mercredi 23 janvier 2013

Dans un rapport publié mardi, la Cour des comptes dresse un diagnostic sévère des politiques en faveur de l'emploi. Elle estime que le dispositif reste "largement inadapté à un contexte de chômage durablement élevé" et ne cible pas suffisamment ceux qui en ont le plus besoin. /




Pour la Cour, la France a abordé la crise de 2008-2009 "avec des instruments de politique de l'emploi parfois obsolètes, dont l'efficacité s'est révélée décevante".



Elle en veut pour preuve que si l'activité a mieux résisté en France que dans la moyenne des pays de l'OCDE, "l'augmentation du chômage y a été plus marquée à partir de 2009 que chez plusieurs de ses voisins européens."



Cette situation tient selon elle à deux "spécificités françaises" : les employeurs se sont adaptés à la crise en diminuant les effectifs plutôt que le nombre d'heures travaillées, à l'inverse de ce qui s'est fait en Allemagne ; les plus précaires ont été les plus touchés, ce qui a accentué le "dualisme" du marché du travail entre salariés plus protégés et les autres.



L'accord sur une réforme du marché du travail conclu le 11 janvier par le patronat et trois syndicats répond en partie, par certaines de ses dispositions, aux préoccupations exprimées dans le rapport.



Mais le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, s'est refusé à le commenter, indiquant que le travail de l'institution était de juger sur pièces.



Il a fait valoir en outre que des engagements pris précédemment dans des accords similaires n'avaient pas été suivis d'effet à la hauteur des enjeux, comme celui de cibler davantage les aides à l'emploi sur les populations qui en ont le plus besoin.



Ce dernier objectif sous-tend une partie des 26 recommandations faites par le rapport, qui passe au crible des politiques - indemnisation du chômage, aides à l'insertion ou à la réinsertion, formation professionnelle des chômeurs - représentant plus de 50 milliards d'euros de dépenses par an.



PUBLICS PRIORITAIRES



S'agissant de l'indemnisation du chômage, la Cour des comptes souligne que la soutenabilité du financement de ce régime "plus protecteur que dans beaucoup d'autres pays" est remise en cause par la durée de la crise.



L'Unedic a annoncé la semaine passée qu'elle tablait sur un déficit de 5 milliards d'euros à la fin de l'année qui, s'il se confirmait, porterait sa dette à 18,6 milliards.



Le rétablissement des comptes de l'assurance chômage, dont les partenaires sociaux doivent négocier avant la fin 2013 une nouvelle convention, doit passer selon elle par une révision de "l'ensemble des paramètres" (ouverture des droits, durées de cotisation, niveau de cotisation et d'indemnisation...).



Plus spécifiquement, elle recommande un taux de cotisation majoré pour les employeurs ayant le plus recours aux contrats à durée limitée (CDD et intérim), une mesure esquissée dans l'accord conclu ce mois-ci par les partenaires sociaux, et une baisse du taux de remplacement pour les indemnisations les plus élevées.



Elle réitère en outre son appel à une réforme du régime des intermittents du spectacle (1 milliard de déficit pour seulement 3% des demandeurs d'emploi) et prône un réexamen des règles d'indemnisation en activité réduite afin de prévenir le risque qu'elle ne "devienne un complément de revenu destiné à des salariés durablement précaires".



Le rapport se prononce d'autre part sur une simplification des dispositifs de chômage partiel pour faciliter leur utilisation, un autre sujet évoqué dans le dernier accord patronat-syndicats, et la limitation des contrats aidés aux "publics prioritaires".



Pôle emploi est de même invité à cibler son offre de formations à ces mêmes publics et à orienter les contrats de professionnalisation sur les moins qualifiés.



Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse

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