jeudi 11 octobre 2018

Six mois après le début des discussions, le gouvernement organise un premier bilan d’étape avec les cinq organisations syndicales représentatives. Si le calendrier initial s’est détendu, la réforme est toujours annoncée pour 2019

RÉFORME DES RETRAITES : LA CONCERTATION À MI-PARCOURS

Publié le 10/10/2018
Six mois après le début des discussions, le gouvernement organise un premier bilan d’étape avec les cinq organisations syndicales représentatives. Si le calendrier initial s’est détendu, la réforme est toujours annoncée pour 2019
       
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La réforme des retraites va-t-elle connaître un coup d’accélérateur ? Le gouvernement semble, en tout cas, vouloir médiatiser un peu plus ce dossier sensible pour en faire un marqueur politique. Le Premier ministre devrait prendre la parole le 10 octobre à l’issue d’une réunion d’étape de la concertation réunissant pour la première fois les cinq organisations syndicales représentatives. 
Preuve en est, le haut-commissaire chargé de la réforme, Jean-Paul Delevoye, a personnellement animé les premiers ateliers participatifs qui doivent se multiplier dans les territoires au cours des prochains mois.
Le projet gouvernemental encore flou
L’objectif est clair : rappeler les grandes lignes du projet gouvernemental. L’exécutif veut réaffirmer son ambition de mettre sur pied un système universel, à points, grâce auquel un euro cotisé donnera droit au même droit pour tous, salariés du privé comme agents de la fonction publique. Dans le détail, en revanche, le projet du gouvernement est nettement plus flou. Et le haut-commissariat se garde dans l’immédiat d’avancer ses pions.
La phase introductive de concertation, qui s’est déroulée d’avril à juillet 2018, a permis d’aborder trois blocs thématiques. Le premier portait sur la nature du futur système (la question des points et des comptes notionnels). Le deuxième était consacré aux droits non contributifs qui compensent les périodes de chômage, de maladie, de maternité ou d’invalidité. Le troisième bloc a été l’occasion de débattre des droits familiaux et conjugaux, et notamment de la pension de réversion.
« Cette première phase de discussions a été plutôt riche et nous avons eu le sentiment d’être écoutés, mais au bout de six mois, il est temps que le gouvernement commence à préciser ses intentions afin que nous puissions avancer, insiste le secrétaire national Frédéric Sève. Nous savons tous que cette réforme est extrêmement anxiogène chez les Français. Pour que le débat puisse avoir lieu sereinement, il est souhaitable que l’exécutif grave à présent dans le marbre certaines règles. »
Pour un régime porteur de progrès social
À ce stade de la concertation, trois blocs restent à aborder : l’âge légal, les spécificités professionnelles et la période de transition entre l’ancien et le nouveau système. La CFDT attend notamment du Premier ministre qu’il réaffirme que cette réforme n’a pas l’ambition d’économiser de l’argent, mais bien de mettre sur pied un système plus lisible et plus juste. « La création d’un régime universel de retraite adapté aux évolutions de la société peut être un projet porteur de progrès social, insiste Frédéric Sève. C’est en tout cas dans cet esprit que nous nous engageons dans les discussions. » Alors que les jeunes entrent de plus en plus tard sur le marché du travail, que les carrières linéaires sont de plus en plus rares et que l’emploi des seniors ne progresse que timidement (lire l’encadré), les Français doivent pouvoir être rassurés quant à la solidité de leur système de retraite par répartition à long terme. « La création d’un régime universel offre l’opportunité de renforcer le système en mutualisant les risques entre l’ensemble des salariés, quel que soit leur statut », résume Frédéric Sève.
Sauf surprise de dernière minute, le Premier ministre devrait également préciser le calendrier de la réforme. À la fin septembre, le gouvernement avait choisi de se donner un peu plus de temps que ne le prévoyait son projet initial. La concertation avec les organisations syndicales devrait donc s’achever autour de février-mars 2019 (c’était janvier, initialement). La loi, quant à elle, est attendue à l’automne 2019.
   
Emploi des seniors : des progrès contrastés
Voilà un rapport qui ne devrait pas manquer d’alimenter la réflexion. À l’heure où le gouvernement s’apprête à engager une transformation profonde de notre système de retraite, France Stratégie, organisme rattaché au Premier ministre, vient de publier « Les seniors, l’emploi et la retraite ». Un rapport étoffé qui pointe les difficultés spécifiques des salariés âgés sur le marché du travail. Certes, l’emploi des seniors a progressé en France depuis une quinzaine d’années, le taux d’emploi des 55-64 ans passant de 30 % en 2000 à 51 % en 2017. En revanche, celui des 60-64 ans reste, lui, très en dessous de la moyenne européenne – à un peu moins de 30 %, contre plus de 42 % chez nos voisins européens.
Sur le front de la qualité de l’emploi, les seniors apparaissent moins précarisés que le reste de la population. Globalement mieux payés, plus souvent en CDI et moins soumis au sous-emploi que leurs cadets, ils sont aussi moins souvent au chômage. Lorsqu’ils le sont, en revanche, ils font face à de plus grandes difficultés de retour à l’emploi et à un chômage de longue durée.
De manière générale, les seniors souffrent de « difficultés spécifiques » qui peuvent freiner leur maintien ou leur retour à l’emploi. D’une part, les employeurs se montrent frileux quand il s’agit d’embaucher des personnes plus âgées que la moyenne. D’autre part, plus de la moitié des personnes sortirait prématurément de l’emploi en raison de problèmes de santé. Enfin, des conditions de travail difficiles, voire pénibles, sans aménagement de poste, peuvent parfois décourager le maintien en emploi.
France Stratégie rappelle que les différentes réformes des retraites sont loin d’avoir des effets automatiques sur l’emploi des seniors. Ainsi, la réforme de 2010, dont la mesure phare a consisté à reculer l’âge de l’ouverture des droits de 60 à 62 ans, s’est traduite par une progression de l’emploi pour à peine la moitié des personnes concernées. Pour l’autre moitié, ce report de l’âge légal s’est traduit par du chômage ou de l’inactivité (longue maladie et invalidité, notamment).
   

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