lundi 25 janvier 2016

ML Le branchu :"avec Aix- Marseille-Provence, on a vraiment un intérêt majeur à avoir la grande porte méditerranéenne de la France et de l’Europe. L’intérêt général passe par des phases d’inconfort, pour les élus comme pour les ministres d’ailleurs !"Et les agents et leur point d'indice bloqué depuis 6 ans c'est du confort peut-être ?

Point d’indice : « On ne peut pas encore estimer quel sera le geste du gouvernement »

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© VALERIO VINCENZO
Rémunération, valeur professionnelle, temps de travail, déontologie, formation, la ministre de la Décentralisation et de la fonction publique, Marylise Lebranchu, précise la feuille de route du gouvernement à l'égard des fonctionnaires à la veille d'une mobilisation des syndicats et d'un rendez-vous salarial.
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Les syndicats appellent à la grève le 26 janvier, notamment sur la question des rémunérations. Que pouvez-vous leur promettre ?

Les attentes des syndicats sont fortes car le point d’indice est gelé depuis six ans. Soit une économie de 7 milliards d’euros pour l’Etat. Les fonctionnaires ont donc largement contribué à la baisse de la dépense publique. Je comprends leurs attentes.
L’application du texte « PPCR » (parcours professionnels, carrières et rémunérations, ndlr) est en cours et les dispositions sur le déroulement de carrières et les rémunérations sont une réelle avancée. Jusqu’en 2020, ce protocole propose des revalorisations significatives des rémunérations pouvant atteindre 175 euros brut par mois pour un agent de la catégorie C en fin de carrière.

Les marges de manœuvre dont vous disposez pour le rendez-vous salarial de février ne sont-elles pas trop étroites ?

Le Premier ministre a décidé d’appliquer le protocole « PPCR » dans son intégralité. Le rendez-vous salarial inscrit dans ce texte aura bien lieu fin février.
Nous ne savons pas encore quelles seront les propositions, cela dépendra des indicateurs économiques, donc je reste prudente. Le taux d’inflation aura été quasiment nul en 2015 et la prévision associée à la loi de finances pour 2016 est de 1 %. C’est la raison pour laquelle j’ai dit que le dégel du point d’indice est une possibilité.
Toutefois, depuis la décision de Manuel Valls, sont intervenus les attentats. Les décisions prises en conséquence, notamment d’augmentation d’emplois, ont un coût. Aujourd’hui, personne ne peut estimer quelle pourra être la hauteur du geste par rapport à la reprise de la croissance.

Aborder des négociations dans un tel contexte va s’avérer difficile…

Je ne le pense pas. Car nos organisations syndicales et nos fonctionnaires ont conscience de la situation des comptes de la France. Ils comprennent que l’augmentation de la dette a pour conséquence à terme une perte de souveraineté.
Les syndicats se battent, ils ont raison de le faire, c’est leur rôle, et je tiens à souligner la qualité du dialogue que nous avons avec eux. Nous allons travailler ensemble, par exemple, sur la déconcentration des décisions en matière de ressources humaines, ainsi que sur une nouvelle modalité de reconnaissance de la valeur professionnelle.
Nous devrions également bientôt revenir sur les discussions autour de la qualité de vie au travail, qui n’ont pas abouti à un accord, car ces sujets sont primordiaux.
Nous devrions bientôt revenir sur les discussions autour de la qualité de vie au travail

Quels sont les objectifs de la reconnaissance de la valeur professionnelle ?

Le protocole « PPCR » reste volontairement global pour laisser place à la discussion. Nous avons supprimé la possibilité de faire des avancements automatiques au minimum pour tous les agents des collectivités. Il faut en contrepartie, outre la prime « RIFSEEP » (1), qui constitue une nette amélioration par rapport à la prime de fonctions et de résultats, déterminer des critères d’avancement.
La valeur professionnelle recouvre l’engagement, la formation, le fait aussi d’être en contact direct avec des publics difficiles. Certains souhaitent que l’absentéisme soit pris en compte, mais je n’y suis pas favorable. Je connais d’excellents agents qui ne comptent jamais leurs heures et qui tombent malades.
L’objectif du travail sur la reconnaissance de la valeur professionnelle est d’objectiver l’évaluation pour éviter le fait du prince, particulièrement pour les promotions. La reconnaissance de la valeur professionnelle unifiée entre les trois versants permet aussi d’établir des passerelles entre fonctions publiques et aux fonctionnaires de diversifier leurs parcours professionnels.
La valeur professionnelle recouvre l’engagement, la formation, le fait aussi d’être en contact direct avec des publics difficiles

Vous êtes donc optimiste quant à une issue favorable de cette discussion ?

Les syndicats souhaitent faire part de remontées de terrain différentes de celles que j’ai pu entendre. Je n’aime pas le terme de « mérite » parce qu’il est connoté. L’esprit de la valeur professionnelle est celui d’un avancement au mérite, mais on peut y apporter des nuances. Certains syndicats préfèrent l’usage de l’expression : « manière de servir » ou de « rendre le service public ». Je partage, avec cette appellation, le souci de convaincre également les citoyens usagers.
Le vocabulaire est important car, aujourd’hui, le « fonctionnaire bashing » l’emporte sur la reconnaissance. On exige des fonctionnaires la loyauté, l’impartialité, la laïcité, la dignité du comportement : pour cela, ils méritent de la reconnaissance.

Quelle est votre réaction face aux résultats de l’étude du Cevipof sur le vote Front national des fonctionnaires (2) ?

D’abord, je n’ai pas le droit de juger un fonctionnaire sur son vote. Il a sa liberté de vote comme tout un chacun. Il y a près de 50 % des fonctionnaires qui sont des agents de la catégorie C avec un salaire moyen de 2 091 euros bruts par mois. Ils ont peur pour l’avenir de leurs enfants. Ils sont également inquiets de l’avenir du service public et sont confrontés quotidiennement à la dureté vécue par certains de nos concitoyens.
Ces agents ne votent pas plus Front national que le reste de la population, ils votent même plutôt moins pour ce parti que dans le secteur privé, à catégorie égale. Les fonctionnaires ne sont pas extérieurs à certaines évolutions de la société, ils sont, eux aussi, dans le même monde que nous tous. J’espère qu’avec la reconnaissance que nous pouvons leur apporter leurs craintes diminueront.

Avez-vous eu des remontées concernant des agents dont la manière de servir évolue en fonction de ce vote ?

Je n’ai pas connaissance de signalements de ce type. Mais je sais que les fonctionnaires sont parfois excédés. Nous n’avons peut-être pas su parler à ceux qui se sentent quelque peu abandonnés par la République ou leur encadrement dans leur travail quotidien.
Nous n’avons peut-être pas su parler à ceux qui se sentent quelque peu abandonnés par la République

Où en est-on de la formation des agents face à la radicalisation de certains usagers ?

Souvent, la méconnaissance du droit crée des interrogations ou de l’inquiétude. Nous avons élaboré un véritable cursus, avec l’aide de volontaires spécialisés. Nous avons beaucoup travaillé sur la laïcité et le comportement de l’agent, surtout avec la police, la gendarmerie, l’hôpital et les agents d’accueil d’une manière générale. Ce cycle de formations, en cursus initial ou en formation continue, constitue un processus de longue haleine. Le dispositif essaime aussi dans l’enseignement supérieur. Les demandes sont très nombreuses, sur des aspects particuliers, par exemple, sur le port du voile des accompagnatrices lors des sorties scolaires.

Vous avez finalement décidé de baisser le taux de cotisation du Centre national de la fonction publique territoriale à 0,9 %. Sera-t-il rétabli à 1 % en 2017 ?

Cela dépend. Cette cotisation est assise sur une base assez dynamique. Le CNFPT se retrouvait avec un excédent très important. Ce dernier devait être ajusté. Il faut des règles. On ne prélève pas sur une masse salariale quand on n’en a pas besoin immédiatement. Il est courant et de bonne gestion d’ajuster le montant des subventions publiques en fonction du niveau des réserves financières des organismes subventionnés.
Le CNFPT doit aussi évoluer. Certaines formations ne sont dispensées que dans une seule ville. En période de baisse des dotations, un prélèvement de 1 %, c’est beaucoup, même si la formation est essentielle. Nous verrons. Il faut examiner les propositions, par exemple sur l’apprentissage ou sur la prise en compte du GVT (glissement vieillesse-technicité, ndlr) dans la cotisation.
Nous travaillons également avec les centres de gestion, qui disposent d’excédents significatifs que nous souhaitons résorber. L’objectif examiné actuellement serait de baisser aussi certaines cotisations, si c’est possible, et de mutualiser davantage certains services.
En période de baisse des dotations, un prélèvement de 1 %, c’est beaucoup, même si la formation est essentielle

Quelles nouvelles améliorations prévoyez-vous d’apporter au projet de loi « déontologie » ?

Il reste très peu d’améliorations à apporter. Le régime de sanctions du premier groupe devra probablement être revu lors de l’examen au Sénat le 26 janvier.

N’y a-t-il pas plus d’obligations que de droits pour les fonctionnaires dans ce texte ?

Le premier droit des fonctionnaires est la carrière. Il faut le conforter, car il est très décrié. Ce droit est bien sûr assorti de mobilités obligatoires ou fonctionnelles si des services disparaissent. Le régime de retraite n’est, en outre, pas le même que dans le privé, même si les cotisations seront identiques en 2020.
La fonction publique n’est pas un salariat ordinaire. Comme ce projet de loi assoit la reconnaissance de la fonction publique de carrière sur le fait que les agents portent les valeurs de la République, cela entraîne des obligations qu’il faut redire aux citoyens.
La fonction publique n’est pas un salariat ordinaire

Disposez-vous de premières indications concernant le rapport sur le temps de travail mené par Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la FPT ?

Le rapport est une évaluation, qui demande un énorme travail. Nous n’alignerons pas tout le monde aux 1 607 heures légales car il y a des situations différentes selon des contraintes physiques imposées dont il faut tenir compte. Nous aurons sans doute une surprise s’agissant des cadres qui travaillent bien plus que les 1 607 heures et ne bénéficient pas d’heures supplémentaires. Ce rapport vise également à établir un bilan public-privé et un cadre d’évaluation permanente pour la suite. Nous en ferons une modélisation qui nous permettra d’éviter les clichés.
Nous n’alignerons pas tout le monde aux 1 607 heures légales

Que pensez-vous de la situation de blocage à la métropole Aix-Marseille-Provence ?

C’est du domaine du droit. Jean-Claude Gaudin, élu président de la métropole, a fait un appel qui est suspensif donc il reste président, et nous défendons par ailleurs le texte devant le Conseil constitutionnel. Il faut attendre.
Cela dit, et c’est dommage, un certain nombre d’élus n’ont toujours pas en tête que des outils comme les métropoles d’Aix-Marseille-Provence, de Lyon et du Grand Paris sont indispensables à la France. Il y a un confort à rester dans l’entre soi. Je comprends, c’est difficile de rentrer dans une grande agglomération. Mais avec Aix- Marseille-Provence, on a vraiment un intérêt majeur à avoir la grande porte méditerranéenne de la France et de l’Europe. L’intérêt général passe par des phases d’inconfort, pour les élus comme pour les ministres d’ailleurs !
Il y a un confort à rester dans l’entre soi

Vous attendiez vous au succès des communes nouvelles ?

Il est vrai que cela a marché dès le début. J’étais très hésitante à donner des délais supplémentaires pour la dotation globale de fonctionnement car je pensais que c’était un mouvement inéluctable. A l’intérieur d’une enveloppe normée, cela veut dire que l’on donne plus aux uns et peu moins aux autres. C’est pour cela que l’avantage financier est borné dans la loi de finances pour 2016.

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