vendredi 20 août 2010

LA RENTREE........


La rentrée selon les conseillers de Sarkozy
Politique-fiction / jeudi 19 août par Que nous réserve la rentrée politique ? Bakchich se projette dans les arcanes du pouvoir et imagine les petites et les grandes manoeuvres à déployer en septembre.
(Ceci est une fiction. Toute ressemblance avec des personnages existants n’est pas fortuite, mais plausible)

Oliv pcc Sempé
Les brain-storming se sont succédé à l’Elysée et à Matignon la semaine dernière. Tous les communicants ont été mis à contribution. Sous la responsabilité de Claude Guéant, himself, il fallait préparer la rentrée et pouvoir proposer une stratégie de communication au gouvernement. Le Président attend « de l’efficace » pour sauver la réforme des retraites. Il faut à tout prix détourner l’attention de Woerth et de l’affaire Bettencourt.
Pour l’occasion, certains ont reporté leurs vacances, d’autres ont fait leur réapparition, comme Franck Tapiro et Christophe Lambert, deux publicitaires qui avaient disparu du circuit. Tout a été envisagé par ces grands cyniques, de la tentative d’assassinat du Président de la République (une fatwa sur Sarkozy), à une série d’attentats islamistes dans Paris. Après deux semaines de réunions, Guéant a arbitré. Quatre types de plans ont été retenus et seront présentés à l’Elysée pour la fin du mois.
Le premier envisage de révéler un gros scandale politico-financier sur l’opposition. Certains proposaient d’attaquer DSK, son côté bling-bling, Marrakech et autres en font une proie facile. Mais Guéant le considère comme le meilleur compétiteur de Sarko à la prochaine présidentielle et ne veut « pas cramer cette carte ». Delanoë a donc été choisi comme cible. Cela aura l’avantage d’ancrer l’affaire dans l’actualité. Les socialistes ne pourront pas se dédouaner en disant qu’ils ont changé. Cette stratégie a le soutien de Matignon et de quelques spécialistes de la presse. Dans l’hypothèse d’une candidature à la mairie de la capitale, Fillon soutient toute campagne de déstabilisation de Bertrand Delanoë. La presse traditionnelle serait, elle, très remontée contre l’information qu’elle a laissée partir chez Médiapart. La crédibilité que les sites internet ont gagnée à la révélation de l’affaire Woerth-Bettencourt les perturbe. Ils sont bien décidés à se refaire une virginité à la prochaine occasion.
Mais certains politologues très proches de Nicolas Sarkozy sont contre cette stratégie. Kouchner et Lang que Guéant a souhaité consulter, rappellent à qui veulent bien les entendre que « le PS n’a jamais jeté de l’huile sur le feu, et qu’il a fait le service minimum ». Raymond Soubie partage leur avis. Le conseiller social du Président pense que la rue de Solférino soutient la réforme des retraites sans le dire, en vertu du principe qu’en cas d’alternance politique « le sale boulot sera fait ».
Dans cette même stratégie il a été envisagé de relancer l’affaire de l’UIMM et des valises de cash du patronat qui finançaient les syndicats. Là encore, Soubie est contre et ne souhaite pas qu’on présente cette hypothèse à son patron, dont il craint des arbitrages trop rapides. Tous ses efforts pour rapprocher les syndicats, et surtout la CGT de l’Elysée risquent d’être remis en cause. Son avis sera évidemment très écouté, la fragilité de Woerth risque de le mettre en première ligne.
Il va aussi être proposé de relancer la campagne sécuritaire, le problème c’est que la cellule du ministère de l’intérieur s’y oppose. Ses arguments s’articulent en trois points.
Leur ministre, Hortefeux, est épuisé, il n’est donc pas à l’abri de nouvelles gaffes. Les spécialistes de la place Beauvau estiment aussi que les dernières mesures sont le point ultime que les leaders d’opinion peuvent supporter. La nomination de flics à la tête des préfectures, et la déchéance de la nationalité française pour les meurtriers de policiers risquent à terme de rompre la confiance que la majorité des Français ont dans la police.
Il faut ensuite faire attention à l’épuisement de la police elle-même. Elle est sur tous les fronts depuis quelques mois, ce qui augmente les risques de bavures, et les coups de fatigue peuvent se transformer en manifestations incontrôlables. Les informations qui remontent des commissariats et des compagnies de CRS ne sont pas très bonnes ces derniers temps. La cote du gouvernement s’émousse aussi chez les flics. Surtout que le ministère de l’Intérieur est touché par une baisse de ses effectifs pour la première fois depuis de longues années.
Pour le reste, il y a les plutôt pour et les inconditionnels. L’ex-sondeur et politologue Stéphane Rozés fait partie du premier groupe. Il a rappelé un de ses entretiens à Libération où il affirmait que la crise et l’insécurité sociale et économique renforcent la demande de sécurité des Français. « Nous assistons à une montée du rigorisme. Les Français réclament des normes ». Parmi les plus va-t-en guerre un journaliste du Figaro dont nous n’avons pas pu nous procurer le nom rappelle à longueur de séances les sondages publiés par son journal : « 89 % des Français sont pour le port du bracelet électronique après la fin de leur peine, 80 % sont pour l’instauration d’une peine de prison incompressible pour les assassins des forces de l’ordre, et 79 % souhaitent le démantèlement des camps illégaux de Roms ». Guéant aux séances d’arbitrage a écouté d’une oreille attentive les arguments du ministère de l’Intérieur.
A cela vient s’ajouter une baisse des soutiens de l’électorat catholique qui aurait tendance à se tourner vers Villepin. Caillou sur le gâteau, la critique de Rocard « sur la politique de guerre civile » a déstabilisé certains conseillers. Guéant a donc décidé de proposer des actions qui soudent les Français.
L’accroissement des forces françaises en Afghanistan permettrait d’atteindre cet objectif. L’armée américaine a besoin de soutiens, ses alliés ont de plus en plus de mal d’engager leurs troupes dans des opérations risquées, et elle doit tailler dans ses budgets militaires. Les Néerlandais ont rapatrié leurs troupes cet été, l’Allemagne traine de plus en plus des pieds. Il suffit de proposer à l’US Army de les soutenir dans certaines de ses opérations difficiles, et d’augmenter nos effectifs engagés. Le ministère de la Défense n’a pas encore été mis dans la confidence, mais les experts du château pensent qu’il suffit d’accélérer la rotation des régiments, voire d’augmenter d’un mois leur temps d’engagement. Les experts interrogés, ont tous dit que les officiers subalternes, et les chefs de corps seront pour et que les états-majors seront plus mitigés.
L’effet escompté est triple. Un débat naîtra autour de l’engagement des forces armées contre les Talibans. L’opposition pourra se faire entendre, elle demandera un vote du parlement. La presse adore traiter ce type d’engagements, il faudra penser à "embedder" deux ou trois équipes de télévision dans les régiments engagés. Pour finir, la cellule diplomatique de l’Elysée y voit l’occasion de se rapprocher des Etats-Unis. Le seul problème de cette stratégie est son coût, le ministère du budget l’évalue à un point de déficit supplémentaire. Evidemment personne n’a parlé du risque humain, mais tout le monde pense qu’un accrochage majeur avec quelques pertes humaines aurait tendance à fédérer la nation derrière le gouvernement.
La dernière stratégie, la plus risquée, a été proposée par les lecteurs du Monde. Pourquoi ne pas instrumentaliser le scandale des frégates, qui a coûté la vie à X français, et laisser Balladur se dépêtrer avec ? Guéant est persuadé de pouvoir protéger le Président. Ce scandale est une épée de Damoclès sur le gouvernement. L’utiliser à des fins politiques est une stratégie gagnante. Il suffit de trouver un ou deux militants qui serviront de fusibles, et l’affaire est jouée. Il existe un risque, mais l’institution judiciaire est sous contrôle, et bien piloté depuis l’Elysée, ce risque peut être réduit à pas grand-chose. Il faudrait juste s’assurer de nouveau de la Chancellerie. Dans ce cas le timing serait le suivant, déplacer Alliot-Marie, et la remplacer par un des membres du premier cercle. Un des membres de la cellule a demandé à Guéant s’il était prêt à s’installer à la Justice. Le secrétaire général de l’Élysée n’a pas répondu…

Aucun commentaire: