niemeyer assurait que l'essentiel est de mener une "vie décente basée sur la solidarité". Le très vieux militant n'avait rien oublié de ses engagements et affichait encore, ces dernières années, son soutien indéfectible à Cuba. A ses visiteurs, il avait pris l'habitude d'affirmer: "Il est plus important d'aller manifester dans la rue que de faire de l'architecture". Même si, pour Oscar Niemeyer, l'architecture était avant tout un manifeste.
Réalisations à Brasilia (Brésil)[modifier]
- Siège du Procureur général de la République (Sede da Procuradoria Geral da Republica) (2002)
- Tribunal suprême (Supremo Tribunal Federal) (2001)
- Association du Barreau du Brésil (Ordem dos Advogados do Brasil) (1997)
- Cour supérieure de justice (Superior tribunal de Justiça) (1989)
- Musée de Brasilia (Museu de Brasilia) (1988)
- Espaço Oscar Niemeyer (1988)
- Pantheon (Panteão) (1985)
- Memorial Juscelino Kubitschek (1981)
- Teatro Nacional Cláudio Santoro (1966-1981)
- Pont Costa e Silva (1973)
- Institut central des sciences (Instituto Central de Ciências) (1963-1971)
- Cathédrale de Brasilia (Catedral Metropolitana Nossa Senhora Aparecida) (1970)
- Siège des armées (Quartel-General do Exército) (1968)
- Ministère des Affaires étrangères (Palácio dos Arcos-Itamaraty) (1962)
- Palais présidentiel (Palácio do Planalto) (1960)
- Palais présidentiel (Palácio da Alvorada)
- Congrès national (Congresso Nacional) (1958-1960)
- Résidence présidentielle (Palácio da Alvorada) (1958)
- Chapelle Notre-Dame de Fatima (Igreja Nossa Senhora de Fátima-Igrejinha) (1958)
Autres réalisations au Brésil[modifier]
- Estação Ciência, Cultura e Artes, 2008 (João Pessoa)
- Musée d'art contemporain de Niterói, 1991-1996 (Niterói, en face de Rio de Janeiro)
- Torre Charles de Gaulle I et II (logements), 1994 (Rio de Janeiro)
- Hôtel Horsa Nacional 1972 (Rio de Janeiro)
- Fundação Getulio Vargas 1958 (Rio de Janeiro)
- Casa das Canoas (maison) 1954 (Rio de Janeiro)
- ex Ministerio da Educação e Saude 1943 (avec Le Corbusier, L. Costa, A. Reidy, C. Leão, E. Vasconcellos, J Moreira (Rio de Janeiro)
- Auditorium 2005 (São Paulo)
- Memorial da América Latina (São Paulo)
- Résidence Edifício Itália 1965 avec F. Heep (São Paulo)
- Résidence Edifício Copan 1957 (São Paulo)
- Logements Eiffel (São Paulo)
- Logements Montreal (São Paulo)
- Parque do Ibirapuera 1954 (avec B. Marx pour le paysage) (São Paulo)
- NovoMuseu 2002 (Curitiba)
- Teatro Estadual Maestro Francisco Paulo Russo 1991 (avec H. Penteado, H. Pasta) (Araras)
- Résidence Niemeyer 1954 (Belo Horizonte)
- Église St François d'Assise 1940-1943 (Belo Horizonte)
Réalisations en France[modifier]
- Siège du Parti communiste français 1965-1980 (Paris 19e arrondissement)
- Bourse du travail 1980 (Bobigny)
- Maison de la Culture du Havre 1978-1982 (Le Volcan, scène nationale). Accessible par un jeu de rampes, l'œuvre se compose de deux volumes courbes blancs en béton. Ils abritent un théâtre, une salle de cinéma, un auditorium, un hall d'exposition, une salle polyvalente consacrée aux arts de la scène... En 2008, une réflexion est lancée pour des aménagments du site14.
- Ancien siège du quotidien L'Humanité Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) 1989
- Bureaux Niemeyer I, II, bâtiment Julia et restaurant inter-entreprises de la Société Générale (Fontenay-sous-Bois)
Autres réalisations dans le monde[modifier]
- Logements Hansaviertel, 1957 (Berlin, Allemagne)
- Maison Strick, 1964 (Los Angeles, États-Unis)
- Pestana Casino Park, 1966 (Funchal, Madère)
- Siège des Éditions Mondadori, 1968 (Milan, Italie)
- Siège des Nations unies, 1952 (avec Le Corbusier, Wallace Kirkman Harrison, S. Markelius, Taylor, Soilleux & Overend, G. Brunfaut, Studio E. Cormier, Ssu-Ch'eng Liang, N. D. Bassov, Sir H. Robertson, J. Vilamajo) (New York, États-Unis)
- Université Mentouri de Constantine, 1971-1977 (Constantine, Algérie)
- Bâtiment universitaire Eshkol Tower, 1976 (Haifa, Israël)
- Université Houari-Boumédienne USTHB, 1974 (Alger, Algérie)
- Foire internationale, 1968-1974 (Tripoli, Liban)
- Salle omnisport « coupole » du complexe olympique (Alger, Algérie)
- École polytechnique d'architecture et d'urbanisme (Alger, Algérie)
- Centre culturel international Oscar Niemeyer (Avilés, Asturies, Espagne)
- Auditorium, 2000-2010 (Ravello, province de Salerne, Italie)
- Université Mouloud Mammeri (Tizi Ouzou, Algérie)
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