Baisse des dotations : aucune commune ne sera épargnée…
Les consultants spécialistes en finances des collectivités locales redoutent une fragilisation générale de la situation financière des communes. Des mesures drastiques s’imposent dès 2015... y compris dans les villes en bonne santé.
« Quelle que soit sa santé financière actuelle, une ville se retrouve face à l’enjeu majeur de se résoudre à absorber la baisse des dotations », assure Nicolas Phlippoteau, manager finances publiques locales chez Deloitte. « Le fait nouveau est que même les communes dont la situation financière est satisfaisante aujourd’hui iront dans le mur en 2017 si elles n’agissent pas dès 2015 sur leur section de fonctionnement ».
Ce constat fait partie des enseignements issus d’audits financiers réalisés par Deloitte dans une quinzaine de villes de 5 000 à 100 000 habitants.
Ce constat fait partie des enseignements issus d’audits financiers réalisés par Deloitte dans une quinzaine de villes de 5 000 à 100 000 habitants.
Dégager un autofinancement suffisant - Pour Jean-Pierre Coblentz, directeur de Stratorial Finances, « la seule certitude aujourd’hui est que personne, hormis éventuellement les communes nouvelles en fonction du texte qui sera prochainement adopté, n’échappera à la baisse des concours financiers de l’Etat. En revanche, les effets seront très différents d’une collectivité à l’autre ».
Tout l’enjeu consiste à dégager une capacité d’autofinancement suffisante pour préserver l’épargne nette, mais l’exercice va devenir de plus en plus délicat. Le bon ratio est une épargne supérieure à 10 % des recettes de fonctionnement, en-dessous les collectivités disposent de peu de marges de manœuvre et n’auront quasiment plus d’épargne dans trois ans.
Celles dont l’épargne se situe au-dessus de 10 % ne sont pas pour autant épargnées, car ce ratio se dégradera si elles n’engagent pas un plan d’économies de leurs dépenses de fonctionnement.
Celles dont l’épargne se situe au-dessus de 10 % ne sont pas pour autant épargnées, car ce ratio se dégradera si elles n’engagent pas un plan d’économies de leurs dépenses de fonctionnement.
Effet de ciseau - Si rien n’est fait, les conséquences ne doivent pas être prises à la légère. « Une collectivité se doit de présenter un budget de fonctionnement équilibré », rappelle Nicolas Phlippoteau. En cas contraire et si la collectivité ne prend pas d’elle-même les mesures assurant cet équilibre, l’Etat impose au préfet d’augmenter les impôts pour compenser la différence.
De plus, constate le consultant, « il ressort des audits que l’épargne de la moitié des villes suffit tout juste à rembourser le capital de leur dette, ce qui signifient qu’elles ne disposent plus d’aucune marge de manœuvre en matière d’autofinancement ». La raison tient notamment à l’effet de ciseau entre les nouvelles dépenses qui leur sont imposées, à l’instar de la réforme des rythmes scolaires, et qui ne sont pas intégralement compensées, et des recettes en berne (baisse des dotations, ressources fiscales réduites aux seuls impôts ménage).
Frilosité des banques ? – « Des marges de manœuvre existent encore dans bien des cas », tempère Jean-Pierre Coblentz suggérant toute une série de leviers pour faire des économies : intensifier les efforts de gestion, notamment en matière de rationalisation des achats et de gestion du patrimoine, améliorer l’organisation, accentuer les mutualisations avec toutefois des effets différés, réinterroger dans certains cas, le niveau du service public.
« Nombre de ces leviers sont peu aisés à manier », reconnaît Jean-Pierre Coblentz, « et nécessitent une ferme volonté. La flexibilité des charges a ses limites sur les plans juridique (par exemple, les normes d’encadrement du personnel pour certains services à la population, le statut de la fonction publique..) et politique ».
« Nombre de ces leviers sont peu aisés à manier », reconnaît Jean-Pierre Coblentz, « et nécessitent une ferme volonté. La flexibilité des charges a ses limites sur les plans juridique (par exemple, les normes d’encadrement du personnel pour certains services à la population, le statut de la fonction publique..) et politique ».
Les recettes de fonctionnement peuvent également être boostées par l’optimisation fiscale, l’ajustement des tarifs municipaux, la réduction des abattements… Mais difficile, selon Nicolas Phlippoteau, de compter sur le levier fiscal pour dégager de nouvelles ressources car « les maires se sont fait élire sur la promesse de ne pas augmenter les impôts », souligne-t-il.
De même, les banques devraient se montrer de plus en plus frileuses à accorder des prêts aux collectivités si elles ne montrent pas qu’elles font des efforts pour renforcer leur épargne, « ce qui limitera leur capacités d’investissement », anticipe Nicolas Phlippoteau.
De même, les banques devraient se montrer de plus en plus frileuses à accorder des prêts aux collectivités si elles ne montrent pas qu’elles font des efforts pour renforcer leur épargne, « ce qui limitera leur capacités d’investissement », anticipe Nicolas Phlippoteau.
Arbitrages délicats - Dans ce contexte inédit, il va donc falloir « prioriser les actions », « faire des choix » et des arbitrages délicats, s’interroger sur la politique que les élus veulent mener, sélectionner les associations qu’ils souhaitent financer, revoir la politique tarifaire des services publics (niveau des prix, faire payer les usagers ou les contribuables), mais aussi déterminer les investissements réellement utiles au territoire.
Le défi majeur consiste à engager un travail très fin sur l’allocation de toutes les ressources et les coûts des politiques publiques, ce qui implique de mettre en place les outils d’évaluation adéquats. Mais aussi d’adopter un plan pluriannuel d’investissement pour bien calibrer les projets et ce qu’ils vont générer tant en coûts qu’en recettes. Bref, il faut tout remettre à plat…
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