vendredi 9 mai 2014

LA CFDT ET L'EUROPE




"LE REPLI NATIONAL N'EST PAS UNE RÉPONSE POUR LES SALARIÉS"

Marcel Grignard, trésorier de la CFDT et spécialiste des questions européennes.© Meigneux / SIPA

Le 08 mai 2014 | Mise à jour le 08 mai 2014
ADRIEN GABOULAUD

Paris Match est partenaire des Etats généraux de l'Europe, qui se déroulent vendredi à Paris. La CFDT, comme de nombreuses associations, y participe, afin notamment d'interpeller les candidats aux élections européennes. Marcel Grignard, trésorier et chargé des questions internationales et européennes pour la Confédération, a répondu à nos questions.

Paris Match. Selon notre enquête en continu Eurorolling Paris Match-Ifop-Fiducial-Sud Radio, le taux d'abstention pour les élections européennes s'annonce très élevé. Comment analysez-vous, à la CFDT, cette défiance face à l'Europe?
Marce Grignard. Ce désaveu correspond au fait que beaucoup de salariés et de nos concitoyes ont perdu de vue ce que nous devions à l’Europe. On lui doit la paix, on lui doit la démocratie. Ce ne sont pas des choses banales quand on voit ce qui se passe autour de nous. Il ne faut pas oublier, aussi, ce qu’elle nous a apporté au quotidien. Il y a des améliorations de nos conditions de travail qui sont le résultat du travail de l’Europe.

Le Front national est, toujours selon notre sondage, favori de cette élection. Est-ce un problème?
Ce n’est pas une très bonne nouvelle parce que le repli national n’est pas la réponse positive pour les salariés. On fait fausse route sur la nature des problèmes, et sur la nature des réponses. Par exemple, on utilise chez nous beaucoup de produits qu’on ne fabrique pas nous-mêmes et nos voisins nous achètent nos produits. C’est comme ça, la vie!

Vous évoquiez des améliorations des conditions de travail. Pour les eurosceptiques, le bilan de l'Europe est pourtant négatif. Que leur répondez-vous?
Il y a plein d'exemples de conquêtes sociales au niveau européen. Par exemple, disposer d’un congé parental rémunéré pour les jeunes mères de famille, ça a été institué grâce à l’Europe. Ca n’a pas changé la situation française parce qu’on disposait de ce congés, mais en Irlande, il a été instauré. L’Europe a donné des droits à des gens dans d’autres pays européens et de ce fait, elle a réduit la concurrence entre les pays. Ça consolide nos propres droits. Autre exemple: nos amis allemands vont mettre en place un salaire minimum chez eux, à 8,50 euros, dans des secteurs où les salaires étaient beaucoup plus bas de quelques euros, notamment dans l’agriculture et dans l’agro alimentaire. Ça va fortement réduire la concurrence entre les salariés allemands et les salariés français, ce qui va préserver des emplois en France.

"C'EST LE MANQUE D'EUROPE QUI CRÉE UNE CONCURRENCE MALSAINE"

L'exemple allemand, c'est pourtant l'exemple d'une décision nationale et pas européenne...
C’est une décision allemande, mais l’Europe, c’est parfois des décisions prises au niveau de l’Union européenne, mais c’est aussi des pays qui se concertent et qui travaillent ensemble pour avancer dans la même direction. On a travaillé pendant des années avec nos collègues allemands pour qu’on arrive à ce salaire minimum en Allemagne. Ce que fait l’Europe, ce n’est pas seulement le résultat de ce qui se passe à Bruxelles. C’est aussi ce que font les Etats ensemble, dans cette concertation multiple.

Vous citez des décisions qui permettent de réduire la concurrence entre salariés. Pourtant, c'est bien le développement de cette concurrence qui inquiète beaucoup de citoyens.
C’est le manque d’Europe qui crée cette concurrence malsaine. On ne peut pas dire que c’est l’Europe qui l’organise. Je ne connais pas de mesure européenne qui vise à augmenter la concurrence entre les salariés. Je connais des décisions prises par les chefs de gouvernements qui ont conduit à mettre les salariés d’un pays en concurrence avec les salariés d’un autre pays. Par exemple, quand un pays décide de modifier sa fiscalité des entreprises pour attirer les entreprises. Ce n’est pas la conséquence d’une action européenne, mais bien le fait d’une absence de décision européenne parce que sur la fiscalité, chaque pays est maître de ce qu’il fait chez lui, ce qui lui permet de créer la concurrence

L'omniprésence du terme «concurrence» dans les traités qui structurent l'Europe ne vous gêne-t-elle pas?
Le fait que l’Europe propose qu’on soit dans une concurrence libre et non faussée, ça ne me choque pas. Ca voudrait dire quoi, une concurrence non libre? Des systèmes dictatoriaux? Une concurrence faussée, ça voudrait dire qu’on peut tricher? En revanche, la concurrence en tant que telle n’est pas une politique. La politique, c’est prendre en compte des intérêts communs.

La gauche rêve d'une Europe sociale. Faudra-t-il inventer un dialogue social européen pour l'accompagner?
Cela existe déjà. Au niveau européen, les partenaires sociaux européens -la Confédération européenne des syndicats et le patronat rassemblé dans BusinessEurope- ont déjà l’habitude de négocier. Ils ont conclu un certain nombre d’accords au niveau européen, qui sont déclinés après dans nos territoires nationaux. Par exemple, on a négocié un accord sur la violence au travail qui s’est décliné en France. Pareil pour la garantie jeunes. On a les dispositifs adéquats, ce qui manque souvent, c’est la volonté politique des acteurs.

Ce travail avec des syndicats européens aux pratiques très diverses vous a-t-il inspiré?
Oui, tout à fait. Le travail qu’on fait avec les autres syndicats européens nous permet de découvrir des pratiques et des cultures intéressantes. Si par exemple en France, le dialogue social est un peu plus développé depuis quelques années, c’est parce qu’on est entouré par d’autres pays européens qui le pratiquent déjà depuis longtemps. Ce qui est très marquant, c’est la pratique du dialogue. Là où trop souvent en France on a une logique d’affrontement, on a dans d’autres pays européens une pratique de dialogue pour faire l’état des lieux. C’est parfois rude, mais on trouve des solutions.

Quel est l'intérêt pour la CFDT de participer à un événement comme les Etats généraux de l'Europe, qui se tiennent vendredi à Paris?
L’enjeu pour la CFDT, c’est de travailler avec d’autres associations pour former cette société civile extrêmement utile à l’Europe. Il s'agit de débattre à partir de réalités diverses et de promouvoir une vision où l’Europe est d’avantage une solution qu’un problème.

Les Etats généraux de l'Europe

Voués à rassembler la société civile européenne, les Etats généraux de l'Europe, organisés notamment par EuropaNova, vont se dérouler vendredi toute la journée à Paris, au palais d'Iéna, siège du Conseil économique, social et environnemental. L'ensemble des têtes de liste de la circonscription Île-de-France pour les élections européennes seront présentes pour répondre aux interpellations des différents acteurs réunis. Partenaire de l'événement, Paris Match sera mobilisé toute la journée pour vous le faire vivre.

Toutes les informations sur le site des Etats généraux de l'Europe : www.etats-generaux.eu

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