Crise ou pas crise, la banque la plus emblématique des dérives de la finance mondiale fait désormais dans le social : En effet, Goldman Sachs va verser 10 millions de dollars pour réduire le taux de récidive chez les mineurs ayant séjourné à Rikers Island.
Sans même s’en rendre compte, jeudi 2 août, le maire de New York Michael Bloomberg a donné une bonne nouvelle qui risque cependant d’être diversement appréciée par les marchés financiers.
Goldman Sachs, la banque qui évoque le mieux dans l’opinion publique mondiale les excès et les dérives de la haute finance dévoyée, tourne enfin le regard vers les prisons.
Message subliminal en direction des régulateurs du marché ? Prise de conscience tardive d’avoir beaucoup à se faire pardonner ? Toujours est-il que la banque vient de décider de verser un pourboire de 10 millions de dollars, consacrés à un projet d’action sociale d’envergure : réduire de 50% le taux de récidive chez les mineurs ayant fait un séjour à Rikers Island. (« Aider les jeunes qui se sont retrouvés en prison, à éviter les problèmes lorsqu’ils rentrent à la maison, est l’un des défis les plus difficiles et les plus importants auxquels nous sommes confrontés » a affirmé Monsieur le maire en conclusion de sa conférence de presse)
On ne sait si l’idée est venue à Lloyd Blankfein, le président de la banque, à la suite d’une discussion avec l’ancien directeur général du FMI qui a eu l’occasion de signer le livre d’or du célèbre établissement pénitentiaire new yorkais…
Les banksters ont aussi du coeur
Ce qui est certain en revanche, c’est que lorsqu’on on chasse le naturel chez Goldman Sachs, il revient à fond la caisse : essayer de faire pleurer dans les banlieues pour faire croire qu’il nous reste un brin de conscience sociale est une chose ; perdre de l’argent en est une autre à laquelle on n’est pas encore habitué : le programme intensif de conseil et d’éducation des jeunes taulards à risque est donc packagé dans un produit financier des familles, une nouvelle usine à gaz comme les matheux de la banque en ont le secret.
Il faut que le taux de récidive baisse d’au moins 10% pour que la banque rentre dans son argent. Au delà, c’est de la philanthropie qui peut rapporter « gros » ; jusqu’à 2,1 millions de dollars si la récidive observée s’effondre de 50%.
Si le programme ne fonctionne pas et que moins de 10% des jeunes ex-détenus de Rikers Island renoncent définitivement à y retourner, ça pourrait coûter jusqu’à 2,4 millions de dollars à la malheureuse banque qui, pensez-donc, ne s’en remettrait peut être pas…a précisé Samantha Levine, l’une des porte-paroles du Conseil Municipal de la Grosse Pomme avec un sourire qui en disait long sur la réalité de l’effort financier consenti.
D’ailleurs la banque a vraiment tout prévu : elle va émettre pour 9,6 millions de dollars d’obligations dites « de service social » (« social service bonds ») garanties à hauteur de 7,2 millions - des fois que - par Bloomberg Philanthropies, le support juridique au moyen duquel Michael Bloomberg conduit ses actions philanthropiques et de mécénat personnelles.
« Nous pensons que cet investissement ouvre la voie pour un nouveau type d’instrument financier permettant au secteur public de compléter un financement initial apporté par le secteur privé » s’est empressé de déclarer le big boss de Goldman Sachs à la suite de l’annonce du maire, avant de conclure : «Notre entreprise espère bien de la sorte, amener d’avantage d’investisseurs privés vers des partenariats public-privé à vocation philanthropique de ce type ».
Le garçon est incorrigible.
C’est à Peterborough en Grande Bretagne que le concept a été testé pour la première fois il y a deux ans. Le gouvernement de sa très Gracieuse Majesté avait accepté de banquer 5 millions de £ pour engager un programme d’action sociale visant à réduire le taux de récidive à la sortie de la taule municipale.
Mettre un petit billet pour essayer d'éviter aux gamins de retourner bêtement en prison, c’est pas un bon placement, ça? D’autant que si c'est bien amené en termes publicitaires, ça peut aussi contribuer à convaincre les juges que les banksters sont plus utiles à la société lorsqu'ils sont en liberté que derrière les barreaux...
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