Chômage : une stabilisation en trompe-l'œil
Contrairement aux annonces, nous sommes loin d'une véritable stabilisation de l'emploi. L'examen détaillé des chiffres publiés par Pôle emploi indique au contraire que le marché du travail continue à se dégrader.
Par Guillaume Duval, rédacteur en chef d'Alternatives Economiques
Après avoir baissé de 19 000 personnes en juin dernier, le nombre des chômeurs de catégorie A (ceux qui n'ont aucune activité et cherchent activement un emploi) n'a augmenté que de 11 000 en juillet dernier. Alors que, jusque là, ce nombre progressait par dizaines de milliers chaque mois depuis la fin 2008. Venant après l'annonce de la fin de la récession il y a quelques jours, cette stabilisation du chômage pourrait donner le sentiment que nous sommes en train de « sortir de l'auberge ». L'examen plus détaillé des chiffres publiés par Pôle emploi oblige cependant à relativiser cet optimisme : cette stabilisation est probablement liée surtout au découragement des personnes privées d'emploi qui renoncent de plus en plus à chercher du travail tant la perspective d'en trouver est devenue chimérique...
Dans les statistiques publiées par Pôle emploi, les chômeurs sont en effet répartis en plusieurs catégories. Par facilité, ce sont en général les seuls chiffres de la catégorie A qui sont commentés. Or ces chômeurs ne représentent que 2 535 000 des 4 180 000 inscrits à Pôle emploi, soit 61 % du total. Si on y ajoute ceux qui, tout en cherchant activement un emploi, ont exercé une activité réduite un mois donné (les catégories B et C), on aboutit déjà au chiffre de 3 668 000 chômeurs. Et la hausse de leur nombre a été, en juillet dernier, de 33 000 personnes, trois fois plus donc que pour la seule catégorie A.
Mais c'est surtout une quatrième catégorie de chômeurs qui a explosé en juillet dernier : la catégorie D. Elle rassemble les personnes sans emploi inscrites à Pôle emploi, qui n'ont cependant pas cherché activement du travail le mois considéré. En juin dernier ils étaient 225 000, un mois plus tard ils étaient devenus 266 000, soit 41 000 de plus... Si on additionne ces quatre catégories on aboutit à 3 934 000 chômeurs, et surtout on constate une hausse de 74 000 chômeurs sur un mois. A peine moins que la hausse de 88 000 observée en janvier pour les mêmes catégories. Nous sommes donc loin d'une stabilisation...
Flux mensuels de chômeurs en milliers
Source : DARES
A cela s'ajoute d'autres phénomènes qui minimisent eux-aussi le nombre des chômeurs, sans pour autant traduire une réelle amélioration de l'emploi : les entrées en formation montent ainsi en puissance avec 8000 entrées supplémentaires en juillet par rapport à juin. On observe aussi une hausse sensible des « cessations d'inscription pour défaut d'actualisation » : les chômeurs qui ne vont pas pointer. On en a dénombré 186 000 en juillet dernier, alors qu'il y en avait 164 000 il y a un an, 22 000 de plus. Même si une partie de ces personnes a retrouvé du travail sans se donner la peine de se signaler à Pôle Emploi, il y a fort à parier que cette hausse est liée surtout, comme celle de la catégorie D, au découragement croissant des chômeurs. Enfin, Pôle emploi n'a collecté en juillet dernier que 246 000 offres d'emploi contre 304 000 juin dernier, un volume qui est donc toujours en baisse de 19 %...
Bref, même si la très faible hausse du nombre de chômeurs de catégorie A peut inciter à l'optimisme, le détail des chiffres indique plutôt une aggravation de la situation du marché du travail par rapport aux derniers mois...
27 Août 2009
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