mercredi 18 décembre 2013

La mise en œuvre de la réforme de la représentativité a conduit à une abondante jurisprudence:“la jurisprudence de la Cour de cassation a globalement conforté la réforme.En ce qui concerne les listes communes (*) et les clés de répartition des suffrages, la jurisprudence exige que la clé de répartition soit connue de l’électeur en amont du vote. La feuille de route de la conférence sociale de juillet 2013 prévoyait une évaluation de la mise en œuvre de la loi du 20 août 2008 sur la représentativité syndicale. La CFDT y a apporté sa contribution.

(*) Rappelons la volonté ferme de la cfdt de MPM d'affirmer la nécessité d'une offre intersyndicale (incluant les non-syndiqués) pour les futures élections en  CT(P) et CAP de novembre 2014 pour tous les agents appelés à voter qui souhaitent une alternative à la situation (de clientélisme politico-syndical) existante à MPM , la Ville de Marseille, l'Assistance publique  et dans de nombreuses autres collectivités du département ...!

PUBLIÉ LE 27/03/2013 À 09H13par Aurélie Seigne
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La mise en œuvre de la réforme de la représentativité a conduit à une abondante jurisprudence. Quelle lecture en faire ? Quel est son impact ? Quelles nouvelles évolutions attendre ? Éléments de réponse avec Lucie Lourdelle, du service juridique de la Confédération.
LLLa loi du 20 août 2008 a produit une jurisprudence abondante. Pourquoi ?
Beaucoup de points ont dû être précisés. Toutes les conséquences de la réforme de la représentativité n’avaient pas été anticipées. Dans un premier temps, la Cour de cassation a dû cadrer les tentatives de contournement de la loi qui visaient à maintenir une période transitoire par carence volontaire ou à nommer représentant de section syndicale (RSS) un délégué syndical (DS) qui n’aurait pas obtenu les 10 %. Ce qui est très positif, c’est qu’elle a consacré l’audience et les seuils auxquels on ne peut déroger. De la même manière, la Cour a considéré que l’affiliation d’un syndicat constitue un élément déterminant du vote de l’électeur. Enfin, elle a souhaité stabiliser la représentativité en considérant que des élections partielles ne remettent pas en cause la mesure de l’audience en cours de cycle. Tout cela a conforté la réforme.
La jurisprudence a aussi beaucoup porté sur les questions catégorielles et le contentieux préélectoral. Qu’en ressort-il ?
La jurisprudence a permis de clarifier les conditions de représentativité de la Confédération générale des cadres (CGC). En rappelant que si elle se présentait dans un collège autre que cadre, sa représentativité s’appréciait tous collèges confondus et n’était alors pas comptabilisée au niveau national interprofessionnel, elle a poussé cette organisation à clarifier ses statuts pour faire le choix du catégoriel.
En matière de contentieux préélectoral, de nombreuses questions ont surgi : sur la validité des protocoles, la définition des établissements et des collèges, les listes communes et les clés de répartition des suffrages. Sur ce dernier point, la jurisprudence exige que la clé de répartition soit connue de l’électeur en amont du vote. Mais des interrogations restent en suspens quand des clés « tordues » sont appliquées : 0 % à un syndicat, 100 % à l’autre ; ou jusqu’à 10 % à l’un, au-delà à l’autre. Ce sont des points que la jurisprudence devra éclairer.
Cette jurisprudence a-t-elle conduit les équipes à modifier leurs pratiques ?
C’est l’ensemble de la réforme de la représentativité qui a induit une modification des pratiques en profondeur, notamment dans la proximité aux salariés. Mais certains points ont été plus déterminants que d’autres. Ainsi, le mandat à durée déterminée du délégué syndical, qui suppose de le désigner après chaque nouvelle élection. C’est logique dans la philosophie de la réforme, mais c’est un bouleversement en termes de pratique. Au final, cela a renforcé le lien entre délégué syndical, syndicat et fédération.
Dans ses interprétations de la réforme de la représentativité, la Cour de cassation a-t-elle toujours respecté la lettre de la loi et l’esprit des signataires de la position commune ?
La Cour de cassation a très régulièrement consulté l’ensemble des partenaires sociaux pour comprendre en amont ce que les signataires avaient voulu faire et pour mesurer les conséquences de ses décisions. Dans l’ensemble, on peut donc dire qu’elle a comblé les vides de la loi et répondu aux questions qui se posaient dans le respect de la lettre et de l’esprit de la loi. Même s’il y a eu quelques couacs, en particulier sur la désignation d’un RSS en présence d’un délégué syndical central (DSC) et le périmètre de désignation.
Dans le détail, qu’est-ce que cela recouvre ?
Dans un premier jugement, la Cour de cassation avait estimé qu’une organisation syndicale représentative dans l’entreprise, qui avait désigné un DSC  à ce niveau, ne pouvait choisir un RSS dans les établissements où elle n’était pas représentative, du fait de sa représentativité centrale. Cela conduisait à une aberration juridique où un syndicat représentatif dans l’entreprise avait moins de droits qu’un syndicat non représentatif. Heureusement, la Cour de cassation l’a entendu et opéré un revirement à cent quatre-vingts degré. En vertu d’un arrêt de février 2013, un syndicat représentatif dans l’entreprise mais pas dans un établissement peut désigner un RSS, « faute de pouvoir désigner un DS, peu important qu’il ait désigné un délégué syndical central ».
En revanche, la jurisprudence en matière de périmètre de désignation reste très problématique.
De quoi s’agit-il ?
La Cour de cassation a fait une mauvaise interprétation de la loi en considérant que le périmètre de mesure de l’audience et le périmètre de désignation se recouvrent. Cela signifie que dans une entreprise où il y a un comité d’entreprise, mais seulement des délégués du personnel (DP) au niveau des établissements, le DS est désigné au niveau de l’entreprise, et pas dans les établissements. Pour nous, cela pose un problème de négociation – qui n’est alors plus possible qu’au niveau de l’entreprise – et de proximité – le DS est éloigné des salariés des différents établissements. C’est d’autant plus problématique que nombre d’employeurs se sont engouffrés dans la brèche en procédant à une stratégie de concentration des CE. La seule concession faite par la Cour de cassation est qu’un accord collectif peut prévoir d’autres modalités d’aménagement. Mais les employeurs s’en gardent bien. C’est l’un des points qui devraient être revus à l’avenir.
Propos recueillis par aseigne@cfdt.fr

Un bilan du premier cycle de la représentativité

PUBLIÉ LE 12/12/2013 À 16H15par A. S.
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La feuille de route de la conférence sociale de juillet 2013 prévoyait une évaluation de la mise en œuvre de la loi du 20 août 2008 sur la représentativité syndicale. La CFDT y a apporté sa contribution.

Inscrit dans la feuille de route de la conférence sociale de juillet 2013, le bilan de la loi du 20 août 2008 doit permettre d’améliorer la mesure de la représentativité syndicale. La CFDT y a apporté sa contribution, à partir de l’expérience des élections professionnelles dans les entreprises de plus de dix salariés, de la remontée et du traitement des résultats, mais aussi de la jurisprudence sur la mise en œuvre de la loi.
Améliorer le dispositif
Si la représentativité est désormais entrée dans les mœurs, confortant la légitimité des organisations syndicales, la CFDT a relevé un certain nombre de points d’amélioration du dispositif.  Elle réclame notamment que l’affiliation syndicale d’une liste d’entreprise soit obligatoirement affichée, de façon que les électeurs votent en connaissance de cause. Elle propose également de faciliter la remontée des procès-verbaux afin de diminuer le nombre d’anomalies.
Enfin, la CFDT juge indispensable de revenir sur la jurisprudence qui lie périmètre de mesure de l’audience et périmètre de désignation des délégués syndicaux, qui a conduit nombre d’employeurs à réduire la capacité d’action syndicale de proximité en concentrant les comités d’entreprise au détriment des comités d’établissement.

“Donner les moyens au salarié de décider qui signe en son nom est un progrès irréversible”

PUBLIÉ LE 27/03/2013 À 09H15par Aurélie Seigne
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À la veille de la publication des premiers résultats de représentativité, le 29 mars, le secrétaire national Marcel Grignard fait le point sur les impacts de la réforme.
F 3301 p06 MGLes résultats de la première mesure d’audience de la représentativité seront rendus publics le 29 mars. Peux-tu rappeler comment ils auront été calculés ?
Le 29 mars sera rendu public le cumul des résultats des élections d’entreprises de plus de 11 salariés qui se sont déroulées du 1erjanvier 2009 au 31 décembre 2012, des élections dans les très petites entreprises qui se sont tenues en décembre 2012 et des élections dans les chambres d’agriculture qui ont eu lieu en janvier 2013. C’est la première fois que l’on va disposer d’une mesure de l’audience de tous les syndicats dans l’ensemble des entreprises, toutes tailles confondues. Cela représente des dizaines de milliers d’entreprises et des millions de salariés.
C’est un travail titanesque que d’agréger ces résultats ?
La mécanique de remontée des procès verbaux d’élections est très lourde, car elle porte sur l’ensemble des entreprises – à l’exception de celles qui n’ont pas organisé d’élections ou de celles où il n’y a pas eu de candidats – sur un cycle de quatre ans. Cela a nécessité de traiter des centaines de milliers d’informations : branche d’appartenance, répartition des collèges électoraux, date d’organisation du scrutin, etc. Une des difficultés a porté sur la qualité des PV, car il a fallu s’assurer que les informations étaient fiables. Force est de constater qu’avec un taux de conformité de près de 90 %, nous aurons une mesure fiable du poids de chaque organisation syndicale sur le plan interprofessionnel et dans chacune des 750 branches.
Qui sera, demain, représentatif au niveau national interprofessionnel ?
La mesure de l’audience qui sera connue le 29 mars va permettre de vérifier quelles sont les organisations syndicales qui recueillent plus de 8 % des voix des salariés en audience cumulée. À cela s’ajoutera la vérification des autres critères fondant la représentativité syndicale, à commencer par la transparence financière. Une fois cette étape franchie, l’audience électorale de chaque organisation ayant obtenu plus de 8 % des suffrages sera calculée pour déterminer son poids par rapport aux seules organisations syndicales représentatives. Les arrêtés, qui seront pris d’ici le 20 août 2013, fixeront alors la liste des organisations représentatives et leur poids respectif pour l’ensemble du cycle électoral jusqu’en 2017.
Et dans les branches ?
Les règles sont les mêmes dans les branches. Il y a cependant une différence temporaire : jusqu’en 2017, les organisations représentatives au niveau national interprofessionnel le resteront même dans les branches où elles n’auront pas atteint le seuil des 8 %.
Cela signifie que l’on ne prendra la véritable mesure de la représentativité qu’en 2017 ?
On aura une vision exacte du poids de chacun au niveau national et dans les branches en août 2013. Mais l’on n’assumera les conséquences pleines et entières au niveau des branches qu’en 2017.
Les résultats des entreprises à statut, qui ne relèvent pas du champ de la négociation nationale interprofessionnelle, seront-ils pris en compte ?
Toutes les questions soulevées par l’application de la réforme de la représentativité ont été traitées au sein du Haut Conseil du dialogue social (HCDS), qui réunit les partenaires sociaux autour de représentants du ministère du Travail et de personnalités qualifiées. Lorsque les réponses faisaient l’unanimité, elles ont été tranchées par le HCDS. Sur deux points plus délicats, ce n’est pas le cas : la prise en compte des résultats dans les Dom (départements d’outre-mer), qui pose le problème de l’affiliation des organisations aux confédérations métropolitaines, et la prise en compte des résultats des élections des entreprises à statut dans la mesure de l’audience. Sur ce dernier point, le HCDS a émis un avis favorable visant à intégrer le vote des salariés de droit privé des entreprises à statut. Reste au ministre du Travail à valider cette orientation. Cela relèvera donc de sa décision, en dernier ressort.
On imagine que des organisations qui se sentiraient lésées par les résultats de la représentativité ou n’en partageraient pas la philosophie pourraient engager des contentieux contre la première mesure d’audience. Cela ne risque-t-il pas d’affaiblir la réforme ?
Une bagarre juridique est évidemment possible. S’ouvrirait alors une période compliquée durant laquelle les anciens critères de représentativité seraient caducs et les nouveaux fragilisés par la contestation juridique. Mais ce n’est pas de nature à remettre en cause la réforme. Donner aux salariés les moyens de décider qui parle, qui négocie et qui signe en leur nom est un progrès irréversible.
Quelles peuvent être les incidences de la représentativité sur la négociation collective ?
Cela va avoir une incidence majeure sur la responsabilisation et la légitimité des organisations syndicales qui négocient. C’est essentiel, au moment où le pays s’engage dans une nouvelle articulation entre démocratie politique et démocratie sociale et où le dialogue social prend une place prépondérante pour assumer les changements indispensables dans une société en mutation. La réforme va consolider la légitimité des organisations syndicales et des actes qu’elles posent, conférant une responsabilité accrue à celles qui ont la volonté et la capacité de s’engager. La négociation interprofessionnelle et de branche en sortira renforcée car les acteurs syndicaux devront mieux assumer leur rôle : s’engager, laisser s’engager sans s’opposer ou s’opposer, selon leur poids.
Et sur le paysage syndical ?
La CFDT a voulu cette réforme de la représentativité pour légitimer le rôle du syndicalisme et la valeur de l’accord collectif. Au-delà de cette légitimité et de cette efficacité émerge la nécessité pour les organisations syndicales de travailler davantage ensemble afin d’être porteuses de projets collectifs. Potentiellement, cela peut diminuer les conséquences négatives de l’émiettement du paysage syndical français.
Lors de la Conférence sociale, le Premier ministre avait annoncé un bilan de la réforme de la représentativité syndicale, au second semestre 2013, pour « apprécier si des ajustements sont nécessaires ». Du point de vue de la CFDT, quels pourraient-ils être ?
L’étape franchie avec la représentativité des organisations syndicales doit s’accompagner d’une amélioration de l’ensemble du dispositif légal. Cela nécessitera une évaluation de la jurisprudence et de la mise en œuvre de la loi du 20 août 2008 afin de parvenir à un diagnostic partagé sur les évolutions nécessaires à apporter à la loi.
La représentativité patronale peut-elle faire partie de ces ajustements ?
La finalisation du premier cycle électoral pour les organisations syndicales oblige, en symétrie, la partie patronale à régler la question de sa représentativité. C’est d’autant plus vrai que nous sommes engagés dans un processus de constitutionnalisation de la démocratie sociale.
Les premiers résultats de la mesure d'audience de la représentativité syndicale seront connus le 29 mars. Les arrêtés de représentativité qui détermineront le poids de chaque organisation représentative pour le cycle 2013-2017 seront pris d'ici le20 août 2013. 

© Ludovic/réa - DR

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