mardi 3 juin 2014

Contenu de l’avant-projet de loi « clarifiant l’organisation territoriale de la République » qui fait suite à la loi, promulguée en janvier dernier, de modernisation de l'action publique territoriale.

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Cette info-rapide présente le contenu de l’avant-projet de loi « clarifiant l’organisation territoriale de la République » qui fait suite à la loi, promulguée en janvier dernier, de modernisation de l'action publique territoriale.
Cette info-rapide a pour objet d’informer les organisations de la CFDT du contenu de l’avant-projet de loi « clarifiant l’organisation territoriale de la République » qui fait suite à la loi, promulguée en janvier dernier, de modernisation de l'action publique territoriale (qui a notamment créé les métropoles).
I.    La consécration des régions et des métropoles
Le projet de loi consacre, comme prévu, le rôle de leadership des régions sur les collectivités locales qu’elles englobent :
·         Des compétences renforcées pour les régions
La région se voit dotée de nouvelles compétences : leadership quasi-total en matière économique (CCI, CMA, Pôles de compétitivité, aides aux entreprises, etc.). Elle reçoit la compétence des transports non-urbains (qu’elle peut néanmoins déléguer) ainsi que la gestion des transports scolaires.
La clause de compétence générale des régions et départements est supprimée, mais subsistera « en matière de logement et d’habitat, ainsi que dans les domaines de la politique de la ville et de la rénovation urbaine », afin de permettre la participation de ces institutions à la politique de la ville. De même, la culture, le sport et le tourisme deviennent des compétences partagées des collectivités locales. La région est chef de file sur le tourisme, la gestion des offices du tourisme étant transférée aux communautés de communes.
Enfin, les régions seront dotées d’un pouvoir réglementaire. Cependant, un grand flou entoure l’étendue de ce pouvoir, sa valeur réelle et la capacité des collectivités à s’en saisir. 
·         Affirmation des métropoles au détriment des départements
Les départements devront contractualiser avec les métropoles le transfert de quatre des neuf compétences citées ci-après, sous réserve que la totalité soit transférée aux métropoles :
-           Attribution des aides au titre du fonds de solidarité pour le logement ;
-           Missions confiées au service public départemental d'action sociale ;
-           Adoption, adaptation et mise en œuvre du programme départemental d'insertion ;
-           Aide aux jeunes en difficulté ;
-           Actions de prévention spécialisée auprès des jeunes et des familles en difficulté ;
-           Personnes âgées et action sociale ;
-           Gestion des départementales ;
-           Collèges ;
-           Tourisme. 
·         Une planification par le biais de schémas régionaux
Comme annoncé, ce rôle nouveau des régions passera par la mise en place de deux schémas régionaux thématiques (économique et développement durable) prescriptifs. Seules les métropoles pourront négocier ce schéma avec la région. Le schéma de développement durable inclut la gestion des déchets, l’intermodalité des transports et l’urbanisme.
De manière plus symbolique, deux régions pourront s’associer pour proposer des modifications à la législation ou à la réglementation en vigueur. Le gouvernement n’est cependant nullement tenu de les présenter au Parlement.
·         Des fusions à venir
Les régions devront fusionner pour atteindre une baisse sensible de leur nombre, entre 11 (selon le premier ministre) et 15 (selon le président). Les assemblées régionales disposent d’un délai pour mettre en place des projets de fusion, après quoi le gouvernement procédera de manière autoritaire. Le projet de loi évoque explicitement les démembrements de région, ce qui a probablement accéléré des projets de rapprochement (Bourgogne et Franche-Comté ainsi que Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie). Cependant, rien n’est prévu dans le texte quant aux modalités pratiques d’un démembrement (répartition des avoirs, de la dette, des personnels, etc.).
·         La fin des conseils généraux ?
Le projet de loi envisage sans l’expliciter la fin des conseils généraux. Les départements voient en attendant leur rôle renforcé en matière d’ingénierie publique, et notamment de soutien aux communes et collectivités de communes. Il reçoit également des compétences élargies en matière d’accès aux services publics et de cohésion sociale et territoriale.
Dans ce cadre sont créées des maisons de services au public chargées d’assurer et, le cas échéant, de regrouper certains services publics. Des incertitudes pèsent sur le financement de ces nouvelles compétences, le texte étant muet à ce sujet.
II.   Des garanties pour les agents
·         Des transferts de personnels sécurisés
Le projet de loi borde sérieusement la question des transferts : dans les cas de fusion, suppression, transferts de compétences, etc., les personnels, titulaires et contractuels, voient garanties leur affectation dans la nouvelle institution compétente, avec garantie du maintien des acquis sociaux.
·         Juxtaposition des instances du personnel en cas de fusion
Dans les cas de fusions de collectivités, la coexistence de plusieurs CT ou CAP est prévue jusqu’aux prochaines élections professionnelles. Les CT devront être informés des fusions de collectivités et de leurs modalités.
·         Des transferts immédiats en cas de transferts de compétences
Dès le transfert de compétences, sans attendre celui, définitif, de services ou de parties de services, l’exécutif récipiendaire prendra la main sur les ressources humaines correspondant aux compétences transférées.
III.De nombreux risques et incertitudes
·         Révision constitutionnelle ou loi organique ?
Un débat existe sur les modalités de la réforme, selon l’interprétation qu’on donne de l’article 72 de la Constitution, lequel dispose de la liste des collectivités locales et de leurs attributs, et si cet article permet de supprimer les CG sans réviser la Constitution, sachant qu’il est possible que le gouvernement ne supprime pas les CG, mais les maintiennent comme assemblées croupions, sans pouvoirs effectifs (peut-être comme espace de concertation locale). Un tel choix permettrait d’éviter la réforme constitutionnelle, mais serait symboliquement assez désastreux, parce qu’il laisserait subsister une strate du mille-feuilles territorial, avec ses élus, mais sans pouvoirs.
S’il le permet, une loi organique sera nécessaire : les modalités de son adoption sont un vote conforme à l’Assemblée Nationale et au Sénat, ou, en cas de divergence entre les chambres, un vote à la majorité absolue des inscrits de l’Assemblée Nationale.
Si la constitution doit être révisée, l’approbation du texte nécessite le vote de trois cinquièmes des parlementaires réunis en congrès, ou le passage par un référendum. Cette option serait nécessairement beaucoup plus périlleuse pour le gouvernement, qui n’a qu’une majorité étroite à l’Assemblée, et est minoritaire au Sénat. Près de 200 députés et sénateurs sont également élus de conseils généraux sur 955. Mais ils ne sont pas les seuls susceptibles d’être réceptifs aux pressions des élus départementaux, les plus opposés à la réforme.
·         Une situation parlementaire compliquée
Le projet de loi reprend de nombreux éléments du projet Lebranchu I, lequel avait déclenché une réelle bronca, notamment au Sénat, et avait été dénaturé par les amendements parlementaires. Dans un contexte de tensions dans la majorité à l’Assemblée (cf. vote sur le Pacte de Stabilité) et à l’approche de sénatoriales qui verront très probablement la droite reprendre le Sénat, le passage législatif s’annonce délicat, même si le gouvernement devrait pouvoir élargir sa majorité sur la droite. Il faudrait un soutien important, ou une abstention massive des parlementaires de droite pour permettre l’adoption de ce texte.
·         Des élus locaux mécontents
De plus, le projet suscite évidemment le mécontentement des conseillers généraux et de l’Association des Départements de France (ADF), pourtant dirigée par des socialistes, mais également des présidents de régions de l’ARF (socialistes également), pourtant bénéficiaire de la réforme mais qui protestent contre les fusions imposées, l’absence d’autonomie fiscale, de compétences exclusives pour les collectivités et de transferts des administrations déconcentrées dont les compétences sont déjà essentiellement aux mains des régions. Or, ADF et ARF ont de nombreux relais dans les deux chambres du Parlement.
·         Des répartitions de compétences pas totalement éclaircies
En cas de suppression des conseils généraux, la répartition de leurs compétences fait l’objet de discussions politiques intenses, avec la répartition provisoire suivante : aux régions (hors métropoles), transports, collèges, maisons de retraite et structure d’accueil des handicapés. A l’Etat ou à la Sécurité Sociale, le RSA. Certaines, comme les pompiers, ne sont pas encore « attribués ».
 Les décisions qui seront prises sur ce dossier impacteront fortement la vie des salariés et le cadre de développement du dialogue social territorial. A ce double titre la CFDT doit prendre toute sa place dans ce débat.
La confédération formulera des propositions qui seront issues du groupe BN dédié à cette question et mis en place après le Congrès confédéral.

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