lundi 9 janvier 2017

Ingénieurs territoriaux :atténuer l’effet plafond de verre créé par la séparation du cadre d’emploi des ingénieurs. Les ingénieurs principaux ou les étudiants qui ont les diplômes, peuvent devenir ingénieurs en chef en passant un examen professionnel (limité en nombre de postes) alors qu’avant la réforme, on pouvait devenir ingénieur en chef avec l’ancienneté

« Nous ne voulons pas que les ingénieurs territoriaux se séparent en deux corps » – Patrick Berger

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Berger photo credit AITFjpg © AITF
Patrick Berger vient d’être reconduit pour un mandat de deux ans à la présidence de l’Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF). Il dresse les grands enjeux de l’année 2017 qui sera marquée par la mise en œuvre du nouveau cadre d’emploi des ingénieurs et les 80 ans de l’association.
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2017 sera la première année de mise en œuvre de la réforme du cadre d’emploi des ingénieurs en chef territoriaux. L’Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF) y prendra toute sa part en développant notamment des missions d’accompagnement et de parrainage des futurs ingénieurs en chef. Elle mise en effet sur la solidarité pour contrer un éventuel plafond de verre que va immanquablement provoquer la réforme du cadre d’emploi.

Comment abordez-vous 2017 ?

Nous souhaitons être acteurs de l’évolution de l’environnement territorial que nous vivons actuellement, en particulier dans la mise en œuvre du nouveau cadre d’emploi pour les ingénieurs et les ingénieurs en chef. En février 2017 sera organisé le premier concours dans sa nouvelle forme à l’Inet.

Comment êtes-vous associés à la formation des futurs ingénieurs en chef ?

L’AITF a déjà été associée par le CNFPT pour le programme de formation de douze mois des élèves ingénieurs. Il y aura le premier concours pour les ingénieurs en chef avec notamment un oral de mise en situation collective. L’AITF a participé à un groupe de travail mis en place par le CNFPT qui avait besoin d’expertise par rapport aux besoins des collectivités qui vont recruter.

Quel rôle jouera l’AITF ?

L’AITF accompagnera ses adhérents et les ingénieurs principaux à devenir des ingénieurs en chef sous forme de parrainage, ce qui complètera ce que fait le CNFPT. L’enjeu de la réforme va être de trouver des stages et des postes. Le second grand chantier de l’AITF va être d’accompagner les élèves stagiaires dans leurs recherches en faisant fonctionner le réseau de l’association vers l’Inet, à l’image de ce que fait déjà l’Association des administrateurs territoriaux (AATF).

Quelles formes prend cette solidarité ?

Nous voulons atténuer l’effet plafond de verre créé par la séparation du cadre d’emploi des ingénieurs. Les ingénieurs principaux ou les étudiants qui ont les diplômes, peuvent devenir ingénieurs en chef en passant un examen professionnel (limité en nombre de postes) alors qu’avant la réforme, on pouvait devenir ingénieur en chef avec l’ancienneté. Aujourd’hui, il faut passer un examen ou un concours.
La deuxième difficulté est que ceux qui passent le concours interne ou externe doivent quitter leur collectivité et donc retrouver un poste. Il est donc plus compliqué de devenir ingénieur en chef et un plafond de verre est susceptible de se créer. C’est déjà ce qu’il se passe pour les administrateurs. L’objectif de la réforme est de revaloriser la place des ingénieurs en chef dans les collectivités. Mais nous ne voulons pas que les ingénieurs se séparent en deux corps, avec une AITF qui ne s’occuperait que des ingénieurs en chef.
Nous avons une tradition de solidarité : les ingénieurs en chef de l’association aident ceux qui veulent le devenir et les aident à trouver un poste et des stages. 2017 sera l’année de mise en place de tout cela. Nous allons développer la communication, le parrainage, l’accompagnement pour le passage du concours des ingénieurs en chef, afin d’inciter aussi les jeunes et les techniciens territoriaux à passer le concours d’ingénieur.

Quels sont les autres axes de travail avec le CNFPT ?

Nous allons coopérer avec le CNFPT également sur les e-communautés. Notre vœu est que celles-ci se développent en lien avec les groupes de travail de l’AITF via des passerelles, des échanges. Cela nous permettrait de nous recentrer sur notre expertise tout en participant à des e-communautés de pratiques. Ce serait l’occasion pour nous de vulgariser tout ce qui est produit chez nous et que cette expertise aille dans tous les territoires. Les outils numériques vont nous aider à renforcer une sorte de label, de marque AITF, qui fera que l’information produite aura un caractère de sérieux, de qualité.

Où en êtes-vous des recours déposés contre les décrets de 2016 relatifs au nouveau cadre d’emploi ?

Nous devrions avoir au printemps le résultat des quatre recours que nous avons déposés contre les décrets de février 2016 sur les ingénieurs. Ils concernent les personnes ayant le droit de passer le concours, la comptabilisation des congés maternité pour le grade d’ingénieur hors classe (qui a été oubliée dans les textes), l’accès à l’examen professionnel des ingénieurs en chef sur les postes fonctionnels, et les quotas fixés pour les lauréats à l’examen professionnel.

Vos Rencontres nationales doivent aussi évoluer…

En juin, nous aurons nos nouvelles Rencontres nationales de l’ingénierie territoriale (qui remplacent les Rencontres nationales de l’ingénierie publique). Il s’agit d’une nouvelle formule qui marque le renforcement de notre coopération avec le CNFPT dans la coorganisation et l’établissement du programme. Le thème de 2017 sera consacré à la résilience [sous toutes ses formes dans les territoires]. L’accès à ces Rencontres sera facilité pour les congressistes. Nous en espérons 600 à 800 cette année.

Votre association fête ses 80 ans cette année. Que prévoyez-vous pour cet événement ?

Nous produisons pour cette occasion un ouvrage retraçant nos 80 ans d’existence et dessinant l’avenir en nous projetant. Dans le contexte du fonctionnaire bashing, nous voulons montrer la place de l’ingénieur dans les collectivités et la solidarité qui a toujours animé les ingénieurs territoriaux.
En 1937, le contexte était déjà bien difficile (guerre d’Espagne, prélude de la seconde Guerre mondiale). Nos pairs, qui étaient à l’époque ingénieurs des villes, se sont investis dans la reconstruction du pays. Aujourd’hui, les collectivités ont moins d’argent, mais il y a un besoin toujours plus grand de services, des enjeux environnementaux, de transition énergétique importants. Les ingénieurs territoriaux ont toujours répondu présents.

Que pensez-vous des futurs décrets PPCR concernant les ingénieurs?

Les ingénieurs sont assez maltraités par ces textes. On ne perd rien par rapport à la situation actuelle. En revanche, les jeunes vont perdre beaucoup du fait de l’allongement de leur carrière. La durée va augmenter entre chaque échelon. L’avancement long devient la mesure. Avant, il fallait un à deux ans pour passer d’un échelon à un autre. Maintenant il va falloir deux à quatre ans.
Dans la pratique, cela double la durée et le déroulement de carrière est plus long ce qui a une incidence par rapport à l’indice. En fin de carrière, il sera plus faible, tout comme les niveaux de retraite. Certes, il y a eu un geste en termes d’indice puisque nous avons eu un gain de neuf points. Mais cette compensation indiciaire ne compense pas cet allongement de carrière. Nous sommes en désaccord avec ces textes. Les ingénieurs sont maltraités. Ce n’est pas bon pour la reconstruction du paysage territorial, pour attirer des jeunes à développer une carrière dans la FPT.

Quelle sera votre position lors de la campagne présidentielle ?

Pour les présidentielles, nous pensons que nos propositions auront plus de force si elles sont portées par l’Entente des territoriaux car il s’agit avant tout de la défense de la FPT et de son cadre.
Focus

Des projets de décrets « pas à la hauteur des enjeux de la FPT »

Les projets de décrets PPCR concernant les ingénieurs territoriaux ne satisfont pas l’AITF. Dans un communiqué publié fin décembre, l’association dénonçait « un nivellement par le bas du grade des ingénieurs ». Les textes apportent quelques avancées reconnaît-elle : création d’un 9ème échelon pour les ingénieurs principaux (indice 1015), assouplissement des conditions d’accès au grade d’ingénieur hors classe pour les ingénieurs faisant preuve d’une « valeur professionnelle exceptionnelle», revalorisation sur une période de quatre ans des grilles indiciaires du 1er mars 2016 et transformation d’une partie des primes en points d’indice donc valorisable au moment du départ à la retraite.
Mais le compte n’y est pas pour l’association car ces mesures n’auront, selon elle, que peu d’impact sur le pouvoir d’achat, avec un bénéfice sur les retraites limité. Et surtout, comme nous l’indique son président dans l’interview ci-dessus, les ingénieurs territoriaux subissent un allongement de carrière sans précédent. L’association réaffirme la nécessité de supprimer le premier échelon du grade des ingénieurs, d’améliorer l’accès au grade d’ingénieur hors classe, de supprimer le contingentement de l’examen professionnel d’ingénieur en chef.

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