Réchauffement: le hiatus climatique est officiellement mort
Le 05 janvier 2017 par Romain Loury
Pas de pause dans le réchauffement
C’est un phénomène qui embarrassait bien des climatologues: de 1951 à 2012, la surface océanique s’était réchauffée en moyenne de 0,12°C par décennie, avec une nette décélération depuis 1998, à 0,07°C par décennie. Si les scientifiques, dont ceux du Giec[i], tentaient d’expliquer cette pause dans le réchauffement par diverses hypothèses (voir ici, ici ou là), les climato-sceptiques y voyaient quant à eux la preuve que celui-ci n’était qu’un hoax.Or à défaut de canular, c’est au contraire ce«hiatus climatique» qui s’avère être un artefact.
L’idée avait déjà été avancée en juin 2015, lors d’une étude publié dans Science par des chercheurs de la NOAA[ii]. Aux Etats-Unis, elle avait suscité une levée de boucliers des climato-sceptiques, mais aussi d’une commission de la Chambre des représentants -à majorité républicaine. Sur sa demande, la NOAA avait accepté de transmettre ses données, mais avait refusé de publier la correspondance électronique entre les auteurs de l’étude.
Un biais technique
Dans leur étude, les experts de la NOAA avaient montré que le réchauffement marin n’avait pas décéléré. L’apparente baisse de rythme était due à un changement dans les techniques de mesure, qui ont nettement évolué ces deux dernières décennies: en 1990, 80% des mesures étaient effectuées par bateau, alors qu’en 2015 80% d’entre elles l’étaient par des bouées automatiques.
Or l’eau analysée par les bateaux circule à travers la salle des machines, engendrant un léger réchauffement, tandis que la température mesurée par les flotteurs robotsreflète bien mieux la réalité. C’est cette transition qui a donné l’illusion d’une décélération du réchauffement.
L’étude de 2015 recourait elle aussi aux deux types de données, mais avec une correction mathématique censée lisser les discordances. De quoi énerver un peu plus les climato-sceptiques, qui ont crié à la manipulation des chiffres.
Un réchauffement continu
Le problème semble désormais réglé avec l’étude publiée par l’équipe de Robert Rohde, de l’université de Berkeley (Californie), dans Science Advances: à la différence de la NOAA, les chercheurs ont évité le mélange des données, analysant séparément celles obtenues par satellite, par balise Argo et par bouée dérivante.
Leurs résultats sont sans appel: depuis 1998, le rythme du réchauffement marin s’est bien maintenu à 0,12°C par décennie. La NOAA avait donc raison.
«Nous étions initialement sceptiques à propos des résultats de la NOAA car ils montraient un réchauffement plus rapide pendant cette période que celui indiqué précédemment par une étude actualisée du Met Office [Service national britannique de météorologie]», commente l’un des co-auteurs de l’étude, Kevin Cowtan, de l'université de York.
«Nous avons vérifié nous-mêmes en utilisant différentes méthodes et données et avons conclu que la NOAA avait raison, conclusion à laquelle est également parvenue dernièrement l'Agence météorologique japonaise en utilisant des données encore plus récentes», ajoute-t-il.
[i] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat
[ii] Administration américaine en charge de l’océan et de l’atmosphère
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