Éoliennes : à nouveau, une « exception au principe »
JM. Joannes 15/07/2010 Publié dans : Billets juridiques
© R. Bourguet JM. Joannes
Alors que la loi Grenelle II a pour objectif l’installation d’au moins 500 éoliennes par an, un arrêt récent du Conseil d’Etat est particulièrement révélateur de la « dialectique » qui caractérise les débats, souvent houleux, autour de leur implantation.
Les populations refusent leur installation à proximité des habitations mettant en avant des nuisances, principalement visuelles, alors qu’au contraire, les lois d’aménagement du territoire, comme en l’espèce la loi « montagne », freinent toute installation d’équipement en dehors des zones urbanisées…
Le Conseil d’Etat était saisi de l’affaire suivante [1] : par deux arrêtés, le préfet de la Haute-Loire a délivré un premier permis de construire en vue de l’implantation de cinq éoliennes sur le territoire de la commune de Freycenet-la-Tour, et un second permis de construire en vue de la réalisation de trois éoliennes sur le territoire de la commune de Moudeyres. Ces permis sont attaqués au motif qu’ils auraient été délivrés en violation des dispositions de la loi « Montagne » qui tendent à « préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard ».
Opération d’urbanisationLe conseil d’Etat annule l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon qui avait considéré qu’eu égard à leurs caractéristiques techniques et à leur destination, l’implantation d’éoliennes ne constituait pas une « opération d’urbanisation » au sens du Code de l’urbanisme [2]. Selon le juge de cassation, au contraire, le législateur a entendu interdire toute construction isolée en zone de montagne et a limitativement énuméré les dérogations à cette règle.
ContinuitéStatuant sur le fond, le Conseil d’Etat rappelle que les décisions relatives à l’occupation des sols comportent les dispositions propres à préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard [3]. Et sous réserve de l’adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l’extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d’installations ou d’équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants.
Ces principes sont opposables à la construction d’éoliennes et, en l’espèce, eu égard au lieu d’implantation des éoliennes, l’opération d’urbanisation prévue n’est pas réalisée en continuité.
Équipement incompatibleCependant, il existe, des exceptions à ce principe de construction en continuité. Plus particulièrement, et en vertu de l’article L. 145-3 du Code de l’urbanisme, il peut être dérogé à la règle d’urbanisation en continuité pour les installations ou équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées. Dans les circonstances de l’espèce, eu égard à son importance et à sa destination, le parc éolien en cause doit être regardé comme pouvant bénéficier de cette dérogation.
Note 1:CE 16 juin 2010, req. n° 311840. [retour au texte]
Note 2:Code de l’urbanisme, art. L. 145-1 et s. [retour au texte]
Note 3:Code de l’urbanisme, art. 145-3 II [retour au texte]
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